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1964, Brésil, victimes de la dictature, 31 mars Bruno Teissier 1964, Brésil, victimes de la dictature, 31 mars Bruno Teissier

31 mars : À São Paulo, une marche du silence en mémoire des victimes de la dictature militaire brésilienne

La Caminhada do Silêncio commémore les victimes de la junte brésilienne issue du coup d’État du 31 mars 1964.

 

Une première marche avait réuni 10 000 personnes en 2019 pour réagir contre la célébration du coup d’État du 31 mars 1964 par Jair Bolsonaro. Les deux années suivantes l’épidémie de covid, terrible au Brésil, avait empêché la commémoration. Cette année, 2022, une nouvelle édition de la Caminhada do Silêncio, conduira à un rassemblement au parc d'Ibirapuera, dans le sud de São Paulo. C'est une manifestation de plusieurs entités, à la date qui fait référence au coup d'État de 1964, pour la démocratie et la mémoire, pour les victimes de la violence d'État, dans le passé et dans le présent : victimes de la dictature, population noire, peuples autochtones, LGTBI+ communauté, touchée par covid . Et contre les risques de déboires institutionnels, qui semblaient plus présents ces dernières années, sous le gouvernement actuel.

Le rassemblement commencera à 17h30 sur la Praça da Paz, avec un accès par les portes 7/8 du parc d'Ibirapuera. La marche partira à 19h en direction du Monument aux morts et disparus politiques (porte 10). Les responsables conseillent le port d’un masque. Comme son nom l'indique, il n'y aura pas de discours. Les manifestants apporteront des photos, des bougies et des fleurs.

La Caminhada do Silêncio est organisée, notamment par l’Institut Vladimir Herzog (du nom d’un opposant torturé et assassiné) et le Núcleo Memória, avec le soutien de la ville de São Paulo. Ainsi, plusieurs organisations « attirent l'attention de la société sur les violences commises par l'État pendant et après la dictature ». L'initiative met également en lumière les luttes et les populations rendues invisibles à cette époque - telles que les populations noires, les peuples autochtones, les LGBTQIA+ - qui souffrent à ce jour des conséquences du maintien et de la montée de projets politiques contraires aux principes démocratiques et droits de l'homme », disent l'IVH et le Núcleo Memória. « L'assaut de l'État par l'extrême droite et sa « nécropolitique » responsable de plus de 650 000 morts par covid-19, le recul des politiques publiques de préservation de l'environnement et des peuples autochtones, le retour du pays sur la carte de la faim, le démantèlement de la culture et tant d'autres violations récentes des droits uniront à cette date d'innombrables fronts de résistance sociale.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 

Les manifestants sont venus avec des photos de disparus sous la dictature

Rassemblement au parc d'Ibirapuera en 2019

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24 mars : 46 ans après le coup d'État militaire, l'Argentine se souvient de la dictature

L’Argentine commémore le coup d’État de 1976 et les 30 000 victimes de l’État policier. Cette Journée nationale de la mémoire et pour la vérité est fériée, mais la fête n’est pas du goût de tout le monde, car elle rappelle le premier jour de la période la plus sombre de l’histoire de l’Argentine.

 

L’Argentine commémore le coup d’État de 1976 et les 30 000 victimes de l’État policier. Cette Journée nationale de la mémoire et pour la vérité (Día Nacional de la Verdad y la Justicia), instituée en 2002, est fériée depuis 2006, mais la célébration du 24 de marzo n’est pas du goût de tout le monde, car elle rappelle le premier jour de la période la plus sombre de l’histoire de l’Argentine marqué par des violations quotidiennes des droits humains, des assassinats politiques, des enlèvements d’enfants… Avec celle de Pinochet, au Chili à la même époque, la dictature instaurée par Jorge Rafael Videla à la suite du coup d’État militaire du 24 mars 1976, a été l’une des plus sanglante du continent.

Dès le retour de la démocratie, la première marche avait été organisée le 24 mars 1986 pour commémorer le coup d'État organisé par les Mères de la place de Mai, mais il a fallu attendre les années 2000 pour en faire un jour férié, d’abord non chômé, puis le président Kirchner en a fait une journée non travaillé (2006). Le président Macri a tenté en 2017 d’en faire une fête mobile, mais a dû y renoncer devant le tollé provoqué par l’abandon de la date symbole du 24 mars.

Après la chute du régime militaire (le 10 décembre 1983), une loi dite “point final” (1986) pardonnait aux responsables de crimes contre l'humanité, aucune poursuite ne pouvait être entreprise.Le 14 juin 2005, grâce au président Néstor Kirchner, la Cour suprême de justice de la nation a finalement déclaré l'inconstitutionnalité de cette loi, ce qui avait permis l'organisation de nombreux procès publics contre les auteurs des crimes de la dictature. À l'heure actuelle, on continue d'enquêter sur les événements survenus entre 1976 et 1983 dans les différents centres de détention clandestins.

Des Français ont été victimes de la répression. Une cérémonie a eu lieu à l'ambassade d'Argentine en France à Buenos Aires, devant la plaque "Plus jamais" en souvenir des victimes du terrorisme d'État.  On ne peut célébrer cette journée sans faire référence à la Marche des mères de la Plaza de Mayo, aux grand-mères de la Plaza de Mayo , à Héctor Germán Oesterheld, à Adolfo Pérez Esquivel… sans oublier l’écrivain Rodolfo Walsh, le fondateur du journalisme d'investigation en Argentine, assassiné par la junte militaire le 25 mars 1977, le lendemain de l’anniversaire du coup d’État.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 23 mars 2022

Mise à jour 2024 : le nouveau président argentin, d’extrême droite, Javier Milei, s’applique à nier ou relativiser les crimes de la dictature : « il n’y a pas eu 30 000 disparus » s’obstine-t-il à affirmer. Ce 24 mars 2024, au moment même où avait lieu la traditionnelle marche mémorielle, le gouvernement mettait en ligne une vidéo de 12 mn remettant, pour la première fois depuis 1983, au goût du jour, la « théorie des deux démons » (Teoría de los dos demonios) qui consiste à justifier les crimes contre l’humanité commis pendant la dictature en les présentant comme une réponse à des attentats perpétrés, à l’époque, par des groupes d’extrême gauche. Milei a assorti la vidéo d’un mot-dièse : #nofueron3000 (ils n’ont pas été 30 000). Quant à la ministre de la sécurité, Patricia Bullrich, elle s’est apitoyée sur le sort des militaires et policier « injustement emprisonnés ». Le projet économique de Javier Miliei est totalement en phase avec celui de la dictature ; ses idées sur la société argentine également. Va-t-il faire basculer le pays à nouveau dans l’horreur ?

 
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