L’Almanach international

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1908, Albanie, Kosovo, Macédoine du Nord, alphabet, 22 novembre Bruno Teissier 1908, Albanie, Kosovo, Macédoine du Nord, alphabet, 22 novembre Bruno Teissier

22 novembre : l’invention d’un alphabet, prélude à la création un État albanais

Cette Journée de l’alphabet albanais est célébrée en Albanie, au Kosovo et même en Macédoine du Nord, où le 22 novembre est un jour férié et chômé pour ceux qui parlent l’albanais. La date fait référence à un congrès fondateur qui permit, en 1908, le choix d’un alphabet. Ce fut une première étape avant la proclamation d’une Albanie indépendante, quatre ans plus tard.

 

En Albanie ou au Kosovo, le 27 novembre n’est qu’une journée commémorative, en revanche c’est une fête officielle qui donne lieu à un jour chômé pour les Albanais de Macédoine du Nord. D’ailleurs l’événement fondateur de l’alphabet albanais a eu lieu en Macédoine à l’époque où la région appartenait encore à l’Empire ottoman. Il s’agit du Congrès qui s’est tenu à Monastir (Manastir pour les Albanais, Bitola pour les Macédoniens), en novembre 1908.

Ce congrès qui a permis de créer une graphie unifiée pour la langue albanaise (shqip)  s’est déroulé du 14 au 22 novembre 1908. C’est l’anniversaire de sa clôture et de son acte final qui a été choisi pour célébrer la Journée de l'alphabet albanais (Dita e alfabetit shqip). L’affaire n’était pas évidente car non seulement, la langue albanaise est divisée en plusieurs dialectes, mais elle pouvait s’écrire de très nombreuse façons avec plusieurs alphabets offrant chacun des variantes. L’écriture arabe comme le turc de l’époque qui était la langue du pouvoir, était une option. L’alphabet grec, celui de la langue d’une bonne partie des élites et de l’Église orthodoxe, dominante dans le Sud, était un autre choix possible. L’albanais s’est aussi écrit avec alphabet cyrillique, celui avec lequel, on écrit le macédonien, le serbe, le bulgare, ainsi qu’avec l’alphabet latin, celui des catholiques vivant au nord ou des élites regardant vers l’Occident. Jadis plusieurs tentatives de créer un alphabet spécifique ont eu lieu, cette option aurait eu l’avantage de ne faire référence à aucune des trois religions qui se partagent la population albanaise.

Le congrès de Manastir /Bitola fit le choix de l’alphabet latin. Là encore, il fallut négocier entre plusieurs options et faire un mix des deux principales. On s’est finalement mis d’accord sur 36 lettres : a b c ç d dh e ë f g gj h i j k l ll m n nj o p q r rr s sh t th u v x xh y z zh, auxquelles il faudra rapidement ajouter le w en usage dans des mots étrangers importés. Cette création étaient urgente si ont voulait que se multiplient les écoles enseignant en albanais. La toute première ne s’est ouverte que du 7 mars 1887. Jusque-là, on enseignait en grec ou en turc.

Ce congrès est une étape importante du Renouveau culturel albanais, qui aboutira quatre ans plus tard, le 28 novembre 1912, à la proclamation d’indépendance de l ‘Albanie. En 1908, l’Albanie n’existait pas encore, cette réunion s’est tenue dans une ville de la Macédoine ottomane (Monastir/Manastir /Bitola) que se disputaient Grecs et Bulgares et qui au moment de la création de l’Albanie étaient occupée par les Serbes, lesquels l’intégreront ensuite à leur royaume.

Le Congrès Monastir a réuni 50 délégués provenant de 26 villes de la région. Mid'hat Frashëri a été élu président du Congrès, tandis que Luigj Gurakuqi et Gjergji Qiriazi étaient vice-présidents (sa sœur Parashqevi Qiriazi était la seule femme invitée). Ces lettres et érudits albanais formaient une élite intellectuelle soucieuse du fait que sans une unification linguistique, il serait difficile de faire accepter aux puissances européennes, la création d’un État albanais dans un coin des Balkans. Les intérêts géopolitiques des uns et des autres ont fait que la jeune albanaise n’a pas pu réunir tous les albanophones dans un même État. Aujourd’hui sur 6 millions d’albanophones seuls 3 millions vivent en Albanais. C’est la raison pour laquelle, cette fête du 22-Novembre ne concerne pas que l’Albanie, mais aussi le Kosovo et la Macédoine du Nord ainsi que la diaspora qui y participent pleinement.

