L’Almanach international

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4 mai : au Japon, un jour férié pour se mettre au vert

Comment une journée dédiée à la nature participe à la révision de l’Histoire japonaise du XXe siècle par la droite nationaliste japonaise.

 

On peut s’étonner que les Japonais aient dédié à la verdure un jour férié qui n’a rien de religieux ni de mémoriel. Officiellement, la Journée verte du 4 mai est juste une journée pour exprimer sa gratitude pour les bienfaits et communier avec la nature. Il est vrai que les Japonais sont particulièrement bien dotés en jours fériés, quinze au total et s’ils tombent un dimanche, le lundi qui suit est férié.

En fait le 4 mai est un jour férié et chômé depuis plusieurs décennies, en vertu d’une loi qui veut qu’un jour coincé entre deux jours fériés soit lui aussi un jour chômé. Cette période correspond à ce que les Japonais appellent la Golden week : une succession de jours fériés et chômés (29 avril, 3 mai et 5 mai) qui, avec les week-ends, peuvent certaines années, générer jusqu’à 10 jours de vacances. Le 4 mai était un jour férié sans attribution jusqu’en 2007, date à laquelle est est devenue la Journée de la verdure, ou Midori no Hi (みどりの日). Cette invention n’a rien d’une démarche écologique, on doit cette journée à l’ambition de la droite nationaliste japonaise de réviser l’Histoire du pays.

En 1989, l’empereur Hiro Hito est mort emportant avec lui une page sombre de l’histoire du Japon. Allié à Hitler, il avait été un acteur majeur de la Seconde Guerre mondiale. L’anniversaire de l’empereur faisant office de fête nationale du Japon, celle-ci a été transférée au 23 décembre, anniversaire de son fils Akihito. Pour ne pas perdre la trace d’une date qui a été fêtée de 1926 à 1989, sans pour autant faire référence à l’empereur controversé, on a gardé le 29 avril comme jour férié et chômé en lui attribuant une fête de la nature qui ne pouvait pas prêter à polémique. Avec le temps, la mémoire gouvernementale est devenue moins pudique. Un courant conservateur nationaliste qui a le vent en poupe n’a cessé de vouloir réviser l’Histoire pour en donner une version plus complaisante à l’égard du régime autoritaire d’avant-guerre. La révision de la liste des jours fériés en 2005-2006 (sous les premiers ministres Jun'ichirō Koizumi et Shinzō Abe) est un témoignage parmi d’autres de ce révisionnisme. Le 29 avril est ainsi redevenu un jour d’hommage à l’empereur Hiro Hito. Il fallut caser ailleurs, la Journée de la verdure, la date du 4 mai étant libre de toute attribution, cela lui donnait une raison d’être. D’autant que beaucoup de Japonais profitent de ces congés de printemps pour se mettre au vert.

On s’est pris au jeu, divers événements sont été organisés chaque 4 mai à travers le pays pour aider les citoyens à se familiariser davantage avec la nature, comme l'ouverture gratuite des parcs nationaux et autres parcs publics lors de la Journée de la verdure.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 4 mai 2025

 
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Bruno Teissier Bruno Teissier

3 mai : les Japonais en vacances fêtent leur constitution

La Journée de la constitution ou Kenpō kinen bi  rend hommage à la loi fondamentale japonaise adopté en 1947.

 

La Journée de la constitution ou Kenpō kinen bi (憲法記念日) est un jour férié qui n’a pas un grand retentissement dans le pays, mis à part une journée porte ouverte de la Diète (le parlement japonais) et quelques discours officiels retransmis à la télévision. Elle n’est pas oubliée pour autant car cette journée fériée s’inscrit dans la Golden week, une série de jours chômés qui permet chaque année aux Japonais de prendre des vacances de printemps.

La constitution de l'État du Japon (日本国憲法, Nihon-koku kenpō), votée le 3 novembre 1946 et entrée en vigueur le 3 mai 1947. Elle est en partie inspirée par le travail de Douglas MacArthur alors commandant suprême des forces d'occupation alliées au Japon. La préoccupation de l’époque était de prendre le contrepied du régime belliqueux et autoritaire qui régnait au japon jusqu’en 1945. Les Japonais s’en sont, depuis, parfaitement accommodé. C’est un des fondements du pacifisme japonais.

