L’Almanach international

Parce que chaque jour est important quelque part dans le monde

1907, Namibie, génocide, 28 mai Bruno Teissier 1907, Namibie, génocide, 28 mai Bruno Teissier

28 mai : la Namibie commémore le premier génocide du XXe siècle

En janvier 1904, des Héréros lancèrent une attaque surprise, tuant quelque 150 colons allemands qui leur avaient volé leurs terres et occupé leur pays. Les autorités allemandes ont répliqué avec une telle violence que la Namibie a été le théâtre du premier génocide du XXe siècle. Celui est commémoré ce 28 mai. Génocide et colonialisme sont intimement mêlés, le drame de Gaza en témoigne aujourd’hui.

 

En 2024, le gouvernement namibien a décidé de commémorer chaque 28 mai, la campagne d'extermination ethnique menée par le gouvernement colonial allemand contre les populations Héréros (ou Ovahereros) et Namas. Ce qui est considéré comme le premier génocide du XXe siècle, s'est déroulé entre 1904 et 1908. Ce 28 mai 2025, est la première commémoration officielle de l’extermination de près de 80 % du peuple Nama et de 50% des Ovahereros, soit quelque 100000 morts. Le pays est aujourd’hui le moins densément peuplé d’Afrique (le 2e dans le monde). Le drame de la Namibie, ce ne sont pas seulement les massacres, mais aussi la répartition des terres faite à cette époque qui a engendré une pauvreté nationale dont le pays a souffert tout au long du XXe siècle.

Après un débat de plusieurs années, l’Allemagne a fini, en 2021 par reconnaître sa « responsabilité morale » dans les massacres, mais elle a évité de présenter des excuses officielles pour éviter se devoir réclamer des indemnisations. Elle s'est toutefois engagée à verser plus d'un milliard d'euros d'aide au développement sur 30 ans, promesse rejetée par la Namibie. Les négociations se poursuivent… Les descendants des victimes demandent notamment à Berlin de racheter les terres encore occupées par des descendants des colons et et de les leur céder.

En 1884, l'Empire allemand a colonisé le territoire de l'actuelle Namibie en la baptisant Deutsch-Südwestafrika (Afrique du Sud-Ouest allemande). Le projet était d’en faire un territoire à prédominance blanche, où les colons posséderaient la majeure partie des terres, tandis que les autochtones vivraient dans des réserves.

Les colons furent encouragés à confisquer terres et bétail aux peuples autochtones, Nama et Héréro principalement, et à les réduire en esclavage. Ceux-ci résistèrent pendant des années à l'occupation européenne. Un jour de janvier 1904, les Héréros lancent une attaque surprise, tuant quelque 150 colons allemands, principalement des fermiers. Des troupes allemandes (Schutztruppen) arrivent en force pour rétablir l'ordre dans la colonie rebelle, une véritable guerre est déclarée. Le 11 août 1904, les Héréros sont finalement écrasés à la bataille décisive de Waterberg. Entre 3 000 et 5 000 combattants héréros périssent au combat, mais l’objectif est de les éliminer pour récupérer la totalité de leurs terres. En octobre 1904, le général Lothar von Trotha, chargé de réprimer la rébellion des Héréros, ordonne leur élimination totale, y compris les femmes et les enfants. À la même époque, les Namas se révoltent eux aussi contre les Allemands et subissent un sort similaire.

Les autorités coloniales établissent cinq camps de concentration : Shark Island, Windhoek, Swakopmund, Karibib et Okahandja. Les prisonniers y sont soumis au travail forcé ; nombre d'entre eux meurent de malnutrition, de faim, d'épuisement, de blessures graves et de maladie. Ils sont également utilisés pour des expériences médicales… Cette politique d’extermination systématique (le terme de génocide n’existait pas encore) des Héréros a créé un précédent qui a inspiré Hitler dans sa politique contre les juifs et autre non-aryens.

La date choisie pour commémorer ce génocide namibien reste contestée par les descendants des rescapés. C’était le jour de 1907 où les autorités allemandes ont ordonné la fermeture des camps de concentration à la suite de critiques internationales concernant les conditions brutales et les taux de mortalité élevés. Car la fermeture des camps de concentration ne mit pas fin aux souffrances des Hereros survivants ; ils furent contraints de travailler comme ouvriers agricoles pour les colons allemands et n'avaient pas le droit de posséder des terres ou du bétail.

Les populations concernées auraient préféré commémorer la date du 12 avril, anniversaire d’un premier massacre commis en 1893 contre des Namas du village de Witbooi, faisant 88 morts (10 hommes et 78 femmes et enfants). En 1904, les Namas comprirent la véritable intention des Schutztruppen allemands, ils s’allièrent aux Ovahereros contre le régime colonial. L'ordre d'extermination contre les Namas sera émis le 22 avril 1905. Celui de l’extermination des Héréros avait été émis par Von Trotha, le 2 octobre 1904, une date qui est commémorée chaque année localement et qui aurait put être celle de la Journée nationale.

Cette toute première cérémonie de la commémoration du génocide (Genocide Remembrance Day) se déroule dans les jardins du parlement de Windhoek, la capitale de la Namibie, avec une minute de silence et une veillée aux chandelles.

