L’Almanach international
Parce que chaque jour est important quelque part dans le monde
11 avril : la Journée de la poésie hongroise
Cette journée est fêtée en Hongrie depuis 1964. C’est la seule célébration nationale héritée de la Hongrie communiste. Le 11 avril, est l'anniversaire d'Attila József. Un poète qui fut un peu le Rimbaud hongrois, adolescent prodige, mort jeune... Communiste, mais pas trop. C’est aujourd’hui, l’occasion en Hongrie d’un marathon de poésie.
La Journée de la poésie (költészet napja) est célébrée en Hongrie depuis 1964. C’est la seule célébration nationale héritée de la Hongrie communiste. Le 11 avril, est l'anniversaire d'Attila József. Un poète qui fut un peu le Rimbaud hongrois. Né en 1905 dans un milieu très défavorisé, cet enfant précoce a été l’adolescent prodige des milieux littéraires hongrois dès 1922. Il est mort en 1937 à 32 ans écrasé par un train, dans des circonstances qui font penser à un suicide.
Il a été communiste, dès 1919, d’où ce choix de la date à l’époque de Kádár, mais il avait été exclu du parti pour idéalisme, d’où le maintien de cette figure dans le panthéon de la Hongrie post-communiste. Sa statue, réalisée par Marton László, regarde le Danube du pied du Parlement hongrois. L’emplacement, choisi en 2009, est inspiré d’un de ses poèmes fameux, Au bord du Danube.
La poésie joue toujours un rôle particulier dans l’espace culturel hongrois. On ne lit plus des poèmes dans les usines comme à l’époque communiste, chaque 11 avril, mais on organise des soirées de performances littéraires comme le fameux marathon de poésie (Költészeti maraton) organisé depuis 2010, où une centaine d’auteurs (147 en 2022) se relaient pendant 24 heures pour lire des textes en public.
La figure d’Attila Jozsef n’est pas oubliée. Chaque 11 avril, sur la tombe du poète, au cimetière de la rue Fiumei, à Budapest, l'Institut national du patrimoine (NÖRI), organise un événement.
Les expositions de la Bibliothèque centrale présentent des citations d'Attila József et de Péter Esterházy à intervalles réguliers le 11 avril, commémorant le 120e anniversaire de la naissance d’Attila József et le 75e anniversaire de la naissance d'Esterházy. Ce 11 avril, également, à l'occasion du 125e anniversaire de la naissance de Sándor Márai, des comédiens lisent des extraits du journal Lola d'Ilona Márai dans le cadre du Marathon Márai au Salon Víg. Un train de poésie part de la gare de Nyugati le 11 avril à 10h08. Les passagers pourront non seulement lire, mais aussi écouter des poèmes en direct, interprétés par des artistes du théâtre Hevesi Sándor de Zalaegerszeg. Dans tout le pays, des poèmes seront diffusés sur des haut-parleurs ce vendredi pour marquer la Journée de la poésie hongroise.
À l’échelle mondiale, il existe une Journée internationale de la poésie, le 21 mars.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 10 avril 2025
Timbre émis à l’occasion du centenaire du poète. Son nom est écrit à la hongroise, le prénom après le nom.
Statue du poète installée à Budapest en 2009 : “le poète triste” par Marton László. Derrière, sur la droite de l’image, c’est le Parlement hongrois.
22 janvier : la Journée de la culture hongroise
La Journée de la culture hongroise est célébrée depuis 1989, en souvenir du jour où le poète Ferenc Kölcsey a achevé le manuscrit de l'hymne national. C’était à Szatmárcsek le 22 janvier 1823.
La Journée de la culture hongroise (Magyar Kultúra Napja) est célébrée depuis 1989, en souvenir du jour où le poète Ferenc Kölcsey a achevé le manuscrit de l'hymne national. C’était à Szatmárcsek le 22 janvier 1823. En décembre 2022, le 22-Janvier est devenu une journée de commémoration officielle, pour une première célébration le 22 février 2023 afin de marquer le 200e anniversaire de l’hymne national hongrois.
