L’Almanach international

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1992, Bosnie-Herzégovine, indépendance, 1er mars Bruno Teissier 1992, Bosnie-Herzégovine, indépendance, 1er mars Bruno Teissier

1er mars : la Bosnie-Herzégovine célèbre son indépendance

Le 1er mars 1992, les habitants de la Bosnie-Herzégovine votaient très majoritairement pour leur indépendance à l’égard de la Serbie, noyau dur d’une Yougoslavie moribonde. Ce vote leur coutera trois années d’une terrible guerre et de multiple massacre. En dépit des mauvais souvenirs, et du boycott des Serbes, cette date a été retenue comme la fête nationale. Cette année, c’est sa 29e édition.

 

La date de la fête nationale est celle du référendum sur l’indépendance de la Bosnie-Herzégovine, république fédérée de la Yougoslavie, alors en pleine décomposition depuis la proclamation d’indépendance de deux autres républiques, la Croatie et de la Slovénie, le 25 juin 1991. Le référendum a eu lieu entre le 29 février et le 1er mars 1992. La question du référendum était de savoir si les citoyens étaient en faveur d'une Bosnie-Herzégovine souveraine et indépendante, où toutes les nations constituantes étaient égales. Les Bosniaques et les Croates ont voté massivement pour alors que les Serbes ont boycotté le scrutin. Au total, 2 073 568 électeurs ont pris part au référendum, ce qui représente un taux de participation de 63,6%. Parmi tous ceux qui ont voté, 99,7 % ont voté pour l'indépendance et 0,3 % contre cette décision. Même sans les Serbes, la majorité des inscrits s’était largement prononcée pour l’indépendance d’un État multiethnique et démocratique composé de peuples égaux.

Les États membres de la Communauté européenne ont reconnu la Bosnie-Herzégovine le 6 avril 1992. Les États-Unis d'Amérique l’ont reconnu un jour plus tard, le 7 avril. Le 22 mai 1992, la Bosnie-Herzégovine a été admise comme membre à part entière des Nations Unies.

Ce Jour de l'Indépendance (Dan nezavisnosti Bosne i Hercegovine) et de fête nationale de la Bosnie-Herzégovine a été célébré pour la première fois le 1er mars 1995. Les festivités sont chaque années ignorées par la Republika Srpska, l’entité illégale serbe qui, elle, fête son anniversaire le 9 janvier.

Cet anniversaire de rappelle pas que de bons souvenir. Dès le 6 avril 1992, les Serbes qui refusaient l’indépendance de la Bosnie-Herzégovine allaient déclencher une terrible guerre qui fera plus de 100 000 morts dont une moitié de victimes civiles. Pour leur volonté d’indépendance à l’égard de la Serbie, les Bosniaques vont payer le plus lourd tribu dans cette sale guerre, avec plus 62 000 morts. Les Serbes qui bénéficient de l’appui de ce qui reste de l’Armée nationale yougoslave, pilotée depuis Belgrade, sont à l’origine des principaux massacres. Tel celui du 11 juillet 1995, quand les forces serbes ont procédé à l’exécution de 8000 Bosniaques désarmés à Srebrenica. Il faudra cet ultime grand massacre pour que la communauté internationale réagisse.

Le 21 novembre 1995, un accord de paix a été signé dans la ville américaine de Dayton, mettant fin officieusement à la guerre en Bosnie-Herzégovine. L'accord final a été signé à Paris le 14 décembre 1995 et les accords de Dayton ont confirmé la Bosnie-Herzégovine en tant qu'État indépendant et souverain au sein de la famille des États européens.

31 ans après les Serbes de Bosnie rejètent toujours l’indépendance et la date de la fpete nationale. Pourtant, le 6 juillet 2017, la Cour constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine a rejeté les recours de représentants de l'Assemblée nationale de la Republika Srpska concernant la constitutionnalité du 1er mars comme Jour de l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine et du 25 novembre comme Jour de l'État de Bosnie-Herzégovine, les considérant comme infondés. En revanche, la Cour a déclaré inconstitutionnel le 9 janvier comme Journée de la Republika Srpska.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 29 février 2024

 
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1992, Bosnie-Herzégovine, 9 janvier Bruno Teissier 1992, Bosnie-Herzégovine, 9 janvier Bruno Teissier

9 janvier : les 30 ans d'une république fantoche et le risque d’une nouvelle guerre balkanique