Le 28 mai a été déclarée jour férié national en Namibie et des membres de la communauté diplomatique sont attendus à l'événement, où la présidente Netumbo Nandi-Ndaitwah prononcera un discours liminaire. Les commémorations auront ensuite lieu chaque année pour marquer « le début d'un cheminement national vers la guérison », a déclaré le gouvernement. Elles « constituent un moment de réflexion et de deuil national », a-t-elle ajouté. Beaucoup regrettent toutefois le manque de concertation et le peu de présence des chefs traditionnels et de descendants des victimes à cette commémoration. Des appels au boycott ont même été lancés et des cérémonies locales alternatives organisées sur les sites des massacres.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 28 mai 2025

PS : On peut noter qu’au début de la présence allemande, la colonie était dirigée par un certain Heinrich Göring (le père du futur bras droit de Hitler). Il a quitté son poste avant que ne s’enclenche le génocide, mais il est le premier à avoir réclamé des troupes pour mater des autochtones jugés trop peu dociles.

Mémorial du génocide à Windhoek (2016)

Prisonniers des tribus Héréro et Nama pendant la guerre de 1904

 
Lire la suite
2003, Irak, massacres Bruno Teissier 2003, Irak, massacres Bruno Teissier

16 mai : la mémoire des massacres de l’ère Saddam Hussein et de Daech

En Irak, c’est une triste commémoration qui se déroule chaque année le 16 mai. Ce jour-là, en 2003, on découvrait une première fosse commune où reposaient des victimes du régime du Baas. Des centaines de sites seront ensuite exhumés…

 

En Irak, c’est une triste commémoration qui se déroule chaque année le 16 mai. Ce jour-là, en 2003, on découvrait une première fosse commune où reposaient des victimes du régime du Baas. Selon des données irakiennes, il existe des centaines sites comme celui-ci. Près de 300 ont été exhumés depuis 2003 d’autres restent encore à localiser. Elles contiendraient quelque 400 000 personnes. L’Irak est l’un des pays au monde comptabilisant le plus grand nombre de personnes disparues au cours du demi-siècle écoulé. Peut-être un million de personnes. L’exhumation des fosses communes est essentielle pour garantir le droit à la vérité sur les violations des droits humains sous le régime de Saddam Hussein, mais aussi sous l’occupation de l’État islamique.

En 2007, le Conseil des ministres irakien a désigné le 16 mai Journée nationale des fosses communes (يوم المقابر الجماعية). Cette journée permet de se souvenir notamment des massacres de Halabja et d'Anfal (qui visait principalement les Kurdes), des victimes du soulèvement de Sha'ban, les assassinats d’intellectuels et e religieux, chiites en particulier. Les fosses communes découvertes à ce jour, contenaient principalement les restes de musulmans chiites, de Kurdes et de chrétiens assyriens tués pour leur opposition au régime entre 1983 et 1991.

Pour faire progresser la justice et la responsabilisation des victimes et de leurs familles, le gouvernement irakien devrait intensifier ses efforts pour exhumer les tombes, identifier les victimes, restituer les restes aux familles pour qu’elles puissent être enterrées dans les règles, délivrer des certificats de décès et indemniser les familles, comme l’exige la loi irakienne.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 16 mai 2025

Des restes humains découverts en 2008 dans une fosse commune au Kurdistan irakien (photo : James Gordon)

 
Lire la suite
1994, Burundi, attentat, assassinat, 6 avril Bruno Teissier 1994, Burundi, attentat, assassinat, 6 avril Bruno Teissier

6 avril : le Burundi se souvient du président Ntaryamira

Le président Cyprien Ntaryamira est mort le 6 avril 1994, victime d’un attentat dont il n’était qu’une victime collatérale mais dont les conséquences furent terribles. La Journée lui rend hommage ainsi à tous les martyrs des guerres civiles.

 

Le président Cyprien Ntaryamira est mort le 6 avril 1994, victime d’un attentat dont il n’était qu’une victime collatérale. L’année précédente son prédécesseur, Melchior Ndadaye, avait été renversé et assassiné, ce qui avait provoqué une guerre civile dans le pays entre Tutsis et Hutus. Ce même 6 avril 1994, Cyprien Ntaryamira participait aux accords de paix d'Arusha, en Tanzanie, en vue de mettre à ce conflit. Les chefs d’États de la région participaient à cette réunion. Le jet présidentiel burundais était en panne. Le président rwandais, Juvénal Habyarimana, propose à son homologue burundais de le ramener chez via Kigali. Alors qu’il amorce son atterrissage à l’aéroport international de Kanombe, l’appareil est pulvérisé par un missile sol-air au-dessus de Kigali. Les deux présidents périssent donc dans un attentat contre l’avion à bord duquel se trouvent également deux ministres burundais Cyriaque Simbizi et Bernard Ciza. Trente et un ans après les faits, les circonstances de l’attentat ne sont pas encore toutes élucidées. Une chose est sûre, ce n’est pas Cyprien Ntaryamira qui était visé.

Cet attentat du 6 avril a traumatisé le Burundi qui a fait de cet anniversaire un jour férié dédié à son éphémère président, mais il a aussi profondément marqué le Rwanda où il a été l’élément déclencheur d’un génocide qui a fait disparaître en quatre mois, à partir du 7 avril, près d’un million de Rwandais. Au Burundi, la guerre civile également entre Hutus et Tutsis s’est prolongée jusqu’en 2005 faisant, depuis 1993, quelque 300 000 morts.