C’est en effet le 22 janvier 1823 que le poète Ferenc Kölcsey a achevé son grand poème Himnusz (« Hymne ») ou Isten, áldd meg a magyart (« Bénis le Hongrois, ô Seigneur »), tiré des Siècles tonitruants du peuple hongrois, qui est devenu en 1989 l'hymne national de la Hongrie sur une musique de Ferenc Erkel datée de 1844.
Concerts, soirées littéraires, projections de films et expositions. Cette année, de nombreux programmes passionnants ont été préparés dans tout le pays pour la Journée de la culture hongroise. Plusieurs prix sont décernés ce 22 janvier : le prix littéraire Sándor Márai, le prix Csemadok pour la culture publique et l'œuvre de toute une vie, ainsi que les prix István Gyurcsó et Zoltán Fábry.
Bien que signalée dans tous les médias, la Journée de la culture hongroise demeure toutefois assez confidentielle.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 22 janvier 2025
17 janvier : il y a 80 ans Raoul Wallenberg disparaissait au Goulag
Cette Journée Raoul Wallenberg a été instituée par le gouvernement du Canada pour rendre hommage, chaque 17 janvier, au diplomate suédois qui a sauvé la vie de dizaines de milliers de Juifs hongrois. De son côté, le Conseil de l’Europe a créé un prix décerné autour du 17 janvier pour perpétuer sa mémoire.
Une Journée Raoul Wallenberg a été instituée par le gouvernement du Canada pour rendre hommage, chaque 17 janvier, au diplomate suédois qui a sauvé la vie de dizaines de milliers de Juifs hongrois. De son côté, le Conseil de l’Europe a créé un prix décerné autour du 17 janvier pour perpétuer sa mémoire.
Avant son arrivée à la légation suédoise de Budapest à la mi-juillet 1944, quelque 430 000 Hongrois juifs avaient été déjà déportés vers Auschwitz. Sans aucune aide de la communauté internationale, Raoul Wallenberg parviendra à en sauver environ 100 000 juifs en six mois par des astuces et des coups de bluff, profitant de son statut de diplomate d’un pays neutre. Il a fourni des « passeports de protection » (Schutzpasses) à plus de 4 000 personnes juives. Il a aménagé des hôpitaux et des garderies, il mettra en place des soupes populaires et plus de 30 maisons protégées par l’ambassade suédoise où les juifs hongrois pouvaient se cacher. Quand des milliers de personnes juives seront contraintes à entreprendre la marche de la mort en novembre 1944, R. Wallenberg interviendra personnellement et à plusieurs occasions afin de sauver autant de personnes qu’il le pourra. Alors que les nazis avançaient vers Budapest et menaçaient de faire exploser le ghetto de la ville et de liquider les Juifs restants, il avertit les généraux nazis qu'ils seraient tenus responsables et traduits en justice, voire exécutés, pour leurs crimes de guerre et leurs crimes contre l'humanité.
Quand les Soviétiques ont libéré Budapest, Raoul Wallemberg a été arrêté et envoyé au Goulag, on ignore la date de son décès. Mais on connaît la date de son arrestation par les Russes : le 17 janvier 1945, qui est aussi celle de la disparition du diplomate suédois. Ni l’URSS ni plus tard la Russie n’ont accepté de donner la moindre information sur le sort de ce héros de la Seconde Guerre mondiale.
En 1985, Raoul Wallenberg s'est vu accorder le titre de citoyen d'honneur du Canada. En 2000, une loi a été votée prévoyant que dans l'ensemble du Canada, le 17 janvier de chaque année est désigné comme la « Journée Raoul Wallenberg ». Chaque 17 janvier les autorités canadiennes invitent toute la population à réfléchir sur la bravoure, la bienveillance et la compassion dont a fait preuve Raoul Wallenberg ainsi qu’à réitérer l’engagement des Canadiens à bâtir un pays encore plus fort et plus inclusif.