Cette constitution est une rare au monde à ne jamais avoir été modifié même si Shinzō Abe, le très nationaliste premier ministre du début du XXIe siècle avait tout fait pour la réformer, mais sans y parvenir. Son projet principal était de réécrire son article 9 rédigé comme suit :

« Aspirant sincèrement à une paix internationale fondée sur la justice et l’ordre, le peuple japonais renonce à jamais à la guerre en tant que droit souverain de la nation, ou à la menace, ou à l’usage de la force comme moyen de règlement des conflits internationaux.

Pour atteindre le but fixé au paragraphe précédent, il ne sera jamais maintenu de forces terrestres, navales et aériennes, ou autre potentiel de guerre. Le droit de belligérance de l’État ne sera pas reconnu. »

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 3 mai 2024

Un fragment de l’original de la constitution japonaise.

 
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1901, Japon, Seconde Guerre mondiale, 29 avril, monarchie Bruno Teissier 1901, Japon, Seconde Guerre mondiale, 29 avril, monarchie Bruno Teissier

29 avril : le jour où les Japonais honorent un criminel de guerre

Le 29 avril, au Japon, c’est le Jour de l’ère de Showa, une période qui va de 1926, année de l’avènement de Hiro Hito à sa mort en 1989. C’est aussi le premier jour de la Golden Week, période de congés tant attendue par les Japonais.

 

Le 29 avril, c’est le Jour de l’ère de Showa, ou Shōwa no hi (昭和の日) une période qui va de 1926, année de l’avènement de Hiro Hito à sa mort en 1989. Le jour est férié depuis 1985. Le 29 avril est l’anniversaire de l’empereur Hiro Hito, né en 1901. Il est l’un des grands criminels de la Seconde Guerre mondiale. Il fut épargné par les Américains qui l’ont laissé sur le trône dépouillé de tous ses pouvoirs. Seuls son premier ministre, Hideki Tojo, et quelques hauts dignitaires furent condamnés à mort et exécutés. Chaque année, au Japon, des manifestants dénoncent cette célébration du personnage qui a mené le Japon et l’ensemble de l’Extrême-Orient, au désastre.

De 1989 à 2006, le 29 avril avait été instituée fête de la verdure (Midori no hi, みどりの日) car l’empereur s’intéressait à la botanique. Mais cette fête ayant été déplacée au 4 mai, le 29 avril ne fait plus, aujourd’hui, référence qu’à l’empereur Hiro-Hito. D’où la colère d’une partie de l’opinion publique qui préférait la référence à la nature. Des militants manifestent ce jour-là contre le 4-29.  D’autres, au contraire, se félicitent simplement d’être en congés ce jour-là.

Le 29 avril est en effet le premier d’une série de  jours fériés que l’on appelle la Golden Week (ゴールデンウィーク) et que les Japonais attendent chaque année avec impatience. Lors de cette « semaine dorée » qui comprend quatre jours fériés répartis entre le 29 avril et le 6 mai, les écoles et les universités sont fermées, les entreprises tournent au ralenti et les routes aussi bien que les gares sont encombrées car les Japonais en profitent pour prendre plusieurs jours de congé.

Selon les autorités, conscientes de l’ambiguïté de ce jour férié, Shōwa no hi est avant tout une journée pour réfléchir à l’Histoire du pays, à son redressement après une période terrible, et à son avenir. Il est important que chacun se souvienne de l’ère Showa afin d’éviter que les différents événements ne soient oubliés et d’encourager l’élan en faveur de la paix.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 28 avril 2024

 
Manifestation l’opposant à la célébration de Hiro Hito, à Tokyo, en 2016

Manifestation l’opposant à la célébration de Hiro Hito, à Tokyo, en 2016

Troupes japonaises, drapeau japonais impérial et drapeau nazi

Troupes japonaises, drapeau japonais impérial et drapeau nazi

Hiro Hito, photo officielle (détail)

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