1er février : en Hongrie, c’est le Jour du souvenir de la République

 

La Hongrie dont le dirigeant, Viktor Orban, a constitué un empire médiatique hégémonique totalement à ses ordres, est-elle encore une république ? Dans un pays où l’opposition n’a aucun moyen d’atteindre l’ensemble de la population, aucune fenêtre pour s’exprimer, les élections sont totalement inéquitables. C’est dans ce pays autocratique que l’on célèbre chaque 1er février, le Jour du souvenir de la République (A köztársaság emléknapja). Cette journée commémorative (non fériée) a été instaurée en 2006, lors du 60e anniversaire de l’article I de la loi de 1946 sur la forme de l’État hongrois. Cet article abolissait la monarchie, qui jusque-là n’avait fonctionné que sous forme de régence, pour la remplacer par une république.

La journée du 1er février 1946 symbolisait une véritable aspiration démocratique qui sera très vite déçue car la Hongrie est devenue en 1949 une République populaire dominée par un Pari communiste qui a vite supprimé toute démocratie. L’esprit républicain et démocratique a resurgi en 1989 avec la chute du Rideau de fer et la fin de l’emprise de Moscou sur le pays. Mais cette fois encore, cette démocratie va glisser vers un autoritarisme conservateur dont Viktor Orban est l’instaurateur, lequel a réinstauré un tropisme russe. La république en Hongrie est-elle vouée à déboucher sur l’autoritarisme ? Celle de 1946 n’était que la deuxième. Une première république avait été instaurée en 1918, sous forme de soviets. Mais elle fut renversée dans la violence avant qu’on ait pu la voir fonctionner, pour être remplacée par le régime autoritaire d’extrême droite du maréchal Horthy, lequel s’était imposé comme le régent d’une monarchie sans monarque. Triste destinée pour un pays dont l’esprit républicain remonte au moins à la révolution du 15 mars 1848. Une révolution avortée.

Le choix des armoiries de la Hongrie est très symbolique : Kossuth, le révolutionnaire de 1848 avait remplacé la couronne par une couronne de laurier. Les « armoiries de Kossuth » ont été utilisées par l’éphémère république de 1918-1919, puis par ceux qui ont tenté, en vain, de renverser le régime communiste en 1956. En 1990, le parti libéral proposa de reprendre ce symbole mais la majorité du Parlement opta pour un blason à nouveau surmonté de la fameuse couronne de Saint-Étienne. Peut-on être une authentique république quand on est à ce point attaché à la symbolique royale ? Doit-on s’étonner que la Hongrie soit à nouveau une autocratie ?

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 31 janvier 2024

Timbre de 1946 célébrant l’instauration de la république

Une pièce de 1947, avec le blason de la IIe République (celui de Kossuth) et une pièce de 1995 avec le blason surmonté de la couronne de saint Étienne.

 
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