9 novembre : il y a 90 ans, l'armée suisse tirait sur la foule des manifestants

 

Le 9 novembre 1932, l’extrême droite fasciste genevoise organisait un meeting à la salle communale de Plainpalais pour une mise en accusation publique de deux leaders de la gauche genevoise : Léon Nicole et Jacques Dicker. Pour empêcher ce meeting, une manifestation ouvrière réunit plusieurs milliers de personnes. Craignant des troubles, le Conseil d’État fait appel à l’armée qui envoie de jeunes recrues inexpérimentées encadrées par des officiers qui leur font croire qu’une révolution de type bolchevique a éclaté à Genève. Pressée par les manifestants devant l’ancien Palais des expositions (actuellement Uni-mail), l’armée tire dans la foule à 21 h 34 sans sommation, assassinant en quelques secondes 13 personnes et en blessant des dizaines d’autres… Les victimes sont surtout des passants et des curieux plus que des militants socialistes.

Aucun soldat ne sera poursuivi, en revanche, le lendemain, Nicole et six autres socialistes sont arrêtés, rendus responsables de ces événements puis écroués à Saint-Antoine. En mai 1933, à l'indignation générale de l'opinion publique, Léon Nicole sera condamné par une cour d'assises fédérale à 6 mois de prison. Une fois relâché, Léon Nicole a repris la direction du parti socialiste genevois et est devenu président du Conseil d'Etat le 1er décembre 1933. Genève a connu le premier gouvernement à majorité de gauche en Suisse. Celui durera jusqu’en 1936.

En 2016, le gouvernement genevois demande la réhabilitation nationale des sept condamnés : Léon Nicole, Auguste Millasson, Francis-Auguste Lebet, Jules Daviet, Albert Wütrich, Francis Baeriswyl et Edmond Isaak par une cour d'assises fédérale le 3 juin 1933 à 6 mois de prison. Ces personnes avaient été défendues par Jacques Dicker, l'arrière grand-père de l'écrivain Joël Dicker. Cette réhabilitation sera refusée par Berne en 2019. Un refus qui n'empêche pas une partie des Genevois de perpétuer leur devoir de mémoire, à chaque date anniversaire.

Cette année, pour les 90 ans du drame, e comité intersyndical et des organisations politiques organisent une cérémonie en leur hommage en réitérant le mot d’ordre « Plus jamais ça ! » La cérémonie commence à 18h devant la Pierre du 9 novembre, en face d’Uni-Mail. Une exposition et une conférence marquent aussi l’événement.

La pierre commémorative a été installée en 1982, pour le cinquantenaire de l’évènement. Elle est régulièrement vandalisée, preuve que les tensions qui ont divisé Genève dans les années 1930, en très le Parti socialiste et l’Union nationale de Georges Oltramare, ne sont pas totalement éteintes.

Aux lendemains de la fusillade du 9 novembre, craignant une remise en cause de l’ordre établi, les autorités procèderont en Suisse à plus de 200 arrestations dans les milieux ouvriers. Des troupes seront mobilisées dans les cantons de Genève, Vaud, Berne et Zürich. Les distributions de tracts et manifestations seront interdites dans la plupart des villes du pays. Les journaux ouvriers seront empêchés de publication, d’autres soumis à relecture. Le drame reste une date charnière de le l’histoire politique de la Suisse.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 
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