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1975, Maroc, fête patriotique, 6 novembre Bruno Teissier 1975, Maroc, fête patriotique, 6 novembre Bruno Teissier

6 novembre : le cinquantenaire de la Marche verte des Marocains

Au Maroc, le cinquantenaire de sa Marche verte fait l’objet de grandes célébrations patriotiques. Donald Trump vient d’offrir au royaume un vote au Conseil de sécurité. Mais cette victoire diplomatique du Maroc, si elle semble mettre fin au conflit du Sahara occidental, est-elle pour autant une bonne nouvelle pour l’équilibre du monde ?

 

Cet après-midi, à 16h, le Grand Stade de Tanger accueille une célébration patriotique. Comme l’an dernier, 35 000 enfants sont réunis pour célébrer le 50e anniversaire de la Marche verte (ذكرى المسيرة الخضراء). Ces enfants choisis dans divers établissements scolaires publics ou privés, sont accompagnés par parents et grands-parents, ainsi que d’une bonne partie de la population de la ville. Ce soir le roi Mohamed VI va s’adresser à la nation. Son discours sera diffusé sur les ondes à partir de 21 heures. Le jour est férié au Maroc.

En 1975, le roi du Maroc Hassan II dont le trône était chancelant appelait son pays à marcher sur le Sahara occidental alors occupé par l’Espagne ; 350 000 Marocains répondirent à l’appel et fut envoyé par bus entiers « récupérer ces terres historiquement marocaines » sera sa cause sacrée et justifiera, pendant des années, de faire taire toute opposition à son régime autoritaire.

50 ans plus tard, le ressort patriotique fonctionne toujours, c’est tout un pays qui se retrouve aujourd’hui derrière son drapeau pour commémorer un événement fédérateur et historique : la Marche verte. Les « anciens » lancent le début des cérémonies en témoignant de ce qu’ils ont vécu et de l’importance de cette marche pacifique et sans arme. De fait, toutes les villes du pays vont voir défiler des foules brandissent d’une main le Coran, de l’autre le drapeau marocain, ni arme ni violence mais des prières et des chants patriotiques.

Le coup de bluff a formidablement réussi : le territoire est aujourd’hui intégré au royaume du Maroc, avec le temps passe plus s’amenuisait le risque que cette annexion unilatérale soit remise en question. Mais, quel coût ! Depuis plusieurs décennies l’économie du Maroc entretient à grands frais des forces d’occupation et des transferts massifs d’argents destinés à acheter la paix sociale sur le territoire, au détriment d’autres régions du Maroc. Quel coût politique aussi ! Puisque cet argument patriotique a permis à la monarchie d’établir un régime autoritaire qui n’a connu que de récents aménagements.

La patience a payé : pour ce cinquantenaire, les États-Unis ont offert, ce 31 octobre au Maroc un vote au Conseil de sécurité de l’ONU consacrant explicitement le plan d’autonomie marocain comme socle des négociations futures sur le Sahara-Occidental. La France l’avait fait il y a un an, l’Espagne, un peu plus tôt… C’est une formidable victoire diplomatique que fête le Maroc ce 6 novembre. D’ailleurs, à partir de l’an prochain, le 31 octobre sera également un jour férié.

Pour le droit international, ce n’est pas forcément une bonne nouvelle : s’il suffit de revendiquer des droits historiques pour réclamer et occuper un territoire, on comprend que la Russie et la Chine n’aient pas bloqué cette résolution très opportune pour leurs ambitions en Ukraine, au Tibet, à Taïwan… pour Israël, en Palestine ; la Turquie à Chypre… À noter toute fois : l’invasion marocaine du 6 novembre 1975, s’est faite sans armes et même si l’armée marocaine a pris ensuite position sur ce territoire, les Sahraouis réfractaires à leur marocanisation, s’ils sont passés à la trappe de l’Histoire, ils n’ont pas été massacrés comme le sont les Ukrainiens ou les Palestiniens. Comme quoi le soft power employé par le Maroc peut être plus payant eux yeux de l’opinion mondiale que le hard power des régimes guerriers.

Parmi les événements de ce cinquantenaire de la Marche verte

  • Du 4 au 8 novembre 2025 : une « Caravane historique » reliant Casablanca → Tarfaya → Laâyoune, avec plus de 50 véhicules d’exception et 110 participants, sur les traces de la Marche Verte.

  • Du 1er au 13 novembre 2025 : la 16ᵉ édition du Raid Tanja‑Lagouira, un « voyage de mémoire » de Tanger à Lagouira, avec des étapes dans les provinces du Sud.

  • Du 7 au 8 novembre 2025 : une conférence internationale à ENCG Dakhla sous le thème « De la Marche verte à la Marche du développement : cinquante ans de transformations et défis futurs dans les provinces du Sud ».

  • Du 3 au 9 novembre 2025 à Tan‑Tan, sous le thème « Tan-Tan… cinquante ans après la Marche Verte : héritage, intégration et ambition », avec spectacles, mapping, village de la Marche Verte, animations pour enfants.

  • Le 9 novembre 2025 à L’Olympia (Paris) : soirée culturelle et artistique marocaine (musique, mode, humour) en hommage à la Marche Verte.

