L’Almanach international

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1957, Tunisie, république, 25 juillet Bruno Teissier 1957, Tunisie, république, 25 juillet Bruno Teissier

25 juillet : la Tunisie célèbre son régime républicain et enterre sa démocratie

En Tunisie, c’est le Jour de la République. Le pays qui commémore l’abolition de la monarchie en 1957, mais aussi la l’anniversaire prise totale du pouvoir par le président Kaïs Saïed, lequel avait profité du 25 juillet, en 2021, pour suspendre la démocratie. Sans les libertés publiques, peut-on encore parler de république ?

 

Le 25 juillet est férié en Tunisie pour commémorer l’instauration de la république et l’abdication du roi de Tunisie en 1957. C’est le Jour de la République (يد الجمهورية). Cette date est aussi l’anniversaire du coup de force du président Kaïs Saïed en 2021 dont la prise totale du pouvoir est symboliquement confirmée par référendum du 25 juillet 2022.

Un royaume de Tunisie avait existé du 20 mars 1956 au 25 juillet 1957.  Lamine Bey, le dernier monarque était l’ultime héritier d’une longue lignée de bey de la dynastie des Husseinites fondée en 1705. Ainsi s’interrompait une monarchie vieille de plus de deux siècles et demi. Suite à sa destitution, les biens du roi ont été confisqués et ont servi à régler la dette de l'État tunisien. Ce dernier bey avait pris le titre de roi, comme au Maroc où le dernier sultan était, à la même époque, devenu le premier roi du Maroc. En Tunisie, le souverain s’était montré trop conciliant avec le colonisateur français, ce qui l’avait rendu très impopulaire, à l’inverse de Mohamed V du Maroc qui avait tenu tête à Paris et avait été perçu comme le héros de l’indépendance. En Tunisie, ce rôle a été joué par Habib Bourguiba qui a pesé en faveur de la république. Le 25 juillet est aussi l’anniversaire du début de son premier mandat, en 1957.

La monarchie a été abolie, c’est le régime républicain qui s’est imposé mais celui-ci n’a guère fonctionné de manière démocratique. Habib Bourguiba s’est incrusté pendant 30 ans au pouvoir. Réélu à chaque fois par des scrutins non démocratiques, il a été finalement nommé « président à vie », en 1975. Son successeur, Zine el-Abidine Ben Ali a régné d’une main de fer pendant 23 ans. Ce dernier a été renversé en 2011 pour laisser place à une transition démocratique qui a vu se succéder plusieurs présidents : Fouad Mbazâa, Moncef Marzouki, Béji Caïd Essebsi et Kaïs Saïed.

Le 25 juillet est aussi l’anniversaire de l’assassinat de Mohamed Brahmi, député de l'Assemblée nationale constituante (ANC) et fondateur du Mouvement populaire. Celui-ci a été tué le 25 juillet 2013 devant son domicile.

C’est le 25 juillet 2021 que le président Kaïs Saïed a décidé de geler les travaux du Parlement et de s'octroyer le pouvoir exécutif dans sa totalité, confisquant en même temps le pouvoir du gouvernement.

Le 25 juillet 2022, le président Kaïs Saïed fait approuver par référendum un nouveau régime destiné à instaurer son pouvoir personnel. La Tunisie va-t-elle retourner un régime du type de celui de Ben Ali, la coloration islamique en plus ? Une majorité écrasante (92%) a voté en faveur du projet du président Kaïs Saïed, mais avec seulement… 27,5% de participation. Ce qui représente à peine un quart du corps électoral. Le moins que l’on puisse dire c’est que l’adhésion du peuple tunisien n’est pas au rendez-vous. Le Jour de la République 2021 est désormais celui de la mort de la démocratie en Tunisie. Celle-ci était en gestation depuis 2014. Elle semble bien s’avérer mort-née.

La nouvelle constitution prévoit que « le chef de l’État, qui n’est responsable devant personne, nomme et révoque le chef de gouvernement et les ministres. Il peut soumettre au référendum tout texte législatif ou constitutionnel – sans l’intermédiaire du Parlement – et imposer une deuxième lecture à un projet de loi. Il peut également dissoudre l’Assemblée qui, par ailleurs, voit ses prérogatives réduites. Non seulement, elle n’investit plus le gouvernement mais elle ne peut le censurer que dans des conditions très restrictives. En plus d’une hyperprésidentialisation du régime, où les possibilités de destituer le président sont verrouillées, ce qui fait inévitablement penser aux régimes dictatoriaux qu’a connus la Tunisie avant sa révolution, la nouvelle Constitution élimine les articles mentionnant la neutralité et l’impartialité des forces de sécurité intérieure et de l’armée. (…) L’article 5 du texte efface ainsi la mention du caractère "civil” de l’État – que le camp moderniste avait imposée de haute lutte à la Constitution de 2014 – tout en précisant que la Tunisie fait partie de la "oumma [communauté des croyants] islamique” et que “seul l’État devra veiller à garantir les objectifs de l’islam”.» (Frédéric Bobin et Lilia Blaise, Le Monde, 23 juillet 2022.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 24 juillet 2023

 
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1957, Togo, massacre, lutte pour l'indépendance, 21 juin Bruno Teissier 1957, Togo, massacre, lutte pour l'indépendance, 21 juin Bruno Teissier

21 juin : les Togolais célèbrent les martyrs de la lutte pour l’indépendance

Ce jour férié au Togo fait référence au massacre de Pya-Hodo, le 21 juin 1957. L’armée coloniale tirait dans la foule des manifestants, faisant 20 morts. C’était il y a 65 ans.

