L’Almanach international

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26 février : Jour de la résistance des Tatars de Crimée à l'occupation russe

Instaurée en 2020 par le président ukrainien Zelenskiy, cette journée commémore le rassemblement des Tatars de Crimée à Simferopol, devant le parlement de la République autonome de Crimée, le 26 février 2014.

 

Cette journée de commémoration a été instaurée en 2020 par le président ukrainien Zelenskiy, sous le nom de Jour de la résistance à l'occupation de la Crimée et de la ville de Sébastopol (День опору окупації Криму та міста Севастополя) mais on parle aussi du Jour de la résistance des Tatars de Crimée à l'occupation russe.

La date du 26 février fait référence au rassemblement des Tatars de Crimée à Simferopol, devant le parlement (Verkhovna Rada) de la République autonome de Crimée, le 26 février 2014. Ce rassemblement pro-ukrainien d’environ 10 000 personnes avait été organisé par le Majlis du peuple tatar de Crimée, le mouvement Euromaidan Crimea (pro-européen) et d'autres organisations pro-ukrainiennes. Au même moment une manifestation pro-russe était organisée à l’appel du parti L’Unité russe (extrême droite nationaliste). En raison de mesures de sécurité insatisfaisantes de la part des forces de l'ordre, des affrontements ont éclaté entre manifestants pro-ukrainiens et pro-russes, causant la mort de deux personnes. Le rassemblement pro-russe a été repoussé dans la cour de la Verkhovna Rada de Crimée, et la session parlementaire a été annulée.

Cette journée est considérée comme l'apogée de la résistance à l'occupation de la Crimée, car dès le lendemain Poutine intervenait en Crimée (voir 27 février) et les manifestations devenaient beaucoup plus risquées. La Crimée vivant aujourd’hui sous dictature russe, toute expression politique y est interdite, comme dans l’ensemble de la Russie). Les Tatars voulaient montrer que avant d’être occupée par les Russes, administrée par les Ukrainiens, puis à nouveau par les Russes, la Crimée était une terre tarare.

Un khanat de Crimée avait été fondé par les Tatars en 1441. Il contrôlait tout le littoral l’actuelle Ukraine. Le peuple tatar, apparenté aux Turcs, a eu un temps une puissance considérable dans la région, au point de prendre Moscou en 1571. Ils n’ont jamais réussi à envahir toute la Russie, mais les Russes devront verser un tribut annuel aux Tatars jusqu’en 1680. Ainsi s’installe une rivalité qui va tourner en suite en faveur des Russes, lesquels prendront la Crimée aux Ottomans en 1783. 

Petit à petit, notamment à la faveur de la guerre de Crimée au milieu du XIXe siècle, les Russes s’installent et les Tatars sont, en proportion, de moins en moins nombreux dans la péninsule. En 1927, les Tatars sont victimes d’une purge de Staline et, le 18 mai 1944, accusés d’avoir collaboré avec les nazis, ils sont déportés en totalité en Ouzbékistan et en Sibérie. Près de la moitié d’entre eux seraient morts de faim ou de maladie au cours de l’opération. Ils seront finalement innocentés en 1967 par le pouvoir soviétique, mais sans pour autant être autorisés à revenir en Crimée. Ce n’est qu’à partir de 1989 qu’ils pourront le faire mais sans retrouver leurs maisons ni leurs terres. Depuis ils vivent dans une grande marginalité. En 2014, ils ne sont plus que 250 000, soit 12% de la population de Crimée contre 58 % de Russes et 24% d’Ukrainiens. 

Localement, les Tatars forment une minorité qui a pris fait et cause pour Kiev. Leur leader historique est Moustafa Djemiliev. Banni de Crimée en 2014, il est aujourd’hui député ukrainien. C’est l’une des principales personnalités à l’exprimer le 26 février, également qualifié de Jour de la résistance des Tatars de Crimée à l'occupation russe (День опору кримських татар російській окупації).

 

Le 26 février 2014, à Simferopol, devant le parlement. Le drapeau bleu clair est celui des Tatars de Crimée, le jaune et bleu, celui de l’Ukraine

Moustafa Djemiliev, né en Crimée en 1943, déporté avec sa famille en 1944

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1988, 1992, Azerbaïdjan, Arménie, massacre, 26 février, 27 février Bruno Teissier 1988, 1992, Azerbaïdjan, Arménie, massacre, 26 février, 27 février Bruno Teissier

26-27 février : guerre de mémoire entre Azéris et Arméniens

Chaque 26 février, l’Azerbaïdjan commémore le massacre de Khodjaly, un épisode sanglant de la première guerre du Haut-Karabagh, le 26 février 1992. Hasard du calendrier, le 27 février, les Arméniens commémorent le pogrom de Soumgaït : trois jours de violence, les 27-29 février 1988 contre la minorité arménienne d’Azerbaïdjan.

 

Chaque 26 février, l’Azerbaïdjan commémore le massacre de Khodjaly, un épisode sanglant de la première guerre du Haut-Karabagh, le 26 février 1992. Les autorités azéries dénoncent la mort de 613 personnes dont 106 femmes et 83 enfants, des villageois pris au piège d’un conflit qui les dépassaient. Bakou accuse du massacre les forces armées arméniennes, aidées par le régiment no 366 de l'armée russe. Les Arméniens se défendent en accusant l’Azerbaïdjan d’être directement responsable de ce massacre, les soldats azéris auraient reçu l’ordre de tirer sur les civils de Khodjaly. Bakou a tenté en vain, à plusieurs reprises de faire reconnaître un « génocide » opéré par les Arméniens, dénonçant la désinformation de la diaspora arménienne plus influente en Occident que celle des Azéris même si ces derniers disposent à présent de relais médiatiques importants et d’un pouvoir d’influence qui repose sur l’argent du pétrole.

Hasard du calendrier, demain, le 27 février, les Arméniens vont comme chaque année, commémorer le pogrom de Soumgaït  : trois jours de violence, les 27-29 février 1988 contre la minorité arménienne de cette banlieue industrielle de Bakou. Le nombre des victimes n’est pas connu : des dizaines de morts et des centaines de blessés. Il s'agit d'un événement historique et d'un tournant dans l'aggravation du conflit ethnique qui a provoqué les premiers flux de réfugiés arméniens de Soumgaït vers le Karabakh (Artsakh) et l'Arménie. Le caractère prémédité et organisé de ce pogrom n’a jamais été pleinement reconnu par Bakou. Une des conséquences de cette impunité fut que d’autres massacres d’Arméniens eurent lieu à Kirovabad (Gandja) en novembre 1988 et à Bakou en janvier 1990, provoquant l’exode de la minorité arménienne de l’Azerbaïdjan, comme d’ailleurs, l’exode de la minorité azérie d’Arménie.

Le pogrom était la réponse aux premiers troubles provoqués par les Arméniens du Haut-Karabagh. Il sera le déclencheur de la guerre de conquête du sud-ouest de l’Azerbaïdjan, dans les années 1992-1994, par les forces arméniennes mieux équipées et plus aguerries à l’époque. À l’automne 2020, la situation s’est retournée. Les Arméniens ont perdu quasiment toutes leurs conquêtes.

Pour en savoir plus, lire Géopolique de l’Arménie par Tigrane Yégavian

 
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