Chaque 6 avril, la cérémonie se déroule au monument des Martyrs de la démocratie où le président Évariste Ndayishimiye ainsi que son épouse Angeline, se recueillent au nom de tous les Burundais et dépose une gerbe de fleurs sur la tombe du disparu. Ils sont suivis par les représentants du corps diplomatique et consulaire accrédité au Burundi, la famille de feu le président Ntaryamira, des membres des partis politiques et bien d’autres encore. En 2024, pour le 30e anniversaire, la cérémonie fut une occasion de réécouter un extrait de son discours prononcé lors de son investiture tenue le 5 février 1994 dans lequel il appelait les Burundais à être unis pour la restauration de la paix et la sécurité, le respect des droits humains et à être caractérisés par la discipline dans tous les secteurs de la vie du pays.

La commémoration du 6 avril débute par une messe, célébrée à la cathédrale Regina Mundi, en mémoire des martyrs de la guerre civile. Un hommage est également rendu aux ministres Cyriaque Simbizi et Bernard Ciza, qui périrent dans le même attentat.

À Bruxelles, l’ambassadeur du Burundi en Belgique, Ntahiraja Thérence, invite la communauté burundaise d’Europe et les amis du pays à une cérémonie commémorative en hommage au président Cyprien Ntaryamira, ce 6 avril à 15h.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 5 avril 2025

Le président Évariste Ndayishimiye et son épouse Angeline (photo : Présidence du Burundi)

 
Lire la suite
2007, Shoah, massacre, 6 mars Bruno Teissier 2007, Shoah, massacre, 6 mars Bruno Teissier

6 mars : la Journée européenne des Justes

La Journée européenne des Justes a été instituée par le Parlement européen pour rendre hommage à tous ceux qui ont sauvé des vies lors de la Shoah mais aussi lors de tous les génocides et crimes contre l'humanité (en Arménie, en Bosnie, au Cambodge, au Rwanda, en Tchétchénie, au Soudan, à Gaza… la liste n’est pas exhaustive), perpétrés au cours des XXe et XXIe siècles.

 

Le concept de Juste parmi les Nations a été introduit par Yad Vashem, le mémorial officiel d'Israël en mémoire des victimes de la Shoah. À l'origine, il faisait référence aux non-juifs qui sauvèrent des juifs de la Shoah, au péril de leur vie.

Moshe Bejski (1921-2007) un rescapé de la Shoah grâce à Oskar Schindler, qui fut juge de la Cour suprême d'Israël et président de la Commission des Justes, a élargi ce concept à tous les cas de génocide et à toutes les formes de totalitarisme. C’est aussi pour lui rendre hommage que la Journée européenne des Justes (European Day of the Righteous), instituée par le Parlement européen en 2012 a été placée le 6 mars, date anniversaire de sa mort en 2007.

Rappelant l'importance morale que revêt le Jardin des Justes du mémorial de Yad Vashem à Jérusalem, fondé par Moshe Beisky afin de rendre hommage aux personnes qui avaient apporté leur aide à des juifs pendant la Shoah, cette journée du 6 mars a été instituée à la mémoire de tous ceux qui ont sauvé des vies lors de tous les génocides et crimes contre l'humanité (en Arménie, en Bosnie, au Cambodge, au Rwanda, en Tchétchénie, au Soudan, à Gaza… la liste n’est pas exhaustive), perpétrés au cours des XXe et XXIe siècles.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 5 mars 2025

Comme élément graphique des initiatives du 6 mars, un arbre a été créé, formé des mots-clés (en anglais) de la journée européenne des Justes.

 
Lire la suite
1932, 1933, Ukraine, URSS, novembre, génocide Bruno Teissier 1932, 1933, Ukraine, URSS, novembre, génocide Bruno Teissier

23 novembre : Holodomor, le génocide des Ukrainiens voulu par Moscou

Entre 19h32 et 19h33, ce 23 novembre, les Ukrainiens observent une minute de silence en mémoire de la plus grave tragédie de leur histoire : la mort de 7 à 10 millions de leurs compatriotes lors de la grande famine de 1932-1933.

 

Ce jour, entre 19h32 et 19h33, les Ukrainiens observent une minute de silence en mémoire de la plus grave tragédie de leur histoire : la mort de 7 à 10 millions de ses habitants lors de la grande famine de 1932-1933, soit quelque 25 % à 30 % de sa population de l'époque.

À Kiev, un cortège se rend au mémorial de l'Holodomor (голодомо́р « mort de faim » en ukrainien, го́лод, holod, la faim ; мор, mor, l’extermination), par la rue Ivan Mazepa. Des milliers d'Ukrainiens en famille viennent y déposer une bougie.

Une cérémonie a également lieu à Bykivnia, localité de la banlieue de Kyiv où de très nombreux morts ont été inhumés. En 2006, Kyiv reconnaissait le caractère génocidaire de l’Holodomor, pas Moscou où les autorités arguent que la collectivisation forcée, visant à éliminer les koulaks, a provoqué des famines partout en URSS, et que l’Ukraine n’était pas spécialement visée. Kyiv y voit, au contraire, la volonté de Staline de casser la fierté ukrainienne et de détruire à jamais toute tentation d’émancipation, car ailleurs en URSS, la famille n’a pas entrainé la mort d’une telle proportion de la population. La seule exception est le Kazakhstan où l’hécatombe fut pire encore. Le génocide y est connu sous le nom d’Acharchylyk.