Les Serbes de Bosnie-Herzégovine, célèbrent à Banja Luka, l’anniversaire très controversé de leur république, la Republika Srpska, née le 9 janvier 1992

 

Les Serbes de Bosnie-Herzégovine, célèbrent à Banja Luka, les 30 ans de leur république, la Republika Srpska (RS), née  le 9 janvier 1992, en prélude à une guerre intercommunautaire qui a fait quelque 100 000 morts. Il s’agit, en fait, de la « République serbe de Bosnie », une entité peuplée de 1,5 million d’habitants et composante de la Bosnie-Herzégovine. Cette « fête nationale » a été déclarée anticonstitutionnelle par la justice bosnienne mais le président local, Milorad Dodik, est parvenu à faire valider cet anniversaire de la Republika Srpska (Дан Републике Српске) par « référendum » en septembre 2016. 

Cette journée est chaque année l’occasion de défier la communauté internationale en brandissant le spectre de la sécession. Cette année, on en est peut-être plus proche que jamais. L’annonce, mi-novembre, par le leader de la communauté serbe, Milorad Dodik, de la reconstitution prochaine de son armée démantelée en 1995 a déjà réveillé les fantômes du passé. Il est aussi question de retirer la justice et les impôts des institutions communes de la Bosnie-Herzégovine. Une manœuvre très controversée (y compris parmi les Serbes de RS), qui risque d'affaiblir un peu plus l’État central et fait planer le risque d'une nouvelle guerre dans la région.

L'accord de Dayton de 1995 avait mis fin à un conflit qui avait fait 100 000 morts mais avait consacré la division de la Bosnie-Herzégovine en deux entités, la RS et une entité croato-musulmane, tout en instituant un millefeuille administratif censé prévenir des violences interethniques. La force de Milorad Dodik, qui est en campagne électorale pour sa reconduction en 2022 à la tête de la Republika Srpska, c’est que l’UE ne parle pas d’une seule voix. Il est soutenu dans ses tentations sécessionnistes par la Hongrie et la Slovénie et même la Croatie qui profiterait de l’éclatement de la Bosnie-Herzégovine pour en récupérer une partie, là où les Croates sont majoritaires. Il est aussi soutenu par Belgrade et Moscou, notamment par l’intermédiaire des Loups de la nuit, des extrémistes nationalistes russes pro Poutine qui participent au défilé du 9 janvier… Un anniversaire à haut risque car tout peut basculer en 2022.

Comme chaque année, le défilé est organisé à 12h. sur la place Krajina à Banja Luka. Le même jour, des récompenses sont remises aux institutions et aux personnes méritantes dans le Palais de la République. L'académie solennelle à l'occasion de la fête de la République se tient au Borik Hall, à partir de 14h00.

La veille, le 8 janvier, des couronnes ont été déposées au monument aux soldats tombés au combat de l'armée de la Republika Srpska au cimetière de Sveti Pantelija, sur la place des soldats tombés au combat devant l'hôtel Bosna et au mémorial des ossements et des tombes de douze enfants de Banja Luka au cimetière de la ville.

Lors du défilé, l’un des responsables du génocide, Vinko Pandurević a été placé stratégiquement derrière Milorad Dodik afin qu’il soit bien visible sur les images retransmises par les chaînes de TV. Une manière d’avertissement pour Bosniens qui ne sont pas d’ascendance serbe.

Mise à jour janvier 2023 : Cette année, par provocation, la célébration interdite s’est déroulée non à Banja Luka mais dans une banlieue serbe de Sarajevo (Istočno Sarajevo) en présence des autorités de la pseudo-république et de délégations venues de Belgrade, Moscou, Pékin et Podgorica. Parmi les 2000 personnes qui ont défilé, figuraient des membres du club de motards pro-Kremlin Night Wolves (les louves de la nuit), organisation fasciste connue pour ses liens étroits avec le président russe Vladimir Poutine. Par ailleurs le président des Serbes de Bosnie, le nationaliste pro-russe Milorad Dodik, a décerné l’ordre le plus élevé de cette entité à Vladimir Poutine. Cette annonce a provoqué la vive désapprobation de Bruxelles alors que le statut de candidat à l’adhésion à l’UE venait d’être octroyé à la Bosnie-Herzégovine.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 8 janvier 2022

 
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