Le 22 novembre 2020, les Archives d’Albanie ont inauguré un centre d’études à Skopje. La maison de Fehim bey Zavalani à Bitola, en Macédoine du Nord, où s’est tenu le congrès fondateur s’est ouverte au public en 2008 pour le centenaire. Depuis 2012, année du centenaire de l’Albanie, c’est le musée de l’alphabet albanais. Chaque 22 novembre, on raconte toute cette histoire aux écoliers de la région.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 21 novembre 2023

 

Timbre édité novembre 2023 par la poste kosovare pour ce 115e anniversaire du Congrès de Manastir

La maison de Fehim Zavalan (1859-1935), journaliste et militant albanais, où s’est tenu le congrès de 1908. Aujourd’hui, elle a été transformée en Musée de l’alphabet albanaise. Elle est située à Bitola, la deuxième ville de la Macédoine du Nord.

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1943, Liban, 22 novembre, indépendance Bruno Teissier 1943, Liban, 22 novembre, indépendance Bruno Teissier

22 novembre : le Liban en ruine fête une indépendance qu'il n'a jamais eu

C’est un pays en pleine déliquescence qui célèbre aujourd’hui sa fête nationale, le Liban n’a plus de président, plus de gouvernement, quasiment plus d’État. Ses banques ont ruiné le pays avec la complicité des 5 ou 6 oligarques qui contrôlent et dépouillent le pays… Plus que jamais, ce Jour de l’indépendance a quelque chose de surréaliste et de désespérant.

 

Cette année, le défilé militaire annuel célébrant le Jour de l'indépendance du Liban a été annulé, le cœur n’y est pas, le pays ruiné, n’a même plus de président…

En 1943, les Libanais s’étaient soulevés pour défendre leurs élites emprisonnées par les Français… Ces mêmes élites ont totalement ruiné pays et aujourd’hui, la population anéantie par des décennies d’incurie et de corruption, n’est même plus en état de se soulever.

Ce matin, comme tous les 22 novembre pour le Jour de l’indépendance, une cérémonie a lieu dans une forteresse perdue sur les pentes du mont Hermon, la Rachaya. C’est là qu’ont été emprisonnés quelques jours, les plus hauts dignitaires de la République libanaise : le président El Khoury, le chef du gouvernement, plusieurs ministres et députés. Ils ont été arrêtés à 4 heures du matin, le 9 novembre 1943, sur ordre du représentant de la France. Tous avaient été élus ou nommés dans la foulée des législatives de septembre qui mettaient en place une nouvelle chambre. Leur crime, avoir voulu faire voter des amendements à la constitution effaçant toute référence au mandat français, instauré en 1920. En 1941, les forces franco-anglaises chassant les représentants de Vichy, avaient pourtant promis l’indépendance, le représentant de la France Libre n’entendait pas se voir ainsi forcer la main d’accepter un Liban libre.

À l’annonce de l’emprisonnement de l’élite de la nation, des manifestations ont éclaté un peu partout. Un gouvernement provisoire est formé, à l’image de celui qui lutte pour libérer la France de l’occupation allemande. Le 12, les femmes manifestent en masse. Le 13, c’est le tour de lycéens, sur lesquels l’armée française ouvre le feu faisant de nombreux blessés… Les Français cèdent finalement le 22 novembre, en libérant les captifs. 

C’est cette date qui a été choisie comme fête nationale du Liban. L’indépendance formelle ne sera toutefois acquise que le 1er janvier 1944 et l’armée française ne quittera le Liban qu’en 1946.

Autrefois, le 22 novembre était l’occasion d’un discours télévisé du président de la république. Aujourd’hui, le pays n’a plus ni président ni gouvernement de plein exercice. Le mandat du président Aoun s’est terminé le 31 octobre. Jeudi dernier, le Parlement a échoué pour la sixième fois à élire un nouveau président, faute d'accord entre les différents clans mafieux qui se partagent le pays, aucun successeur n’a pu être désigné. Quant au gouvernement sortant, dirigé par Nagib Mikati, il est en effet chargé d’expédier affaires courantes, sans mandat ni légitimité politique depuis le mois de mai 2022.