Le Canada où vivent un million de descendants d'Ukrainiens, organise ce même jour, quatrième samedi de novembre, des cérémonies dans plusieurs villes. À New York, également, on commémore le crime de masse, comme dans la plupart des pays d’Europe.

À Paris, l’Union des Ukrainien de France organise ce samedi une marche boulevard Saint-Michel (rdv 15h30, place du Panthéon). Comme chaque année, Comité représentatif de la communauté ukrainienne en France avait, il y a quelques jours, organisé une cérémonie du dépôt de gerbes sur la tombe du Soldat inconnu sous l'Arc de Triomphe. Un rassemblement a lieu également dans le Square Taras Chevchenko (angle rue des Saints-Pères et Bd St Germain Paris 6e)…

Une trentaine de pays reconnaissent l’Holodomor comme un génocide : États-Unis, Canada, Brésil, Portugal, Vatican… dernièrement, la Roumanie, la Moldavie et l’Irlande, l’Allemagne, le Parlement européen, la Belgique et la France, en mars 2023, puis la Suisse en septembre 2024…

#Holodomor #Ukraine #URSS #1923 #1933 #ActForUkraine

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 22 novembre 2024

 
Lire la suite
1915, Arménie, Turquie, 24 avril, génocide Bruno Teissier 1915, Arménie, Turquie, 24 avril, génocide Bruno Teissier

24 avril : la date sacrée des Arméniens

C’est la 109e commémoration du génocide des Arméniens. Cette date fait référence à ce jour de 1915 où les autorités ottomanes ont arrêté 600 intellectuels et notables d’Istanbul, sélectionnés sur le seul critère de leur appartenance à la nation arménienne. Les cérémonies commencent dès ce soir, 23 avril, par la traditionnelle veillée au flambeau.

 

C’est la date sacrée des Arméniens du monde entier, la commémoration des victimes du génocide (Մեծ Եղեռն) (Medz Eghern). Cette date fait référence à ce jour de 1915 où les autorités ottomanes ont arrêté 600 intellectuels et notables d’Istanbul, sélectionnés sur le seul critère de leur appartenance à la nation arménienne. Ils ont été déportés et, dans leur grande majorité, assassinés. Ainsi débutait un génocide qui allait emporter 1,5 million d’Arméniens. Les autorités turques reconnaissent quelques centaines de milliers de morts, dus au chaos engendré par la guerre, mais elles nient l’extermination délibérée d’une des composantes de la nation ottomane. Quelques intellectuels turcs ont déjà admis la réalité historique, mais le sujet reste officiellement tabou en Turquie. Une manifestation rassemble à Istanbul quelques milliers de personnes devant le Musée d’arts turcs et islamiques, l’ancienne prison où les premiers rafflés ont été détenus avant d’être déportés.

En Arménie, où le 24 avril est férié depuis 1988, une cérémonie à lieu devant la flamme du souvenir du Mémorial du génocide. Le 23 avril, à Erevan, la foule se rend, depuis le centre-ville, au mémorial. Cette marche organisée tous les ans la veille du 24 avril, jour du début des massacres en 1915, est l’occasion de manifestations patriotiques dont le parti nationaliste (et d’opposition), la Fédération révolutionnaire arménienne (FRA) prend la tête.

À Paris, on procède également au ravivage de la flamme du soldat inconu, place de l’Étoile. Des manifestations se déroulent à Mar­seille (qui annonce un jumelage avec Erevan), Valence (square Jean-Manoug- Stépanian), Vienne (autour du khatchkar du jardins de l’Évêché), Lyon (place Antonin-Poncet, 2e, à 17h30), Paris (à la mairie du 9e arrond., quartier baptisé « la petite Arménie »), Maison-Alfort... dans toutes les villes où les survivants du génocide, débarqués en France à partir de 1922, se sont installés. L’Église Saint-Germain-l’Auxerrois de Paris accueille à 15h une cérémonie en rite arménien.

Le 5 février 2019, le président Macron a annoncé que le 24 avril deviendrait en France, la Journée nationale de commémoration du génocide arménien. En 2022, une trentaine de pays reconnaissent le génocide arménien, dont les États-Unis et la Lettonie depuis 2021. Certains pays manquent toujours à l’appel de la reconnaissance (symboliquement Israël, Rwanda, Namibie…). D’autres nient explicitement tout génocide (Turquie, Azerbaidjan).

À Paris, le rendez vous du 23 Avril à lieu à 19h Place du Canada, devant la statue de Komitas, pour la traditionnelle veillée commémorative organisée par les associations de jeunesse. 109 ans après le Génocide et quelques mois après le drame du Haut-Karabagh, les jeunes Arméniens de la diaspora sont nombreux à vouloir pour rendre hommage à leurs ancêtres.

Au-delà, de la commémoration du génocide, c’est l’effacement d’une culture millénaire qui est dénoncé chaque 24 avril et particulièrement cette année. En effet, les tentatives de récupération ou de destruction du patrimoine arménien du Haut-Karabakh par l’Azerbaïdjan se sont multipliées depuis l’exode forcé de sa population en septembre 2023. Derrière eux, les Arméniens ont laissé un héritage culturel aujourd’hui très menacé.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 23 avril 2024

Voir les commémorations de 2020.

Pour en savoir plus, lire Géopolique de l’Arménie par Tigrane Yégavian.