À l'initiative du Gouvernement suédois et du Parlement hongrois, le Conseil de l'Europe a créé le Prix Raoul Wallenberg, afin de perpétuer la mémoire des accomplissements hors du commun de ce diplomate suédois. Il est décerné depuis 2014, autour du 17 janvier, et récompense tous les deux ans les accomplissements humanitaires exceptionnels d'une personne, d'un groupe de personnes ou d'une organisation. En 2024, il a été décerné à Neva Tölle, une militante croate œuvrant pour la protection des femmes contre la violence domestique. Antérieurement, le prix Raoul Wallenberg avait récompensé les réalisations d’Elmas Arus (2014), une jeune réalisatrice rom de Turquie ; l’association grecque Agalià (2016), œuvrant sur l’île de Lesbos ; le Centre européen pour les droits des Roms basé à Budapest (2018) ; une pédiatre syrienne, Amani Ballour (2020) ; et Vincent Raj Arokiasamy (2022), un défenseur de la population défavorisée des « intouchables » en Inde.
Raoul Wallenberg a aussi été fait citoyen honoraire des États-Unis (qui lui dédie une journée, le 5 octobre), de l’Australie, de la Hongrie et bien sûr d’Israël. En revanche, la Suède qui n’a jamais été très à l’aise avec la Shoah, a longtemps été très discrète sur le sort subi par son diplomate. Elle a attendu 2001 pour reconnaître ses manquements, le gouvernement suédois avait alors présenté des excuses publiques à la famille de Wallenberg. En 2012, l’année où il aurait dû célébrer son 100e anniversaire, la Suède a organisé une année de commémoration en sa mémoire. Désormais, elle se souvient de son héros chaque 27 août, journée nationale de l'égalité des droits et du courage civique.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 16 janvier 2025
timbre poste canadien de 1,85 dollar émis en janvier 2013
23 octobre : la Hongrie commémore 1956 tout en soutenant la Russie
Le 23 octobre est un double anniversaire en Hongrie où on commémore la révolution de 1956, écrasée par Moscou, et celle de 1989 qui a mis fin au régime communiste. Cette fête nationale est aussi, pour une partie des Hongrois, l’occasion de manifester contre le régime autoritaire mis en place en 2012 par Viktor Orbán.
Voilà une journée bien embarrassante pour le gouvernement hongrois de Viktor Orbán qui soutient l’agression russe de l’Ukraine alors que la Hongrie commémore, chaque année, l’insurrection du 23 octobre 1956 contre l’oppression communiste. Cette révolution démocratique déclenchée par un désir de liberté sera écrasée dans le sang par une intervention de l’armée soviétique, au prix de 200 000 morts. Viktor Orbán a toujours été très ambiguë sur le sujet. En 2022 et 2023, lors des célébrations du 23-Octobre, il a choisi faire profil bas, préférant s’exprimer depuis une ville de province alors que l’opposition manifeste, comme chaque année, dans la capitale contre sa dictature. En 2024, il fera un discours à Budapest à 10h30, prudemment , dans un parc fermé, le parc Millenáris, et non sur un espace ouvert comme la place Kossuth ou la place Hősök, comme jadis. Il cède la rue à la rue à Péter Magyar qui rassemble ses partisans sur la place Bem József.
Le 23 octobre est un double anniversaire. La Hongrie commémore les événements de 1956 en même temps que la journée de 1989 qui a mis fin au régime communiste. Un tiers de siècle plus tard, le 23 octobre 1989, ce régime prenait fin, laissant la place à une république de Hongrie qui a fonctionné démocratiquement jusqu’au 1er janvier 2012, date de l’entrée en vigueur d’une nouvelle constitution, inspirée des idées de l’extrême droite hongroise.
Cette journée du 23 octobre, dite Fête de la Révolution (Forradalom ünnepe), est devenue une fête nationale en 1990, marquée par des célébrations officielles de cette double célébration, est aussi l’occasion pour l’opposition de protester contre un État hongrois aux tendances de plus en plus autoritaires.
