L’Almanach international

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1920, Estonie, URSS, 2 février Bruno Teissier 1920, Estonie, URSS, 2 février Bruno Teissier

2 février : l'anniversaire de l'Estonie, nouvel État européen

Chaque 2 février, l‘Estonie célèbre sa reconnaissance en tant qu’État en 1920. Pour la première fois dans l’histoire de son peuple, l’Estonie devenait un État reconnu par ses voisins, à commencer par la Russie, le plus grand, le plus menaçant.

 

Chaque 2 février, l‘Estonie célèbre sa reconnaissance en tant qu’État en 1920. Pour la première fois dans l’histoire de son peuple, l’Estonie devenait un État reconnu par ses voisins, à commencer par la Russie, le plus grand, le plus menaçant.

C’est l’Anniversaire du traité de Tartu (Tartu rahulepingu aastapäev). Ce jour, célébré officiellement, n’est pas férié mais il est plus important dans l’histoire de ce petit pays balte que sa proclamation d’indépendance du 24 février 1918 qui avait provoqué un conflit avec Moscou. Ce traité mettrait, en effet, fin à deux ans de guerre et surtout marquait la reconnaissance et l’indépendance de ce nouveau pays par la Russie. D’ailleurs, réciproquement, cet acte était aussi la reconnaissance de Lénine  et de la RSFSR (future URSS) sur la scène internationale. La Russie allait ensuite signer une série de traités avec les futurs États qui allaient former sa frontière occidentale de la Finlande à la Pologne en passant par les autres républiques baltes.

Le problème c’est que cette frontière définie en 1920-1921 a été effacée en 1940, suite à un partage du continent avec l’Allemagne hitlérienne. S’en est suivie une occupation des pays baltes qui va durer jusqu’à la disparition de l’URSS, en 1991. Pendant ces années, les frontières internes à l’URSS ont été modifiées au détriment de l’Estonie (la perdre de 5% de son territoire). Quand celle-ci a réussi à se dégager de l’occupation russe en 1991, c’est dans de nouvelles frontières. Or en dépit de deux tentatives avortées, aucun nouveau traité n’a été ratifié par les deux parties pour définir ces nouvelles frontières. Si bien que celles définies par le traité de Tartu sont, selon Tallinn, toujours valables mais par pragmatisme, on met en veilleuses les revendications d’un retour à la ligne de 1920. Pour Moscou, au contraire, ce traité est caduc. Ce qui veut dire qu’au niveau de l’Estonie, la frontière extérieure de l’Union Européenne demeure dans le flou et le provisoire. Seuls les partis d’extrême droite estoniens remettent régulièrement l’affaire sur le tapis ce qui a le don d’exaspérer Moscou, en pure perte. Depuis l’agression de l’Ukraine, il y a deux ans, l’Estonie craint plus que l’autres d’être la prochaine sur la liste des ambitions soutiennes. Que pourrait une petite démocratie d’un peu plus d’un million d’habitants face à un État autoritaire qui pèse 140 millions ? L’Estonie se contente de célébrer cet anniversaire sans, par prudence, en avoir fait sa fête nationale (celle-ci sera célébrée le 24 février).

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 
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Les territoires revendiquées sont en jaunes, à la frontière orientale de l’Estonie.

Les territoires revendiquées sont en jaunes, à la frontière orientale de l’Estonie.

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1943, URSS, 2 février Bruno Teissier 1943, URSS, 2 février Bruno Teissier

2 février : fêter les 80 ans de la bataille de Stalingrad pour légitimer l’agression de l’Ukraine ?

Pour les Russes, Stalingrad est devenue le symbole même de la victoire sur le nazisme, la bataille occupe une place centrale dans le patriotisme que promeut le Kremlin. Poutine participe à la célébration pour légitimer sa guerre de destruction lancée contre l’Ukraine, un État présenté par la propagande du Kremlin comme un État nazi.