Triste fête nationale pour un pays qui n’a jamais connu de souveraineté. Le 22 novembre est connu comme le Jour de l’indépendance. Mais en réalité, ce pays dirigé par une poignée d’oligarques n’est que le théâtre de rivalités régionales. Certains clans libanais s’appuyent sur l’Arabie saoudite, d’autres sur l’Iran et la Syrie… comme, jadis les uns s’appuyaient sur la France, d’autres sur les Anglais ou les Turcs… le pays n’a, en réalité, jamais connu de souveraineté. Aujourd’hui, il n’a plus d’État, sa monnaie ne vaut plus rien. Les banques libanaises, dans les mains des oligarques, ont détourné les économies de tous les Libanais. Certains par désespoir vont braquer leur propre banque dans l’espoir de retirer un peu d’argent de leur propre compte… la famine et le choléra ont réapparu.

Dans l’urgence, le Programme alimentaire mondial de l'ONU (PAM) vient d’accorder 5,4 milliards de dollars d'aide au Liban pour venir en aide à la population locale et aux deux millions de réfugiés syriens. Dans la population, on rêve d’une seconde indépendance, la vraie cette fois. Mais, il faudrait balayer tout le vieux système politique qui n’a plus rien de démocratique…

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 21 novembre 2022

 

Le 22 novembre 2019, les Libanais se soulevaient contre l’incurie de leur élites. Celles-ci sont aujourd’hui démissionnaires et la population n’a plus la même énergie qu’il ya trois ans.

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Mexique, Musique, 22 novembre Bruno Teissier Mexique, Musique, 22 novembre Bruno Teissier

22 novembre : la Sainte-Cécile célébrée en musique à Mexico

La patronne des musiciens est honorée chaque année à Mexico, plazza de Garibaldi

 

Sainte Cécile, la patronne des musiciens est honorée chaque année par de nombreux concerts, et d’autant plus en 2021, la fête tombant un dimanche. Marquée dans tout le monde catholique, la Sainte-Cécile est particulièrement célébrée à Mexico où les talentueux mariachis se réunissent sur la Plaza Garibaldi pour honorer leur sainte patronne. 

La première célébration musicale de la Sainte-Cécile aurait eu lieu à Évreux, en Normandie le 22 novembre 1570 avec un tournoi des compositeurs de l'époque. Plus tard, à partir de 1695, Édimbourg, en Écosse, a commencé à célébrer la musique avec une certaine régularité. D'autres pays ont suivi tels que la France, l'Espagne, l'Allemagne, entre autres. Plus tard en Amérique latine, la tradition de cette journée est apparue vers 1919-1920.

À minuit, chaque 22 novembre, sur la Plaza de Garibaldi de Mexico, les mariachis se réunissent pour chanter Las Mañanitas à leur patronne, Santa Cecilia et couronnent la reine mariachi de l'année. Depuis les années 1940, chaque année, le 22 novembre, des musiciens célèbrent cette image avec de la musique, des fêtes et des danses, pour la remercier des faveurs reçues et lui en redemander. 

Cet événement consiste en plusieurs activités, après avoir chanté les mañanitas sur la Plaza Garibaldi, les musiciens quittent ladite place en procession vers la basilique de Guadalupe, cette procession est pleine de couleurs et de musique avec laquelle les Mariachis accompagnent le passage. Après cela, les mariachis se réunissent à nouveau lorsque l'après-midi commence à tomber sur la Plaza Garibaldi pour jouer pendant des heures en remerciement à leur patron.

Vers midi, les gens commencent à se rassembler autour des musiciens qui, comme c'est un jour férié, commencent très tôt à interpréter leurs meilleures mélodies. Pour commencer la procession, le groupe principal de mariachis porte une image de "Santa Cecilia", qui est élégamment vêtue de sa robe de mariachis, couleur bordeaux, entourée d'arrangements floraux et escortée de ses "enfants".

