L’Almanach international

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1929, 1807, États-Unis, Noirs, Afro-américains Bruno Teissier 1929, 1807, États-Unis, Noirs, Afro-américains Bruno Teissier

16 janvier : Martin Luther King Day / Robert E. Lee Day, les deux visages de l’Amérique

Ce jour férié fédéral, en hommage à Martin Luther King, est encore mal accepté dans les États du Sud et dans les milieux trumpistes qui continuent de célébrer le même jour, Robert E. Lee un général raciste du camp confédéré.

 

Chaque année, le troisième lundi de janvier, on célèbre aux États-Unis l’anniversaire du pasteur Martin Luther King Jr. (né le 15 janvier 1929). Figure de proue du mouvement afro-américain des droits civiques et le principal porte-parole de la désobéissance civile non violente. Il est notamment connu pour son discours de 1963 "I Have a Dream ». Le même jour, certains États du sud, ainsi que les partisans de Donald Trump célébrent Robert E. Lee, le général sudiste qui s’est battu contre l’abolition de l’esclavage des Noirs aux États-Unis.

Aussitôt après l’assassinat de Martin Luther King, le 4 avril 1963, une campagne a été lancée pour que soit institué un jour férié fédéral en faveur du pasteur, lauréat du prix Nobel de la paix. En 1979, un projet de loi en ce sens présenté par les démocrates n’a pas pu être voté. Finalement c’est à l’occasion du 20e anniversaire de sa mort que ce jour férié a été promulgué par le président Ronald Reagan, lequel pourtant avait toujours milité contre. Il est vrai que six millions de personnes avaient signé une pétition pour faire aboutir le projet. Après quelques atermoiements, la première journée Martin Luther King Jr. (Martin Luther King Jr. Day) a finalement été célébrée le 20 janvier 1986. 

Beaucoup d’États ont été retissants. Certains, contraints de la mettre en place, l’ont l’appelé Journée des droits civils ou Journée des droits de l'homme au lieu de la nommer de son nom fédéral, abrégé en MLK Day. Ce n’est qu’en 2000, que la totalité des 50 États ont officiellement observé le troisième lundi de janvier comme la Journée Martin Luther King Jr. .L’Utah a été le dernier État à adopter le nom de Martin Luther King Jr. Day, tandis que la Caroline du Sud a été le dernier État à le reconnaître comme un jour férié chômé mais pour les seuls employés de l'État. #MLKDay

Enfin, ce même troisième lundi de janvier, des États du sud continuent de célébrer le Robert E. Lee Day, en hommage à un général confédéré (sudiste) qui s’est battu pour que l’esclavage ne soit pas aboli. Robert E. Lee est né le 19 janvier 1807. Il a dirigé une armée qui a mené une chasse aux Noirs américains libres et massacrés des soldats noirs de l'Union qui étaient faits prisonniers. Après la guerre, il a continué à lutter contre tout projet de donner des droits aux Noirs américains. Plusieurs États du vieux sud continuent rendre hommage à ce général raciste. Certains comme l’Alabama et le Mississippi, en le mettant sur même plan que Martin Luther King lors d’hommages qui ont lieu le même jour. L’Arkansas a cessé de le faire en 2017. D’autres États se sont contenté de déplacer la date : la Floride au 19 janvier (jour de son anniversaire) et la Géorgie au vendredi qui suit Thanksgiving. Quant au Texas, il a fait du 19 janvier le Confederate Memorial Day… Les élites blanches de ces États n’ont toujours digéré leur défaite de 1865 face aux soldats de l’Union venus leur imposer d’abolir l’esclavage des Noirs. Ce sont les mêmes États qui multiplient aujourd’hui les entraves au vote des Noirs afin de maintenir à leur poste les pires éléments du camp républicain.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 15 janvier 2023

 

Martin Luther King (1929-1963) lors de son discours historique de 1963

Le général Robert Edward Lee (1807-1870), icône de l’extrême droite américaine, a eu les honneur de la poste fédérale américaine.

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26 décembre : Le Noël alternatif des Afro-Américains ou l’invention d’une tradition

Sitôt les fêtes de Noël terminées, les Noirs américains enchaînent avec leurs propres festivités : le 26 décembre débute Kwanzaa, une célébration d’une semaine qui se terminera le 1er janvier. Une tradition créée de toute pièce, il y a un demi siècle, devenue officielle en Amérique du Nord.

 

Sitôt les fêtes de Noël terminées, les Noirs américains enchaînent avec leur propres festivités : le 26 décembre débute Kwanzaa, une célébration d’une semaine qui se terminera le 1er janvier. Chaque soir, on allume une bougie du Kwanzaa, le chandelier à 7 branches inspiré de la menorah que les juifs ont allumé cette année du 10 au 18 décembre. Les bougies du Kwanzaa sont rouges, noires et vertes, aux couleurs du nationalisme panafricain. Le décorum comprend des fruits, des légumes et des épis de maïs. Les familles les plus motivées décorent leur foyer avec des objets d'art africain, des tissus colorés… On fait largement participer les enfants tout en prévoyant un hommage aux ancêtres. Cette fête a été inventée de toute pièce dans les années 1960 par un activiste de la cause noire voulant offrir à la communauté « africaine-américaine » une période de fête distincte de celle de Noël, qui est héritée des Blancs et qui est devenue très commerciale. 