 

La flamme éternelle au Mémorial du génocide

Le Mémorial a été construit entre 1965 et 1967. Il a d’abord été constitué d’un mur commémoratif. Puis a été érigé le sanctuaire où brûle la flamme éternelle avec la colonne de la Renaissance de l’Arménie, véritable flèche de cathédrale pointée vers le ciel, ouverte en son milieu sur toute sa hauteur.

Lire la suite
1994, Rwanda, génocide, 7 avril Bruno Teissier 1994, Rwanda, génocide, 7 avril Bruno Teissier

7 avril : la mémoire du génocide tutsi au Rwanda

Il y a 30 ans, commençait un génocide qui allait faire disparaître, en trois mois, un million de personnes dans un pays de moins de 7 millions d’habitants, le Rwanda. En dépit des commémorations annuelles, un lourd silence pèse sur le génocide des Tutsis. Le pays a mis beaucoup de temps à le faire entrer dans les manuels d’Histoire. C’est fait à présent, mais le Rwanda est un pays très jeune : 70% de la population a moins de 30 ans et n’a pas vécu le génocide.

 

Il y a 30 ans, jour pour jour, commençait un génocide qui allait faire disparaître, en trois mois, un million de personnes dans un pays de moins de 7 millions d’habitants, le Rwanda.

Tutsi et de Hutu sont des appartenances fixées par les colonisateurs allemands et belges. À l’époque coloniale, les Européens ont voulu catégoriser les populations soumises en ethnies bien identifiables. Dans le cas du Rwanda, cette construction était très largement artificielle, car Tutsis et Hutus habitent le même territoire, partagent la même langue et ont adopté la même religion, le catholicisme. L’ethnie figurait sur les cartes d’identité, c’est ce qui facilita les massacres, car comment identifier à coup sûr les individus à éliminer ?

En 1962, le colonisateur belge après avoir favorisé les Tutsis pendant des décennies, avait laissé le pouvoir à un mouvement radical Hutu (Parmehutu), aussitôt des massacres de Tutsis se sont produits. En 1973, quand Juvénal Habyarimana prend le pouvoir à la suite d’un coup d’État, les Tutsis ne seront plus désormais que des citoyens de seconde zone ce qui engendrera la création du FPR (Front patriotique rwandais) pour combattre le dictateur. Ce mouvement rebelle, implanté dans les pays voisins, est composé de Tutsis et de Hutus modérés qui ont fui leur pays. Le dictateur Juvénal Habyarimana fini par accepter un partage du pouvoir (accord d’Arusha, en août 1993) mais en même temps le pouvoir de Kigali laissait se développer une propagande anti-tutsi aux accents meurtriers. La radio Mille collines qui appelle quotidiennement à éliminer tous les Tutsis du pays est fondée en juillet 1993. Par ses discours de haine, elle joua un grand rôle pendant le génocide. Le 6 avril 1994, l’avion présidentiel est abattu par un missile, on n’a jamais su qui avait tué Juvénal Habyarimana, mais la propagande hutue désigne aussitôt les Tutsis. Le 7 avril 1994, commence des massacres qui ne s’achèveront que le 17 juillet par la prise de contrôle du pays par le FPR et la fuite des extrémistes Hutus au Zaïre (aujourd’hui RDC).

Le FPR a pris le pouvoir en juillet 1994. Depuis, son leader Paul Kagamé est l’homme fort du pays. Il appartient à une famille de Tutsis qui s’était réfugiée en Ouganda, bien avant le génocide. Son régime est autoritaire, mais le pays a retrouvé la paix et a prospéré sous son règne.

Le Rwanda organise tous les ans, le 7 avril, une commémoration du génocide mais sans pour autant avoir cherché à identifier les coupables et les victimes. La mention de l’ethnie sur les cartes d’identité a été enlevée dès août 1994, officiellement, il n’y a plus de Hutus ni de Tutsis, rien que des Rwandais. Néanmoins, la cohabitation entre victimes et bourreaux pose de grandes difficultés à la reconstruction du pays. Dans un souci de réconciliation nationale, les victimes ont été enjointes de pardonner à des bourreaux qui ont rapidement débité un texte de contrition. Un lourd silence s’est imposé. Le pays a mis beaucoup de temps à faire entrer le génocide dans les manuels d’Histoire. C’est fait à présent, mais pour une très large partie de la population, ce n’est plus qu’un fait historique. Le Rwanda est un pays très jeune : 70% de la population a moins de 30 ans et n’a pas vécu le génocide.

De commémorations en commémorations, les choses évoluent à l’international. En 2021, le président Macron, mettait un terme au déni de la France et admettait des responsabilités dans le déroulement du génocide du fait d’un soutien coupable à la dicature extrémiste hutue (la fourniture d’armes aux autorités rwandaises pendant les massacres). En 2024, en vue de ce 30e anniversaire, le président français a affirmé que la France, « avec ses alliés occidentaux et africains » aurait ou arrêter le génocide mais n’en a pas eu, à l’époque, la volonté. Il a rappellé que, « quand la phase d'extermination totale contre les Tutsis a commencé, la communauté internationale avait les moyens de savoir et d'agir, par sa connaissance des génocides que nous avaient révélée les survivants des Arméniens et de la Shoah ». Le Vatican, en revanche n’a jamais fait le moindre commentaire sur l’aveuglement de l’Église face à ce génocide.

