L’Almanach international

Parce que chaque jour est important quelque part dans le monde

1949, Lettonie, URSS, Goulag, déportations, 25 mars Bruno Teissier 1949, Lettonie, URSS, Goulag, déportations, 25 mars Bruno Teissier

25 mars : la Lettonie commémore les déportations au Goulag

En Lettonie, le 25 mars est un jour de deuil où l'on se souvient des victimes des déportations opérées par Moscou et qui ont débuté le 25 mars 1949. En l’espace de trois jours, elles ont fait disparaître de Lettonie quelque 2,5% de la population du pays.

 

En Lettonie, le 25 mars est un jour de deuil où l'on se souvient des victimes des déportations de 1949. C’est  le jour du souvenir des victimes de la terreur communiste (komunistiskā terora upuru piemiņas diena).

Dans la nuit du 24 au 25 mars 1949, les habitants de nombreuses fermes lettones ont été réveillés par des coups de fusil ou de lourdes bottes frappant la porte. Des soldats et officiers des troupes internes du ministère soviétique de la Sécurité d'État, épaulé par des militants soviétiques locaux, se sont pointé dans de nombreux villages et ont annoncé aux victimes qu’elles avaient deux heures pour récupérer quelques affaires en vue d’un voyage vers la Sibérie. Environ 43 000 habitants ont été ainsi déportés de Lettonie vers l’est de l’URSS et une partie d’entre eux a été enfermée au Goulag sans aucune décision de justice. Épuisés certains ne sont même pas parvenus à destination, la majorité des déportés étant des enfants et des personnes âgées.

La déportation des Lettons avait été soigneusement planifiée et approuvée à Moscou le 29 janvier 1949. La mise en œuvre de ce plan a été réalisée le 25 mars et a duré jusqu'au 28 mars. 42 133 paysans et patriotes lettons ont été ainsi déportés de force. Cela représentait environ 2,5 % de la population de l’époque. Ils ont été envoyés  principalement dans les régions de Krasnoyarsk, Omsk, Tomsk, Amur, Novossibirsk. Environ 73% des déportés étaient des femmes et des enfants de moins de 16 ans. De plus, entre 136 000 et 190 000  ont été emprisonnés et déportés vers les camps de concentration soviétiques (le Goulag). Peu nombreux sont ceux qui reviendront.

À Riga, la commémoration de la déportation du 25 mars 1949 et les victimes du génocide communiste, débute à 10 heures par un moment de recueillement à la gare de Škirotava. À 12h30, il y a une procession du Musée de l'occupation lettone au Monument de la Liberté, où à 13h00 est organisée une cérémonie de relève de la garde d'honneur et de dépôt de fleurs. À 17 heures, puis à 20 h, des concert ont lieu en l'église Saint-Pierre de Riga. Une autre commémoration a également lieu chaque 14 juin en mémoire des déportations de 1941 dans les trois pays baltes.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 
Lire la suite
URSS, Russie, Goulag, Communisme, 1974, 30 octobre Bruno Teissier URSS, Russie, Goulag, Communisme, 1974, 30 octobre Bruno Teissier

30 octobre : en Russie, la mémoire refoulée du Goulag

Dans diverses villes de Russie, on commémore de manière officieuse les victimes du Goulag et de la répression à l’époque soviétique. Une cérémonie bien discrète au regard des 10 à 15 millions de morts. Mais l’heure est à la réhabilitation de Staline et à la célébration du dictateur Poutine qui fait emprisonner toute voix dissidente.

 

Ces dernières années, ils étaient quelques centaines, peut-être un millier, à se rassembler chaque 30 octobre autour d’une grosse pierre devant laquelle brûlent des dizaines de bougies. La roche a été rapportée des îles Solovki, là où les premiers camps de concentration soviétiques ont été établis dès les années 1920. Placée là par l’organisation Mémorial, elle sert à Moscou de monument commémoratif aux victimes de la répression politique que l’on célèbre officiellement en Russie. Nous sommes sur la place de la Loubianka à Moscou, le bâtiment qui abritait jadis le siège du KGB, et aujourd’hui celui de son principal successeur le FSB. Le 29 octobre, c’était la traditionnelle lecture publique des noms des victimes de la terreur politique soviétique.

Habituellement, un semblable attroupement a lieu au même moment à Saint-Pétersbourg devant une pierre de la même ori­gine. Cela dit, les commémorations demeuraient bien discrètes eu égard aux 10 à 15 millions de morts dans les camps du Goulag soviétique. La Russie de Poutine a eu de plus en plus de mal à regarder son passé en face et a procédé à un blanchiment complet de la figure de Staline.

En 2021, Poutine a fait interdire l’association Mémorial à l’origine des commémorations. La raison est que cette ONG russe continuait à affirmer qu’il y avait toujours, en 2021, des centaines de prisonniers politiques e Russie. Ils sont des milliers en 2022.

En 2022, il n’est plus question de commémoration officielle. L’association Mémorial, dissoute, a tout de même reçu le prix Nobel de la paix 2022.

Le 30 octobre 1974, dans son propre appartement Andreï Sakharov (et Sergueï Kovalev) organisaient la première conférence de presse annonçant que le 30 octobre serait désormais le « jour des détenus politiques en URSS ». Le même jour, dans les camps de Mordovie, de Perm et à la prison de Vladimir, des détenus politiques entament une grève de la faim. Les années suivantes des manifestations se déroulent à la même date. Le 30 octobre 1989, plus de 3000 personnes, tenant des cierges, font une chaine humaine autour du siège du KGB, sur la place de la Loubianka à Moscou. Ils sont dispersés par les troupes du ministère de l'Intérieur.

Finalement, en 1991, le le Soviet suprême fait inscrire le 30 octobre dans le calendrier des fêtes d'État comme Journée pour la mémoire des victimes des répressions politiques (День па́мяти жертв полити́ческих репре́ссий). Les cérémonies officielles sont souvent modestes, quoiqu’en 2017 (le 30 octobre), un imposant monument, dédié aux victimes des répressions politiques, a été inauguré par Poutine au croisement de la perspective Sakharov et de l’Anneau des jardins, dans le centre de la capitale russe. C’est le premier monument du pays dédié aux victimes du stalinisme. En peu d’années, le régime de Poutine a récusé toute commémoration d’un passé qui est aujourd’hui totalement écrit. La propagande a si bien fonctionné que 70% des Russes ont une image positive de Staline, ils n’étaient que 40% en 2007.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 
Pour nous aider à faire vivre l’Almanach BiblioMonde, pensez à un petit don de temps en temps, vous pouvez le faire sur Tipeee

Le 30 octobre 1989, à l'appel de Mémorial, plusieurs milliers de personnes forment une chaîne humaine autour du bâtiment du KGB sur la place Dzerjinski (aujourd'hui Loubianka) à Moscou avec des bougies et des pancartes du type « Nous exigeons le procès des bourreaux du KGB ! ». Photo : Dmitri Borko

Lire la suite