 

Ce jour férié au Togo fait référence à un massacre qui a eu lieu il y a 65 ans, le 21 juin 1957. Ce jour-là, une délégation de l’ONU visitait le pays, à Pya-Hodo (dans la Kozah), la population en a profité pour manifester contre la tutelle française qui s’imposait au pays. Devant la colère des manifestants, protestant contre l’arrestation du nationaliste togolais, Bouyo Moukpé, l’armée coloniale a tiré sur la foule qui fréquentait le marché d’Hoda, faisant 20 morts et de nombreux blessés. Les indépendantiste s’opposaient à l’application de la loi-cadre du 23 juin 1956 dite “loi Gaston Deferre”. Le Togo n’était pas une colonie mais un territoire confié par l’ONU à la France. Après ce drame, celle-ci sera contrainte d'organiser des élections sous surveillance d’émissaires onusiens. L’indépendance ne sera toutefois obtenue que le 27 avril 1960.

La commémoration a lieu chaque année, le 21 juin, mais ce Jour des martyrs, férié et chômé ne date que de 2021. Il commémore tous les morts de la lutte pour l’indépendance, pas seulement les victimes du massacre de Pya-Hodo. Dans cette localité du pays kabiyè une stèle de marbre blanc a été érigée. Il y est inscrit « Ils sont morts pour que vive le Togo ». À Lomé, le chef du gouvernement dépose une gerbe à la place des martyrs. 

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 20 juin 2022

 

Komi Sélom Klassou devant la stèle de Pya-Hodo, 21 juin 2018

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1957, Ghana, indépendance, héros national Bruno Teissier 1957, Ghana, indépendance, héros national Bruno Teissier

6 mars : la fête nationale du Ghana

Il y a 65 ans ans Kwamé N’krumah déclarait l’indépendance de la Côte d’or, aussitôt rebaptisée Ghana. On était le 6 mars 1957, c’était la première colonie d’Afrique noire à ainsi s’émanciper totalement de son tuteur européen.

 

Il y a 65 ans Kwamé N’krumah déclarait l’indépendance de la Côte d’or britannique (British Gold Coast), aussitôt rebaptisée Ghana. On était le 6 mars 1957, c’était la première colonie d’Afrique noire à ainsi s’émanciper totalement de son tuteur européen. La date est devenue la fête nationale du Ghana.

Si le discours de N’krumah fit date c’est qu’il envisageait aussi l’indépendance de l’ensemble du continent. Père du panafricanisme, il sera l’un des fondateurs de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) en 1963. Il inspirera beaucoup de leaders indépendantistes, en particulier son ami Sékou Touré de Guinée qui suivra son exemple dès l’année suivante (voir 2 octobre). Mais N’krumah avait fait émerger une république africaine, pas une démocratie. L’État qu’il dirigeait avait, dès 1959, adopté un régime autoritaire où l’on emprisonnait les opposants. Précurseur des indépendances, le Ghana le fut aussi des dictatures africaines. Il sera malheureusement imité par la très grande majorité des États qui accéderont les uns après les autres à l’indépendance.

Cela dit, il ne faut jamais désespérer, le Ghana offre aujourd’hui, un des meilleurs profils africains tant sur le plan politique (des élections démocratiques) qu’économique (une bonne croissance).

Le 65e défilé de l’Independance Day se tiendra, pour la première fois, à Cape Coast. Le thème du Jour de l'Indépendance 2022 est « Travailler ensemble ; Mieux rebondir ».

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 5 mars 2022

 
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1957, Cuba, héros national, 30 juillet Bruno Teissier 1957, Cuba, héros national, 30 juillet Bruno Teissier

30 juillet : la mémoire d'un révolutionnaire cubain

À cuba, le 30 juillet est le Jour des martyrs de la révolution. Il rend hommage à ceux qui ont été victimes du régime dictatorial de Fulgencio Batista. La date choisie est l’anniversaire de la mort de Frank País, tué par la police de ce dictateur, en 1957.

 

À l’heure où les manifestations se multiplient contre le régime castriste, les autorités commémorent la lutte contre l’ancien dictateur Batista. À cuba, le 30 juillet est le Jour des martyrs de la révolution (Día de los Mártires de la Revolución Cubana). Il rend hommage à ceux qui ont été victimes du régime autoritaire et corrompu de Fulgencio Batista. La date choisie est l’anniversaire de la mort de Frank País, tué par la police de ce dictateur, en 1957.

Avec Fidel et Raúl Castro, Frank País était l'un des principaux organisateurs du mouvement du 26 juillet. Il était responsable de la coordination de la résistance clandestine en milieu urbain, alors que les guérilleros de Fidel Castro affrontaient les forces de Batista dans les montagnes de la Sierra Maestra. Franck País organisait des manifestations dans les principales villes et villages du pays., en particulier à Santiago de Cuba, sa ville natale.

Le 30 novembre 1956, País dirige le soulèvement à Santiago de Cuba. En mars 1957, il est arrêté par la police. País a été acquitté deux mois plus tard. Il a dû néanmoins se cacher à Santiago de Cuba pour échapper à la surveillance de la police. Le 30 juillet 1957, la police a encerclé le bâtiment où il se cachait et lui a tiré dessus alors qu'il tentait de s'échapper. Sa mort a déclenché une grève générale qui est devenue l'un des événements clés de la Révolution cubaine. Après la prise de pouvoir par les frères Castro, l’anniversaire de sa mort a été célébré chaque année, en y ajoutants celles des quelque 20 000 victimes de la lutte contre le dictateur.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 29 juillet 2021

 
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