En l’an 2000, le Premier ministre belge, Guy Verhofstadt, avait été beaucoup plus clair : « J’assume ici devant vous la responsabilité de mon pays, des autorités politiques et militaires belges, et au nom de mon pays, je vous demande pardon pour cela. » La même année, le secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, avait juste exprimé des remords : « Au nom de l’ONU, je reconnais cet échec et j’exprime mon profond remords. » Remords d’avoir, pendant le génocide, retiré 90% des casques bleus présents au Rwanda… En 2003, l’ONU institue le 7 avril comme la Journée internationale de réflexion sur le génocide au Rwanda qui deviendra, en 2018, la Journée internationale de réflexion sur le génocide des Tutsis au Rwanda en 1994. Chaque année, à cette date ou aux alentours de cette date, l’Organisation des Nations Unies organise des manifestations commémoratives à son siège, à New York, et dans ses bureaux dans le monde entier.

Le Rwanda a deux jours fériés pour commémorer le génocide. La période de deuil national débute avec Kwibuka (“se souvenir”, en kinyarwandais), la commémoration nationale du 7 avril et se termine avec le Jour de la libération (Kwibohora), le 4 juillet.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 6 avril 2024

Le mur où sont inscrits les noms des victimes, au Mémorial de Kigali

 
Lire la suite
1923, génocide, 19 juin Bruno Teissier 1923, génocide, 19 juin Bruno Teissier

19 mai : la mémoire du « génocide »  grec

Les Grecs commémorent une décennie, de 1913 à 1923, rythmée par une série de massacres et d’expulsions massives des Grecs du territoire actuel de la Turquie. Cette année marquée par le centenaire du traité de Lausanne est également célébrée en Turquie, comme l’aboutissement d’un processus national. La date du 19 mai, est celle à laquelle Mustafa Kemal a débarqué à Samsun en 1919. Jour de deuil en Grèce, jour de fête en Turquie.

 

Ce génocide n’a pas eu l’ampleur de celui des Arméniens, s’il a abouti au même résultat : la disparition quasi totale des Grecs du territoire de l’actuelle Turquie, c’est aussi en raison de leur expulsion massive d’Asie mineure consécutive à l’échec  de la Grèce de prendre contrôle de la côte égéenne orientale, entériné par le traité de Lausanne dont on fête cette année le centenaire. Cette défaite et ses conséquences  sont désignées comme la Grande Catastrophe ( η Μεγάλη Καταστροφή ) de l’histoire grecque. Celle-ci ne se résume pas à un échange de population, plus d’un million de personnes entre Grèce et Turquie.

Ce que les Grecs désignent comme le génocide grec (Γενοκτονία των Ελλήνων) est aussi une décennie, de 1913 à 1923, rythmée par une série de massacres. À partir du printemps 1913, les Ottomans ont mis en œuvre un programme d'expulsions et de migrations forcées, axé sur les Grecs de la région égéenne et de la Thrace orientale, dont la présence dans ces zones était considérée comme une menace pour la sécurité nationale. L’un des pires massacres que commémore cette journée du 19 mai est celui de Phocée (une ville d’Asie mineure dont la population avait, jadis, dans l’Antiquité, fondé Marseille). En juin 1914, alors que l’Europe n’est pas encore en guerre, des milices turques ont attaqué la population, assassiné une centaine d’habitants et provoqué la fuite des survivants vers la Grèce. Toujours dans la même région, le fait le plus marquant fut le grand incendie de Smyrne (aujourd’hui Izmir), provoquant la mort de 10 à 15 000 personnes et l’expulsion de quelque 200 000 autres.

La date du 19 mai, choisie par les Grecs pour commémorer cette mémoire, est celle à laquelle Mustafa Kemal (futur Atatürk) a débarqué à Samsun en 1919. Ce jour a marqué le début de la guerre d'indépendance turque et le début de la deuxième vague du massacre de la population grecque en Turquie. La Turquie en a fait la Journée de commémoration d’Atatürk, de la Jeunesse et des Sports, un jour férié, jour de fête en Turquie, jour de deuil en Grèce.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 19 mai 2023

 

En jaune, les Grecs ; en vert, les Turcs, sur une carte ethnique du début du XXe siècle.

Lire la suite
1995, Bosnie-Herzégovine, 11 juillet, massacre Bruno Teissier 1995, Bosnie-Herzégovine, 11 juillet, massacre Bruno Teissier

11 juillet : la mémoire de Srebrenica

Cérémonie à la mémoire des 8372 hommes et adolescents musulmans de Bosnie massacrés à Srebrenica par les forces serbes en juillet 1995. Chaque 11 juillet, des dizaines de milliers de personnes se retrouvent au mémorial de Potočari… Cette année, l’ONU organise une commémoration officielle.

 

Cérémonie à la mémoire des 8372 hommes et adolescents musulmans de Bosnie massacrés à Srebrenica par les forces serbes en juillet 1995. Chaque année, le 11 juillet, pour la Commémoration de Srebrenica (Komemoracija u Srebrenici) des dizaines de milliers de personnes se retrouvent au mémorial de Potočari, créé en mémoire des victimes et inauguré en 2003 par Bill Clinton. Dans les années 2010 encore, l'identification et la ré-inhumation des corps se poursuivaient.