Victor Orbán n’était pas né en 1956, mais l’évènement lui doit beaucoup politiquement. En effet, il s’était fait connaître en 1989 lors des obsèques d’Imre Nagy, exécuté en 1958 pour avoir été le leader de l’insurrection de 1956 : le jeune Orbán, alors inconnu, avait pris la parole devant la foule pour réclamer le départ de Hongrie des forces soviétiques qui y stationnaient depuis 1956. Il fut ovationné par les 200 000 personnes qui assistaient à l’hommage à Nagy. En 2018, ce même Orbán fera enlever nuitamment, la statue d’Irme Nagy qui faisait face au Parlement pour la reléguer dans un obscur jardin de Budapest. Érigée en 1996, pour le 40e anniversaire de 56, c’était une des plus photographiée de Budapest. La trahison des idéaux de liberté de 1956, par le régime d’Orbán et sa réécriture de l’histoire était déjà pleinement en marche. Dans ses discours du 23-Octobre, Orban concentre ses attaques sur Bruxelles. L’UE (dont les fonds européens ont rempli les poches de sa famille) comparée à l’URSS est un leitmotiv de ses discours.
En septembre 2024, son directeur politique, Balázs Orbán (un homonyme) a été plus clair encore, affirmant qu’ « à partir de 1956, nous n'aurions probablement pas fait ce que le président Zelensky a fait il y a deux ans et demi, car c'est irresponsable.» Le tollé a été presque unanime, y compris au Fidesz, le parti au pouvoir. Car dans l’opinion, le souvenir de 1956 rime toujours avec un désir de liberté étouffée par les Russes.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 23 octobre 2024
19 juin : fête paradoxale en Hongrie où l’on célèbre l’indépendance du pays à l’égard de Moscou
C’est une commémoration est très paradoxale : la Hongrie célèbre la restauration de sa souveraineté suite au départ, le 19 juin 1991, des forces militaires imposées par URSS alors que la Hongrie, bien que membre de l’Union européenne, se comporte à nouveau comme un satellite de Moscou.
Le Jour de la Hongrie indépendante (Független Magyarország napja) est un jour de commémoration officiel, observé le 19 juin. Il commémore la fin de l'occupation soviétique de la Hongrie et honore les martyrs de la Révolution hongroise de 1956. La date choisie pour cette commémoration est l’anniversaire du départ du dernier soldat soviétique, le 19 juin 1991, rétablissant l’indépendance du pays après un demi-siècle d’occupation russe.
Cette commémoration nationale a été adoptée en 2001, elle y associe la mémoire des dirigeants de cette révolution manquée exécutés secrètement pour trahison, le 16 juin 1958. Ceux-ci ont été jetés dans une fosse commune sous de fausses identités. Les autorités ont attendu trois décennies que l’emprise de Moscou se desserre, pour autoriser la résurgence de cette mémoire. Le 16 juin 1989, environ un quart de million de personnes ont participé à la réinhumation solennelle d'Imre Nagy, Géza Gimes Miklós Losonczy, Pál Maléter, József Szilágyi et le combattant de la liberté inconnu de la révolution. Le pays tout entier a regardé la cérémonie de plusieurs heures sur les écrans de télévision. La cérémonie de deuil organisée par la Commission de justice historique, mais avec le soutien de toute l'opposition, est devenue un symbole de l'effondrement du régime Kádár - et de tout le bloc soviétique. Deux ans plus tard, presque jour pour jour, le lieutenant-général Viktor Silov, dernier soldat soviétique occupant la Hongrie, quittait le pays.
Cette commémoration est très paradoxale : la Hongrie célèbre la restauration de sa souveraineté suite au départ des forces militaires imposées par Moscou alors que la Hongrie est aujourd’hui le principal soutien de Moscou au sein de l’Union européenne.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 18 juin 2024
La tombe d’Imre Nagy après la réinhumation du 16 juin 1989 au nouveau cimetière municipal de Budapest.
