9 janvier : les 30 ans d'une république fantoche et le risque d’une nouvelle guerre balkanique

 

Les Serbes de Bosnie-Herzégovine, célèbrent à Banja Luka, les 30 ans de leur république, la Republika Srpska (RS), née  le 9 janvier 1992, en prélude à une guerre intercommunautaire qui a fait quelque 100 000 morts. Il s’agit, en fait, de la « République serbe de Bosnie », une entité peuplée de 1,5 million d’habitants et composante de la Bosnie-Herzégovine. Cette « fête nationale » a été déclarée anticonstitutionnelle par la justice bosnienne mais le président local, Milorad Dodik, est parvenu à faire valider cet anniversaire de la Republika Srpska (Дан Републике Српске) par « référendum » en septembre 2016. 

Cette journée est chaque année l’occasion de défier la communauté internationale en brandissant le spectre de la sécession. Cette année, on en est peut-être plus proche que jamais. L’annonce, mi-novembre, par le leader de la communauté serbe, Milorad Dodik, de la reconstitution prochaine de son armée démantelée en 1995 a déjà réveillé les fantômes du passé. Il est aussi question de retirer la justice et les impôts des institutions communes de la Bosnie-Herzégovine. Une manœuvre très controversée (y compris parmi les Serbes de RS), qui risque d'affaiblir un peu plus l’État central et fait planer le risque d'une nouvelle guerre dans la région.

L'accord de Dayton de 1995 avait mis fin à un conflit qui avait fait 100 000 morts mais avait consacré la division de la Bosnie-Herzégovine en deux entités, la RS et une entité croato-musulmane, tout en instituant un millefeuille administratif censé prévenir des violences interethniques. La force de Milorad Dodik, qui est en campagne électorale pour sa reconduction en 2022 à la tête de la Republika Srpska, c’est que l’UE ne parle pas d’une seule voix. Il est soutenu dans ses tentations sécessionnistes par la Hongrie et la Slovénie et même la Croatie qui profiterait de l’éclatement de la Bosnie-Herzégovine pour en récupérer une partie, là où les Croates sont majoritaires. Il est aussi soutenu par Belgrade et Moscou, notamment par l’intermédiaire des Loups de la nuit, des extrémistes nationalistes russes pro Poutine qui participent au défilé du 9 janvier… Un anniversaire à haut risque car tout peut basculer en 2022.

Comme chaque année, le défilé est organisé à 12h. sur la place Krajina à Banja Luka. Le même jour, des récompenses sont remises aux institutions et aux personnes méritantes dans le Palais de la République. L'académie solennelle à l'occasion de la fête de la République se tient au Borik Hall, à partir de 14h00.

La veille, le 8 janvier, des couronnes ont été déposées au monument aux soldats tombés au combat de l'armée de la Republika Srpska au cimetière de Sveti Pantelija, sur la place des soldats tombés au combat devant l'hôtel Bosna et au mémorial des ossements et des tombes de douze enfants de Banja Luka au cimetière de la ville.

Lors du défilé, l’un des responsables du génocide, Vinko Pandurević a été placé stratégiquement derrière Milorad Dodik afin qu’il soit bien visible sur les images retransmises par les chaînes de TV. Une manière d’avertissement pour Bosniens qui ne sont pas d’ascendance serbe.

Mise à jour janvier 2023 : Cette année, par provocation, la célébration interdite s’est déroulée non à Banja Luka mais dans une banlieue serbe de Sarajevo (Istočno Sarajevo) en présence des autorités de la pseudo-république et de délégations venues de Belgrade, Moscou, Pékin et Podgorica. Parmi les 2000 personnes qui ont défilé, figuraient des membres du club de motards pro-Kremlin Night Wolves (les louves de la nuit), organisation fasciste connue pour ses liens étroits avec le président russe Vladimir Poutine. Par ailleurs le président des Serbes de Bosnie, le nationaliste pro-russe Milorad Dodik, a décerné l’ordre le plus élevé de cette entité à Vladimir Poutine. Cette annonce a provoqué la vive désapprobation de Bruxelles alors que le statut de candidat à l’adhésion à l’UE venait d’être octroyé à la Bosnie-Herzégovine.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 8 janvier 2022

 
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