Au début de l'été 1995, 25 000 habitants de la périphérie de Srebrenica cherchent à rejoindre le camp de réfugiés installé par les forces des Nations unies. Seuls 5 000 femmes, enfants et personnes âgées peuvent être accueillis par le bataillon hollandais. Le 11 juillet 1995, le général serbe Ratko Mladic et ses troupes entrent dans la zone de Srebrenica pour prendre le contrôle de la ville. "Nous sommes aujourd'hui, 11 juillet 1995, dans la ville serbe de Srebrenica. La veille d'un grand jour pour la nation", annonce-t-il à l'époque devant les caméras de télévision. "Nous allons rendre la ville à la nation serbe. Le temps est venu de prendre notre revanche sur les musulmans", précise-t-il. À l'annonce de cette offensive, des milliers d'hommes et d'enfants se précipitent pour fuir la ville pour rejoindre Tuzla en traversant la montagnes et rejoindre Tuzla, à quelques dizaines de kilomètres au nord-ouest de Srebrenica. L'armée serbe déploie alors ses hommes dans les bois alentour. C'est le début d'une opération génocidaire à l'origine de la mort de milliers de Bosniaques : la plupart sont exécutés d’une balle dans la nuque après avoir été pris par les forces serbes. Lesquelles font appel à des bulldozers pour creuses des fosses où faire disparaitre les cadavres.

Le 11 juillet 1995, plus de 8000 Musulmans bosniaques étaient ainsi massacrés par l'armée serbe à Srebrenica. La Cour internationale de Justice (CIJ) et le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) ont reconnu le caractère génocidaire du massacre (le pire en Europe depuis la Seconde guerre mondiale). En 2015, La Russie mettait son veto à la reconnaissance par l'ONU du caractère génocidaire de ce massacre.

Finalement, l’ordonnateur de ce massacre, le chef des Serbes de Bosnie Radovan Karadzic, a été condamné par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie le 20 mars 2019. Il a malheureusement inspiré des tueurs comme celui de Christchurch. À ce jour, 47 personnes ont été condamnées à plus de 700 ans de prison pour ces crimes.

Jusqu'à présent, 6 671 victimes du génocide commis en juillet 1995 ont été enterrées au Centre commémoratif de Potocari-Srebrenica, tandis que quelques centaines autres victimes ont été enterrées dans d'autres lieux, selon les souhaits des familles des victimes. Environ 1 000 personnes sont toujours portées disparues.

En juillet 2021, le Haut représentant international en Bosnie-Herzégovine, Valentin Inzko, décide d’utiliser son pouvoir discrétionnaire pour modifier le code pénal et interdire le déni du génocide Srebrenica et des crimes de guerre qui l'accompagnent. Cette décision entraine la protestation des nationalistes serbes, lesquels demeurent dans le dénis des massacres, et le blocage des principales institutions de la Bosnie-Herzégovine. Cette page sombre de l’histoire sombre a également été occultée de l’enseignement de l’histoire en Serbie.

La guerre en Ukraine ravivent aujourd’hui le souvenir de ces massacres que la communauté internationale a été incapable d’éviter.

En mai 2024, l’Assemblée générale des Nations Unies a instaurée une journée intitulée « Journée internationale du souvenir et de la commémoration du génocide commis à Srebrenica en 1995 ». La Mission permanente de la Bosnie-Herzégovine auprès de l'ONU à New York organise aujourd’hui la première commémoration officielle à l'ONU à haut niveau, à l'occasion du 29e anniversaire du génocide des Bosniaques à Srebrenica en 1995. Comme annoncé, la commémoration a lieu dans la salle plénière de l'Assemblée générale des Nations Unies le 11 juillet à 11h00 heure locale (17h00 CET), avec une retransmission en direct sur la télévision de l'ONU.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 11 juillet 2024

 
srebrenica.jpg
Lire la suite
1915, Arménie, France, Turquie, génocide Bruno Teissier 1915, Arménie, France, Turquie, génocide Bruno Teissier

24 avril : la date sacrée des Arméniens

C’est la date sacrée des Arméniens du monde entier, la commémoration des victimes du génocide (Medz Yeghern). Cette date fait référence à ce jour de 1915 où les autorités ottomanes ont arrêté 600 intellectuels et notables d’Istanbul, sélectionnés sur le seul critère de leur appartenance à la nation arménienne.

 

C’est la date sacrée des Arméniens du monde entier, la commémoration des victimes du génocide (Medz Yeghern). Cette date fait référence à ce jour de 1915 où les autorités ottomanes ont arrêté 600 intellectuels et notables d’Istanbul, sélectionnés sur le seul critère de leur appartenance à la nation arménienne. Sur ordre de Talaat Pacha, ils ont été déportés et, dans leur grande majorité, assassinés.  Ainsi débutait un génocide qui  allait emporter 1,5 million d’Arméniens. Les autorités turques reconnaissent quelques centaines de milliers de morts, dus au chaos engendré par la guerre, mais nient l’extermination délibérée d’une des composantes de la nation ottomane. Quelques intellectuels turcs ont déjà admis la réalité historique, mais le sujet reste officiellement tabou en Turquie. Aujourd’hui encore, plus d’un siècle après les faits, le grand architecte du génocide, Talaat Pacha est toujours célébré en héros national gratifié d’un mausolée en son honneur sur la colline de la liberté à Istanbul. 