Le départ de Viktor Silov sous l’œil des journalistes
25 février : la Hongrie se souvient des victimes du communisme
La Hongrie commémore la mise en place de la dictature communiste mais sans pour autant réfléchir à l’évolution actuelle du régime hongrois, dominé par le Fisdez, la formation hégémonique et autoritaire de Viktor Orban, au détriment de la démocratie.
Il ne s’agit pas d’un jour férié, mais d’une simple journée commémorative faisant l’objet d’une cérémonie au Parlement, de publications dans la presse et d’interventions dans les lycées.
C’est en 2000, sous le premier gouvernement de Viktor Orban que ce Jour du souvenir des victimes des dictatures communistes (A kommunista diktatúrák áldozatainak emléknapja) a été institué en souvenir de l’arrestation d’un dirigeant politique d’opposition par les autorités communistes hongroises, premier pas vers l'instauration d'une dictature totale à parti unique en Hongrie. Ce fut une étape de la « tactique du salami » inventée par l'homme politique hongrois Mátyás Rákosi, chef du Parti communiste, pour décrire l'élimination progressive des pouvoirs extérieurs au communisme (Église, autres partis, etc.), « tranche après tranche, jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien ».
Le 25 février 1947, Béla Kovács, secrétaire général du Parti indépendant des petits propriétaires, fut arrêté par les autorités soviétiques pour son opposition aux communistes et emmené en Union soviétique, où il passa huit ans en captivité, d'abord au Goulag, puis, à partir du 25 septembre 1951, à la prison centrale du ministère de la Sûreté de l'État à Moscou. L'arrestation et la détention de l'homme politique ont été la première étape sur la voie par laquelle le Parti communiste a éliminé les dissidents et a progressé vers l'instauration d'une dictature totale à parti unique. L'affaire est ainsi devenue un symbole du mépris de la démocratie et des libertés qui a caractérisé le 50e anniversaire du règne du communisme. Béla Kovács est devenu un exemple typique des victimes du régime parti-État. En 1947, le Parti communiste n’atteignait que 22% des voix. En 1949, la liste unique conduite par le PC obtenait plus de 95% des suffrages. Entre-temps, la démocratie avait disparu.
Il est regrettable que cette commémoration de la mise en place d’une dictature n’entraîne pas de réflexion sur la confiscation de la démocratie opérée par le Fisdez, la formation hégémonique et autoritaire de Viktor Orban.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 24 février 2024
1er février : en Hongrie, c’est le Jour du souvenir de la République
C’est anniversaire de la loi de 1946 qui abolissait la monarchie pour la remplacer par une république. La journée du 1er février 1946 symbolisait une véritable aspiration démocratique qui sera très vite déçue comme ont été déçues les espoirs de 1848, de 1918, de 1989… à chaque fois un régime autocratique reprend le dessus. Le dernier en date a été insaturé par Viktor Orban.
La Hongrie dont le dirigeant, Viktor Orban, a constitué un empire médiatique hégémonique totalement à ses ordres, est-elle encore une république ? Dans un pays où l’opposition n’a aucun moyen d’atteindre l’ensemble de la population, aucune fenêtre pour s’exprimer, les élections sont totalement inéquitables. C’est dans ce pays autocratique que l’on célèbre chaque 1er février, le Jour du souvenir de la République (A köztársaság emléknapja). Cette journée commémorative (non fériée) a été instaurée en 2006, lors du 60e anniversaire de l’article I de la loi de 1946 sur la forme de l’État hongrois. Cet article abolissait la monarchie, qui jusque-là n’avait fonctionné que sous forme de régence, pour la remplacer par une république.