Le créateur en est Maulana Karenga (né Ronald McKinley), un historien américain, appartenant au mouvement US (qui signifie « Nous », le peuple noir). Son idée était d’adapter aux États-Unis une célébration africaine. Il s'inspire notamment de l’Umkhosi des Zoulous, en Afrique du Sud, qui célèbrent les premiers fruits du début des récoltes, fin décembre (les Zoulous vivent dans l’hémisphère sud). Le nom de la fête signifie « fruit » en swahili (kwanza), la seule langue africaine internationale. On a juste rajouté un a pour que le mot ait sept lettres, autant que de bougies et de jours dans la semaine. La célébration de sept jours représentent les sept sept principes de Kwanzaa : Umoja (l'Unité), Kuji-chagulia (l'Autodétermination), Ujima (la Responsabilité et le Travail collectifs), Ujamaa (l'Économie coopérative), Nia (l'Intention), Kuumba (la Créativité) et Imani (la Foi). Un festin (le karamu) est organisé le 31 décembre, et le dernier jour de Kwanzaa donne lieu à l’échange de cadeaux. 

D’abord adopté par les militants du Black Power, Kwanzaa est devenu au fils des ans une fête populaire (et commerciale) dans les familles noires américaines. Elle s’est propagée au Canada, dans les Caraïbes, un peu au Brésil… plusieurs millions de personnes observeraient plus ou moins le Kwazaa, sans pour autant avoir abandonné Noël. Cette célébration demeure totalement ignorée en Afrique. C’est une fête identitaire de la diaspora noire américaine, celle qui n’a plus de souvenirs précis de ses racines, du fait de l’esclavage. Ce qui explique qu’elle soit très peu implantée en Europe où vivent de nombreux Africains, même si une association France Kwanzaa a été créée en 2017. Son invention tient du communautarisme propre aux États-Unis mais son audience a fini par déborder de la communauté noire. En 1997, un premier timbre poste lui a donné une reconnaissance officielle. Au bout d'un demi siècle, le militantisme identitaire s’est aujourd’hui bien affadi autour de la célébration. Celle-ci s'est banalisée et s'est implantée dans la culture nord-américaine. Chaque année, depuis Bill Clinton, les présidents américains incluent le Kwanzaa dans leurs traditionnels vœux de fin d’année. Même Donald Trump, en plein mouvement Black Lives Matter, s'est plié à cette nouvelle coutume ! L’usage veut, durant cette période, que l’on se salut d’un « Habari Gani ? » ce qui signifie « Comment allez-vous ? » en swahili.

Le site officiel de la célébration : www.officialkwanzaawebsite.org

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 25 décembre 2020

 
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1978, Uruguay, Noirs, Musique, 3 décembre, Afro-américains Bruno Teissier 1978, Uruguay, Noirs, Musique, 3 décembre, Afro-américains Bruno Teissier

3 décembre : la journée nationale du candombe et de la culture africaine en Uruguay

La Journée nationale du Candombe, de la culture afro-uruguayenne et de l'équité raciale. El Día Nacional del Candombe : l’Uruguay célèbre l’expressions musicales de sa communauté noire.

 

Chaque 3 décembre (El Día Nacional del Candombe), l’Uruguay célèbre l’expressions musicales de sa communauté noire. Cette journée officielle, instaurée en 2006, commémore la démolition, le 3 décembre 1978, du conventillo Mediomundo, un lieu où vivait une communauté noire, au cœur de Montevideo, un haut-lieu de la culture du candombe. À l’époque de la dictature militaire, les autorités ont chassé une bonne partie des familles les plus pauvres du centre ville de la capitale pour les reléguer en périphérie. Les tambours et les noirs appauvrissent la ville disait-on du temps de la junte militaire au pouvoir. L'expulsion du conventillo est un acte qui symbolique de la violation des droits de l'homme et le racisme de la société uruguayenne sous le régime de la dictature.

D’origine africaine, le candombe est non seulement l’expression d’une résistance à la dictature, mais aussi l’occasion de manifestations musicales uruguayennes et d’une pratique sociale collective qui sont profondément enracinés dans la vie quotidienne des quartiers pauvres. Il est aussi un symbole et une manifestation de la mémoire de la communauté noire, incitant les anciens résidents à revenir au cœur historique du candombe lors de ces festivités. La commémoration du 3 décembre a été décidées suite à la demande d’Eduardo Ortuño, le seul député noir de cette mandature. Le 3 décembre est la Journée nationale du Candombe, de la culture afro-uruguayenne et de l'équité raciale (Día nacional del candombe, la cultura afrouruguaya y la equidad racial) est l’occasion d’un véritable carnaval.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 2 décembre 2020

 
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El conventillo Mediomundo avant 1978

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