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20 janvier : il y a 50 ans, Amilcar Cabral, héros des indépendances africaines, était assassiné

Ce leader de la lutte contre la colonisation portugaise a été exécuté avant que la Guinée-Bissau et le Cap-Vert, ses deux patries, obtiennent leur indépendance. Il fait figure de héros national pour ces deux pays comme pour l’ensemble du continent africain, l’extrême gauche lusophone et tous les mouvements anticoloniaux et décoloniaux.

 

Amílcar Cabral est né en 1924, à Bafatá Guinée portugaise (aujourd’hui Guinée Bissau) de parents originaires du Cap-Vert. C’est un héros africain des luttes pour l’indépendance, mais il est surtout célébré dans ces deux pays : le Cap-Vert et la Guinée-Bissau ont fait du 20 janvier (1973), anniversaire de son assassinat, la Journée des Héros (dia dos heróis). 

Après des études d’agronomie à Lisbonne, il est retour à son pays en 1952 pour s’engager dans la lutte contre la présence coloniale portugaise, en lien avec le Parti communiste portugais. En 1956, il fonde dans la clandestinité, avec Luís Cabral, son demi-frère (futur président de la République de Guinée-Bissau), Aristides Pereira (futur président de la République du Cap-Vert), Abilio Duarte (futur ministre et président de l’Assemblée nationale du Cap-Vert), le PAIGC (Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap Vert).

Le PAIGC se bat contre l'armée portugaise sur plusieurs fronts à partir des pays voisins devenus indépendants bien plus tôt, la Guinée Conakry et le Sénégal, depuis sa province de Casamance. Avec le soutien politique et matériel du bloc soviétique, Amílcar Cabral parvient peu à peu à contrôler le sud du pays, mettant en place de nouvelles structures politico-administratives dans les zones libérées.

Dans la nuit du 19 au 20 janvier 1973, Amilcar Cabral, de retour d’une réception à l’ambassade de Roumanie, succombe à des rafales de balles d’un commando devant son domicile à Conakry, en Guinée, alors qu’il rentrait seul, en compagnie de son épouse, Ana Maria Cabral. Il ne verra pas l’indépendance de la Guinée-Bissau et du Cap-Vert qui n’interviendront que le 10 septembre 1974, soit quelques mois après le 25 avril portugais.

Amílcar Cabral appartenait, comme beaucoup de dirigeants nationalistes de sa génération, à la petite bourgeoisie métis qui selon le régime instauré par le Portugal, était juridiquement des indigènes assimilés, c’est-à-dire disposant des mêmes droits que les Portugais. C’est en jouant sur les rivalités entre Noirs et Métis que les commanditaires de son assassinat qu’il ont inspiré l’exécution de Cabral par des membres du PAIGC. Un demi-siècle est passé et on ne connaît pas véritablement les commanditaires. On soupçonne la PIDE, la police politique de la dictature portugaise de l’époque avec sans doute des complicités en Guinée. Ce qui n’empêche pas ce pays de commémorer, lui aussi, le cinquantenaire de la mort d’Amilcar Cabral.

Aujourd’hui, Amílcar Cabral demeure un personnage mythique, tel un véritable Che Guevara africain, de nombreuses rues portent sont noms, ainsi que des lycées, partout en Afrique. Une compétition de football, la Coupe Amílcar Cabral, regroupe des pays de la sous-région (de la Mauritanie à la Sierra Leone en passant par le Mali).

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 

Détail d’un timbre poste de la république du Cap-Vert émis en 1976

Plaque de l'avenue Amilcar-Cabral, Saint-Denis en Seine-Saint-Denis

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1980, Guinée Bissau, Coup d'état militaire Bruno Teissier 1980, Guinée Bissau, Coup d'état militaire Bruno Teissier

14 novembre : en Guinée Bissau, on célèbre un coup d’État qui changé le cours de son histoire

Ce coup d'État du 14 novembre 1980, orchestré par le premier ministre de l’époque, João Bernardo Vieira, a abouti au renversement du président Luís Cabral, le demi-frère d’Amílcar Cabral, le mythique leader pan-africain dont les idéaux seront abandonnés.

 

Ce coup d'État du 14 novembre 1980, orchestré par le premier ministre de l’époque et ancien commandant des Forces armées, João Bernardo Vieira, a abouti au renversement du président Luís Cabral, chef du Parti africain pour l'indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC), le parti fondé par son demi-frère Amílcar Cabral, le leader indépendantiste, assassiné peu de temps avant l’indépendance.

Ce coup d’État qui s’est déroulé sans effusion de sang, est désigné par l’historiographie officielle comme le mouvement de réajustement (Movimento Reajustador) du 14 novembre. Cette réorientation politique, célébrée par un jour férié chaque 14 novembre comme l’Aniversário do movimento de reajuste, a surtout consisté à empêcher le rapprochement de la Guinée Bissau et de l’archipel du Cap-Vert, deux anciennes colonies portugaises promises à une fusion dans un même État.

Les deux frères Cabral étaient nés d’un père guinéen et de mères cap-verdiennes. Sur le continent, on reprochait à Luís Cabral, la promotion de personnalités cap-verdiennes, récemment arrivées du Portugal, en particulier dans l’armée, dont on dénonçait le manque de légitimité. Le ressentiment envers les Cap-Verdiens est né avec le modèle de domination coloniale. En raison de l'origine socioculturelle et de l'accès à l'éducation dont pouvaient bénéficier les Cap-verdiens, ils ont collaboré activement avec le pouvoir colonial, s'étant révélés comme de précieux auxiliaires et intermédiaires entre les indigènes et les autorités coloniales dans la gestion de l'administration et dans le contrôle du travail forcé. Même en tenant compte du fait que les métis ont fourni aux mouvements nationalistes leurs meilleurs cadres, ce passé inconfortable a refait surface dès que l'élite métisse cap-verdienne a commencé à s’imposer politiquement après la conquête de l'indépendance.

À la faveur de ce coup d’êta, João Bernardo Vieira a donc pris le pouvoir  avec le titre de Président du Conseil de la Révolution de la République de Guinée-Bissau. Il abandonne l’orientation socialiste et le pan africanisme de son prédécesseur. Son régime non démocratique jusqu’en 1994, s’est terminé lui aussi par un coup d’État en 1999. Il reviendra au pouvoir par les urnes en 2005 et sera assené dans la résidence présidentielle en 2009.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 
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