La journée du 1er février 1946 symbolisait une véritable aspiration démocratique qui sera très vite déçue car la Hongrie est devenue en 1949 une République populaire dominée par un Pari communiste qui a vite supprimé toute démocratie. L’esprit républicain et démocratique a resurgi en 1989 avec la chute du Rideau de fer et la fin de l’emprise de Moscou sur le pays. Mais cette fois encore, cette démocratie va glisser vers un autoritarisme conservateur dont Viktor Orban est l’instaurateur, lequel a réinstauré un tropisme russe. La république en Hongrie est-elle vouée à déboucher sur l’autoritarisme ? Celle de 1946 n’était que la deuxième. Une première république avait été instaurée en 1918, sous forme de soviets. Mais elle fut renversée dans la violence avant qu’on ait pu la voir fonctionner, pour être remplacée par le régime autoritaire d’extrême droite du maréchal Horthy, lequel s’était imposé comme le régent d’une monarchie sans monarque. Triste destinée pour un pays dont l’esprit républicain remonte au moins à la révolution du 15 mars 1848. Une révolution avortée.
Le choix des armoiries de la Hongrie est très symbolique : Kossuth, le révolutionnaire de 1848 avait remplacé la couronne par une couronne de laurier. Les « armoiries de Kossuth » ont été utilisées par l’éphémère république de 1918-1919, puis par ceux qui ont tenté, en vain, de renverser le régime communiste en 1956. En 1990, le parti libéral proposa de reprendre ce symbole mais la majorité du Parlement opta pour un blason à nouveau surmonté de la fameuse couronne de Saint-Étienne. Peut-on être une authentique république quand on est à ce point attaché à la symbolique royale ? Doit-on s’étonner que la Hongrie soit à nouveau une autocratie ?
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 31 janvier 2024
Timbre de 1946 célébrant l’instauration de la république
Une pièce de 1947, avec le blason de la IIe République (celui de Kossuth) et une pièce de 1995 avec le blason surmonté de la couronne de saint Étienne.
16 avril : la Hongrie commémore la Shoah
Chaque année, le 16 avril, depuis 2001, la Hongrie commémore l’extermination de sa communauté juive. La date fait référence au 16 avril 1944 quand les juifs de Rhuténie (ou Subcarpathie) ont été raflés et enfermés dans des ghettos puis déportés dans les camps d'extermination.
Chaque année, le 16 avril, depuis 2001, la Hongrie commémore l’extermination de sa communauté juive. La date fait référence au 16 avril 1944 quand les juifs de Rhuténie (ou Subcarpathie) ont été raflés et enfermés dans des ghettos puis déportés dans les camps d'extermination.
Dans les années 1930, les dirigeants hongrois ont choisi de s'aligner sur les gouvernements fascistes d'Italie et d'Allemagne. Ainsi, à partir de 1938, le régent hongrois Miklós Horthy a adopté une série de mesures anti-juives inspirés des lois allemandes de Nuremberg. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les Hongrois juifs ont été utilisés comme travailleurs forcés pour nettoyer les champs de mines, construire des aéroports et réparer les chemins de fer bombardés. Horthy, cependant, a refusé la déportation des Hongrois juifs vers les camps d'extermination. La situation a changé à partir du 19 mars 1944, lorsque les troupes allemandes ont occupé la Hongrie en réponse aux contacts de Horthy avec les Alliés dans l'espoir de négocier une reddition.
Dès les premiers jours de l’occupation allemande, 437 000 juifs hongrois ont été enfermés dans quelque 70 ghettos. Le ministère de l'Intérieur du gouvernement hongrois contrôlé par les nazis a ensuite ordonné leur déportation vers des camps d'extermination. Le 16 avril 1944, la déportation des juifs de Ruthénie a commencé (aujourd'hui en Ukraine, la Ruthénie a été occupée par la Hongrie de 1939 à 1944). Ce n’est que quand des informations sur les horreurs d’Auschwitz sont arrivées que Horthy a arrêté les expulsions, début juillet 1944. Après la chute d’Horthy, en octobre, quelque 50 000 juifs de Budapest ont encore été déportés en novembre et décembre 1944. Le ghetto de la capitale ne sera libéré qu’en janvier 1945. On estime que 70 % des juifs hongrois n'ont pas survécu à la Shoah.
La Journée du souvenir de l'Holocauste (A holokauszt áldozatainak emléknapja ) a été instituée par le gouvernement hongrois en 2000 et a été célébrée pour la première fois le 16 avril 2001. Les commémorations se déroulent principalement dans les lycées.