Dans le ciel les pétards grondent, tandis qu'hommes, femmes et enfants se dirigent vers l'avenue Paseo de la Reforma pour ensuite emprunter la Calzada de Guadalupe en direction de Tepeyac. Le pèlerinage est animé par les mariachis eux-mêmes, qui unis d'une seule voix, vénèrent leur patron avec des chants mexicains.

Pour terminer la célébration, tous les mariachis, y compris certains qui viennent dans la capitale juste pour commémorer la journée, se rassemblent sur la Plaza de Garibaldi, où les groupes participent un par un avec leurs meilleures interprétations. De plus, le couronnement de la reine Mariachi est effectué.

Le mariachi est un style de musique et de performance musicale en groupe qui trouve son origine dans les zones rurales de Guadalajara au XVIIIe siècle. Et qui a évolué sous l’empereur Maximilien, frère de l’empereur d’Autriche François-Joseph Ier, qui s’était vu offrir la couronne impériale du Mexique . Durant son bref règne (1864-1867), il a fait venir d’Europe centrale des instruments comme le tuba, le trombone, le saxophone et l’accordéon, qui sont arrivés jusque dans les villages mexicains.

Un groupe de mariachis typique comprend 3 à 12 musiciens, bien que sa taille puisse varier. Le groupe de mariachis habituel se compose d'au moins une guitare, un guitarrón (une très grande guitare basse acoustique), des trompettes et des violons. Parfois, une harpe folklorique mexicaine, une flûte et/ou un accordéon sont également inclus. Il n'y a généralement pas de chanteur principal qui chante toutes les chansons. À Mexico, le berceau de la musique mariachi est situé la Plaza Garibaldi, dans le centre-ville historique.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 21 novembre 2021

 
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1920, Arménie, 22 novembre Bruno Teissier 1920, Arménie, 22 novembre Bruno Teissier

22 novembre : il y a 100 ans, l'État promis aux Arméniens

Chaque année les défenseurs de la cause arménienne rappellent la décision arbitrale du 22 novembre 1920 prise par le président américain W. Wilson sur le tracé de la frontière entre une future Turquie et l’Arménie.

 

Cette année, le 22 novembre a un goût bien plus amer qu’à l’ordinaire alors que les combattants arméniens viennent d’être écrasés par l’armée azerbaïdjanaise au point d’avoir perdu presque tous les territoires conquis sur ce pays en 1993-1994. L’Arménie reste un petit pays, plus enclavé que jamais, alors qu’il avait rêvé d’un territoire bien plus vaste reflétant ce qu’il avait été au Moyen-Âge.

Chaque année les défenseurs de la cause arménienne rappellent  la décision arbitrale du 22 novembre 1920 prise par le président américain W. Wilson sur le tracé de la frontière entre une future Turquie et l’Arménie. Celui-ci accordait à l’Arménie une partie des provinces de l’actuelle Turquie orientale mais, les victoires militaires turques de 1923 rendront cet arbitrage caduque dans les faits. Le traité de Sèvre de 1920 ne put jamais être appliqué. En 1923, un nouveau traité, signé à Lausanne, gommait le projet d’une grande Arménie et d’un Kurdistan indépendant.

Depuis un siècle, le 22 novembre est une date sacrée en Arménie. C’est, par exemple, un 22 novembre, en 1993, que fut créée sa monnaie, le dram. Chaque année, le Président de la république prononce un discours, la télévision prévoit un programme spécial. Cette année, en raison de la terrible guerre qui vient de s’achever, la journée est plus solennelle que les autres années. Le centenaire de la déclaration de Wilson prend un tour dramatique.

Ce  22 novembre 2020 a été décrété par Armen Sarkissian, président de la république arménienne, Journée du souvenir des victimes tombées pour la défense de la patrie dans la guerre de libération de l'Artsakh (le Haut-Karabagh). Suite à un appel du Catholicos de tous les Arméniens, Garegin II, une messe est dite dans toutes les églises arméniennes du monde. Au Saint-Siège de Saint-Etchmiadzin, la cérémonie de commémoration est organisée par le Catholicos après la sainte liturgie à 13h30.

Pour en savoir plus, lire Géopolique de l’Arménie par Tigrane Yégavian

 
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