Le génocide arménien a été officiellement reconnu par les députés français, en 2001, et par les Allemands, en 2016, le Congrès américain a reconnu le génocide des Arméniens en 2019, quelques mois après que le président Macron a inscrit par décret, le 24 avril, au calendrier des cérémonies républicaines. 

Traditionnellement, une manifestation rassemble à Istanbul quelques milliers de personnes devant le Musée d’arts turcs et islamiques, l’ancienne prison où les premiers raflés ont été détenus avant d’être déportés. À Erevan, où le jour est férié depuis 1988, d’ordinaire, une cérémonie à lieu devant la flamme du souvenir du Mémorial du génocide. À Paris, on a aussi coutume de procéder au ravivage de la flamme du soldat inconnu, place de l’Étoile. Un rassemblement se tient aussi place du Canada, devant la statue de Komitas. Des manifestations se déroulent à Mar­seille, Valence, Vienne, Lyon, Maison-Alfort... les villes où les survivants du génocide, débarqués en France à partir de 1922, se sont installés.  Cette année, toutes ces cérémonies sont évidement, annulées en raison de l’épidémie.

À Erevan, d’habitude, une marche est organisée depuis le centre-ville jusqu’au Mémorial du génocide, mais pour des raisons évidentes face aux dangers de l’épidémie et alors que tout le pays reste sous état d’urgence et confinement, aucun rassemblement public n’aura lieu. le 23 avril, à 21 heures, les cloches des églises se mettent à sonner et les lumières de l’éclairage public de la ville comme dans les provinces sont toutes éteintes pour une durée de trois minutes. Chacun est encouragé à faire de même dans son foyer, et à allumer près des fenêtres les lampes de téléphones portables pour s’associer à ces minutes du souvenir. La célèbre chanson Ari im sokhak retentira alors et tous sont invités, l’événement étant retransmis en direct, à se tourner en direction du sommet du Mémorial.

Le 24 avril, à partir de 8 heures du matin, chacun peut envoyer un SMS en composant, depuis l’Arménie, le chiffre symbolique de 1915, et depuis l’étranger, le 0037433191500. Les noms de ceux qui envoient ces SMS seront projetés sur les colonnes du Mémorial afin de montrer la participation à l’hommage rendu aux victimes du génocide. À 10 heures, le Président arménien, le Premier ministre, le Président de l’Assemblée nationale et le Catholicos se rendront au Mémorial et la cérémonie d’hommage aux victimes se déroulera au son de la musique jouée en direct par le pianiste Hayk Melikyan. L’ensemble des commémorations seront retransmises en direct sur les chaînes de télévision et par Internet. 

 
arméniens.png
Lire la suite
1994, Rwanda Bruno Teissier 1994, Rwanda Bruno Teissier

7 avril : il y a 26 ans débutait le génocide rwandais

Il y a 25 ans, près d’un million de personnes ont été exterminées au Rwanda. Les victimes étaient en très grande majorité des Tutsis, mais comptaient également des Hutus modérés, des Twa... Ce génocide, le dernier du XXe siècle, a été soigneusement organisé par l’administration rwandaise de l’époque…

 

Il y a 26 ans, d’avril à juillet 1994, près d’un million de personnes ont été exterminées au Rwanda. Les victimes étaient en très grande majorité des Tutsis, mais comptaient également des Hutus modérés, des Twa et des membres d’autres ethnies. Le génocide des Tutsi, dernier du XXe siècle, a été soigneusement organisé par l’administration rwandaise. Toutes les institutions ont été mobilisées ainsi qu’une partie de la population hutu.

Le 26 janvier 2018, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté une résolution désignant le 7 avril comme la Journée internationale de réflexion sur le génocide des Tutsis au Rwanda en 1994. Cette nouvelle résolution vient modifier le titre de la Journée (Journée internationale de réflexion sur le génocide au Rwanda), mise en place à l'origine par la résolution du 23 décembre 2003.

La date du 7 avril correspond au début du génocide de 1994. Chaque année, l'ONU organise des événements commémoratifs à son siège à New York et dans les bureaux des Nations Unies dans le monde entier.

Les autorités française de l’époque sont souvent accusées d’avoir soutenu jusqu’au bout le régime extrémiste qui a conduit ce génocide. Aujourd’hui, le président Macron entend solder les comptes du passé. Or, malgré le réchauffement récent des relations entre Paris et Kigali, il a fait savoir qu’il ne se rendrait finalement pas le 7 avril à Kigali, où l’avait invité son homologue rwandais, Paul Kagame. Pourtant, celui-ci a été reçu à Paris en mai 2018 et le président français s’était engagé à ouvrir les archives sur le rôle de la France au Rwanda, verrouillées depuis plus de deux décennies. Cette parole sera-t-elle tenue ? Des historiens spécialistes de ce génocide regrettent déjà d’avoir été écartés de la commission chargée de faire la lumière sur les évènements…

L’histoire doit servir de leçon. L’inquiétude se porte aujourd’hui sur le Mali où la France est engagée militairement. Le 23 mars dernier, des hommes armés ont massacré toute une communauté peule – femmes, enfants, personnes âgées.

À voir : le film d’André Versaille : Rwanda, un génocide en héritage - Paroles de jeunes. André Versaille est l’auteur d’un premier film sur le sujet : Rwanda, la vie après - Paroles de mère (2014 - Prix Télérama).
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 6 avril 2020

 
rwandais.jpg
Lire la suite