 

Pour les Russes, Stalingrad est devenue le symbole même de la victoire sur le nazisme, la bataille occupe une place centrale dans le patriotisme que promeut le Kremlin. Chaque année, le 2 février est célébré comme une véritable fête nationale. Pour ce 80e anniversaire de la bataille de Stalingrad (80-летие Сталинградской битвы), le dictateur Poutine présent à Volgograd, redevenue Stalingrad le temps d’une journée (provisoirement car les habitants de la ville sont majoritairement opposés au changement de nom). Il est là, avant tout, pour légitimer sa guerre de destruction lancée contre l’Ukraine, un État présenté par la propagande du Kremlin comme un État nazi.

Le musée de la bataille de Stalingrad, un lieu de pèlerinage aussi incontournable qu’émouvant pour les Russes, accueille chaque 2 février des cérémonies de remise de décorations pour les familles de soldats tués en Ukraine. Poutine le visite ainsi que kourgane Mamaïev (Мамаев Курган), la coline où se trouve le mémorial de la bataille, pour y déposer une gerbe à la flamme éternelle située dans le hall de la gloire militaire. Le programme de la visite comprend également le discours du président lors d'un concert dédié au 80e anniversaire de la défaite des troupes nazies. Dans le musée du panorama, l’objectif de la visite du chef de l'État est la rencontre de représentants d'organisations publiques patriotiques et de jeunesse. Une entrevue entre Vladimir Poutine et le gouverneur de la région de Volgograd Andrey Bocharov est également au programme.

Après six mois de combats, la bataille s’achève le 2 février 1943 par la reddition du feld-maréchal von Paulus, de son état-major et de ses… 110 000 soldats. Il y a 80 ans jour pour jour. C’est la plus longue bataille jamais menée en Europe, son bilan est effroyable : la ville, qui comptait 600 000 habitants, a été rasée à près de 90 %. Au total, 1 million de soldats russes ou ukrainiens et 700 000 militaires allemands, roumains, italiens, hongrois et croates ont été tués, blessés ou disparus. Aujourd’hui encore, les steppes entourant la ville rendent chaque année des centaines de corps de soldats des deux camps. En 2022, plus de 1200 militaires de l’Armée rouge ont encore été retrouvés.

Volgograd, comme Coventry ou Hiroshima, fait partie du réseau international des cités martyres de la Seconde Guerre mondiale. L’ex-Stalingrad, auquel François Mitterrand a décerné la Légion d’honneur en 1984, est l’otage de son histoire tragique. La bataille de Stalingrad regroupe en réalité une succession de combats qui se sont tenus entre le 17 juillet 1942 et le 3 février 1943 dans la ville du même nom et à ses alentours. La défaite allemande marque le début du retournement de la Seconde Guerre mondiale vers la victoire des Alliés. La bataille est tous les livres d’Histoire autant en Occident qu’en Russie. Cela dit, Stalingrad ne constitue pas la fin des victoires allemandes et le retournement de la guerre s’est aussi  joué à Guadalcanal, dans le Pacifique, où les Américains ont écrasé les Japonais ainsi qu’en Afrique du Nord, avec l’opération Torch, le premier débarquement allié puis la victoire d’El Alamein, remportée par les Anglais face à l’Afrika Korps d’Erwin Rommel

Aujourd’hui en Russie, la bataille est devenue un véritable objet de propagande. Les cérémonies des dernières années célébrant Stalingrad sont bien plus pompeuses qu’à l’époque soviétique. Cette année, la mémoire de cette boucherie est difficilement dissociable de celle qui se produit depuis presque un an en Ukraine à l’initiative de Moscou.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 

Staline va bien, il se porte même de mieux en mieux. À Volgograd, face au musée, une statue du « petit père des peuples » a été inaugurée ce 1er février. Le dictateur soviétique y figure (au centre), entre Georgy Zhukov et Alexander Vasilevsky, les deux héros de la bataille de Stalingrad.

À Paris, la célèbre victoire a été commémorée par un groupuscule de communistes prorusses, le PRCF, au métro Stalingrad bien sûr.

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