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 15 avril 2023
Chaussures au bord du Danube (Cipők un Dunaparton) est un mémorial installé par le sculpteur Gyula Pauer et le réalisateur Can Togay, 60 paires de chaussures et souliers, en fonte, placé à l’endroit où des juifs hongrois ont été abattus et jetés dans le Danube par les membres du Parti des Croix fléchées (fasciste) en 1944.
15 mars : la fête nationale hongroise sur fond de guerre aux frontières
La fête nationale hongroise qui commémore le réveil démocratique du pays en 1848, est traditionnellement un rendez-vous politique important, d’autant plus cette année pour le 175e anniversaire de la révolution.
Budapest est pavoisée aux couleurs nationales, beaucoup de citoyens pour l’occasion portent la cocarde tricolore. La fête nationale hongroise (Nemzeti ünnep) débute à 9 heures par la levée du drapeau sur Kossuth Lajos tér. De là, un défilé militaire se rend au Musée national où la révolution a débuté il y a 175 ans. Profitant du réveil des peuples en cette année 1848, des démocrates hongrois s’étaient rendus au château de Buda porteur de 12 revendications à présenter au pouvoir des Habsbourg. Notamment l’exigence de la liberté de presse et l’abolition de la censure. Une commémoration bien paradoxale dans la Hongrie de Viktor Orbán qui depuis 2010 multiplie les mesures liberticides, notamment contre la presse d’opposition. Le 15-Mars est également connu sous le nom de Fête de la Révolution de 1848 (1848-as forradalom ünnepe).
Ainsi, ce jour de fête populaire est aussi traditionnellement l’occasion d’une grande manifestation de l’opposition pour dénoncer un régime inspiré par l’extrême droite. Des manifestants de gauche viennent de toute l’Europe pour dénoncer les dérives du régime hongrois.
Tandis que l’ultra droite, le Mouvement Notre Patrie, se rassemble à côté du Musée national hongrois. Il est chaque année épaulé par des militants de l’extrême droite venus de toute l’Europe, en particulier des Polonais et des Italiens... Le 15-Mars à Budapest est devenu, comme le 23-Octobre, l’un des grands rendez-vous politiques européens. Cette année, avec la proximité des élections législatives, dont la guerre en Ukraine est venue modifier la donne, la journée prend une dimension particulière.
Quant au parti au pouvoir, le Fidesz (extrême droite populiste), il profite des cérémonies officielles sur la place Kossuth Lajos devant le Parlement à 15 heures, où le Premier ministre Viktor Orbán prononce un discours. La Marche pour la Paix (organisée par le parti au pouvoir) se joint à la cérémonie. Le mardi 15 mars, conformément à la tradition, on peut venir voir gratuitement la couronne de Saint Étienne au Parlement. Le jour est férié et chômé, beaucoup de musées et de bâtiment officiel ouvrent leurs portes au public ce jour-là. C'est à l'occasion de cette fête que sont distribués les Prix Kossuth (culture et des arts) et Széchenyi (culture hongroise).
Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 14 mars 2023
Mise à jour 2025 : dopé par l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, le Premier ministre hongrois Viktor Orban, annonce ce samedi 15 mars son projet d’éliminer rivaux politiques, juges, médias et ONG, des « punaises » abreuvées selon lui de fonds étrangers « corrompus ». « Après notre grand rassemblement, viendra le grand nettoyage de Pâques car les punaises ont survécu à l’hiver », a-t-il lancé devant une foule de plusieurs milliers de partisans réunis devant le musée national à Budapest à l’occasion de la fête nationale.
Plus de 50 000 personnes ont bravé le froid et la pluie samedi à Budapest contre la politique répressive de Viktor Orban à l'encontre de la presse et des ONG, tandis que Peter Magyar, le chef du parti d'opposition Tisza, en plein essor, leur a promis de mettre fin aux 15 ans de règne du chef du gouvernement.