  • Concours national de chansons « Hommage à la Marche Verte », ouvert aux jeunes Marocains, pour soumettre une œuvre originale.

  • Une émission philatélique spéciale pour ce cinquantenaire et une exposition « La Marche Verte : Mémoire et développement à travers les timbres-poste ».

Lire : Géopolitique du Maroc de Kader Abderrahim

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 5 novembre 2025

 
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1979, Maroc, 14 août Bruno Teissier 1979, Maroc, 14 août Bruno Teissier

14 août : la fête marocaine de l’Allégeance de l’Oued Eddahab, province la plus méridionale du Sahara occidental

L’Oued Eddahab correspond à la partie du Sahara occidental que la Maroc a annexé en août 1979, quand la Mauritanie en a abandonné le contrôle sous la pression guerrière du Front Polisario.

 

Avec les années, cette fête a perdu de son importance et de sa ferveur, mais le 14 août est un jour férié au Maroc. On y célèbre l’Allégeance Oued Eddahab (ذكرى استرجاع إقليم وادي الذهب). Si on s’en tient au discours officiel marocain, le 14 aout 1979, 360 représentants de la province sont venus effectuer la bayaa (le serment d’allégeance traditionnel) auprès du roi du Maroc, Hassan II, marquant ainsi l’allégeance de l’Oued Eddahab au royaume chérifien.

Ce territoire correspond à la partie du Sahara occidental qui avait été allouée à la Mauritanie lors des accords de Madrid de 1975. Quant aux deux autres tiers de cette colonie espagnole, ils ont été cédés au Maroc. L’ONU demandait depuis 1963 à l’Espagne de rendre sa liberté à ce territoire saharien qu’elle occupait depuis la fin du XIXe siècle. Dans la débâcle de la fin de la dictature franquiste, ce territoire fut partagé à la hâte entre ses deux voisins situés au nord et au sud. Une partie de la population a accepté cette solution, une autre l’a refusé. Faute de consultation démocratique, on ne connaît pas la proportion de chaque camp. Un mouvement de libération local, le Front Polisario, avait engagé dès 1973, une guerre contre l’Espagne. Au retrait de la puissance coloniale, il poursuivra le combat pour l’indépendance du territoire en s’opposant à la mainmise de la Mauritanie et du Maroc. En 1979, la Mauritanie se retire, épuisée par la guerre, mais le territoire qu'elle abandonne est annexé par le Maroc le 14 août 1979 qui en a fait sa province la plus méridionale, sous le nom de Dakhla-Oued Ed-Dahab.

Cette annexion, contraire au droit international, n’est pas reconnue par les Nations unies, ni par aucun de ses membres, à l’exception notable des États-Unis, le 10 décembre 2020.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 13 août 2023

Mise à jour 2024 : sortant de leur neutralité sur le sujet, l’Espagne puis la France soutiennent désormais le processus du règlement de la question du Sahara occidental initié par Rabat.

 
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1976, Sahara occidental Bruno Teissier 1976, Sahara occidental Bruno Teissier

27 février : drôle de fête au Sahara occidental

La République arabe sahraouie démocratique (RASD) fête ses 43 années d’une existence très relative, il faut bien l’avouer.

 

La République arabe sahraouie démocratique (RASD) fête ses 44 années d’une existence très relative, il faut bien l’avouer. La république a bien un président et un gouvernement mais établis, quasiment depuis l’origine, en territoire étranger : c’est Tindouf, localité algérienne, qui fait figure de capitale de la RASD. La fiction ne s’arrête pas là. Le pays se proclame arabe, alors que la population est berbère pour l’essentiel. Quant à son caractère démocratique, il est aussi virtuel que ne l’étaient celui des « démocraties populaires » de l’ancien bloc communiste. Cet État un peu surréaliste est tout de même reconnu par une cinquantaine de pays dans le monde, la liste fluctuant régulièrement au hasard des alternances politiques (dernièrement le virage à droite de l’Uruguay et de la Bolivie par exemple). Le principal soutient demeure l’Algérie. Une RASD, qui lui serait fidèle, lui ouvrirait une fenêtre sur l’océan, au grand dam du Maroc qui craint l’encerclement. Dans les faits, le territoire de la RASD est occupé à 80 % par ce dernier, depuis la Marche verte (voir le 6 novembre). Mais, Rabat n’a pas réussi à faire entériner son annexion, de fait, par la communauté internationale. Quant aux Sahraouis, qui existent bel et bien, personne ne s’est jamais soucié de connaître leurs aspirations.

Le processus de paix supervisé par les Nations Unies, entre le Front Polisario et le Maroc pour l'autodétermination au Sahara occidental, est aujourd’hui au point mort depuis la démission de l'envoyé spécial Horst Kohler, et qu'aucun successeur n'est désigné pour le moment. El Les forces marocaines sont mobilisées à Laâyoune, principale ville du Sahara occidental, afin de dissuader les Sahraouis d’organiser des événements ou des manifestations pour célébrer l’anniversaire de la proclamation de la RASD. 

 
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