22 octobre : en Indonésie, la Journée de l’islam santri

 

Aujourd’hui, en Indonésie, c’est la Journée nationale du santri ( Hari Santri nasional).  Cette fête est récente, elle a été créée par décret en 2005. Elle a une dimension à la fois patriotique, car elle rappelle un appel au djihad contre le colonisateur, et religieuse. Elle participe à la transformation de l’islam local en un islam rigoriste importé d’Arabie saoudite.

L’islam traditionnel en Indonésie est un mélange d’hindouisme et d’anciennes croyances animistes. À cet islam syncrétique et tolérant, celui des abangan, s’oppose celui des santri qui pratiquent une version plus orthodoxe et plus austère de l'islam appliqué à la lecture du Coran.

Le santri a joué un rôle important dans le mouvement d'indépendance indonésien. Ce ne fut pas le seul. Des mouvements communistes et nationalistes ont aussi joué un rôle déterminant, mais ce n’est pas eux qui sont mis en valeur par cette fête du 22 octobre. En 1926, un groupe de santri a formé Nahdlatul Ulama (la renaissance des oulémas), la plus grande organisation islamique indépendante au monde avec 30 millions de membres aujourd’hui. Suite à la proclamation de l'indépendance de l'Indonésie, ses membres ont déclaré que la lutte contre les forces coloniales néerlandaises était une guerre sainte et obligatoire pour tous les musulmans. La date du 22 octobre rappelle l’appel au djihad lancé en 1945 par Hasjim Asy'ari (1871-1947) contre les armées alliées, vainqueurs des Japonais.

Paradoxalement, c’est sous le président  Joko Widodo (alias Jokowi), élu en 2014 et réélu en 2019 qu’a été créée cette journée des santri (qui n’est pas un jour férié). Candidat démocrate et moderniste, il a été élu à la tête de l’Indonésie contre Prabowo Subianto, un général en retraite conservateur,  proche des milieux islamistes. Mais la pression de l’armée et des forces de l’ordre sur le régime est telle que Jokowi a dû céder à des mesures conservatrices, comme le renforcent des lois réprimant le blasphème, par exemple, et même faire entrer Prabowo Subianto dans son gouvernement, comme ministre de la Défense. La journée du 22 octobre participe, hélas, de ce combat culturel et religieux à l’encontre de la démocratie, de la tolérance et de la modernité. Un combat qui divise la société indonésienne. Contrairement à ce qui s’opère dans d’autres pays, c’est la population citadine qui s’enfonce aujourd’hui dans le conservatisme alors que les campagnes demeurent plus ouvertes et plus tolérantes sur le plan religieux (à l’exception de quelques régions comme la très rigoriste province d’Aceh). Cela dit, l’islam santri est partagé entre le réformisme de la Muhammadiyah et le traditionalisme du Nahdlatul Ulama.  Ces dernières années, c’est le courant traditionaliste qui semble prendre le dessus.

La cérémonie nationale de la Journée nationale du santri (HNS) se déroule au Monument national (Monas), de Jakarta. Une autre célébration a lieu également  au pensionnat islamique de Tebuireng, district de Jombang dont le cimetière abrite la tombe du fondateur des Nahdlatul Ulama, KH Hasyim Asy'ari.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 
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