19 janvier : Hrant Dink, martyr de la liberté de presse

 

Des cérémonies ont lieu aussi à Istanbul, à la mémoire de Hrant Dink, ce journaliste turc d’origine arménienne abattu le 19 janvier 2007 à 15 heures par un jeune paumé de 17 ans piloté par une organisation ultranationaliste turque. Des rassemblements ont également lieu chaque année à Paris, Marseille, Bruxelles, Erevan... à Lyon, c’est rue Hrant Dink dans le 2e arrondissement.

Hrant Dink s'est fait connaître en fondant Agos, un journal paraissant en turc et en arménien, abordant des sujets jusque-là tabous. Il était haï par les nationalistes turcs pour avoir qualifié de génocide les massacres dont les Arméniens ont été les victimes pendant entre 1915 et 1917 sous l'Empire ottoman. Aujourd’hui encore, les autorités turques refusent toujours de reconnaître la réalité génocide. Hrant Dink a été déclaré « héros de la liberté de la presse » par l’International Press Institut (IPI).

Le journal Agos, devant lequel Hrant Dink a été tué de trois balles a aujourd’hui déménagé. Ses bureaux, rue Halaskârgazi district de Şişli à Istanbul, sont devenus un simple lieu de mémoire, ouvert au public depuis juin 2019, sous le nom “23.5 Lieu de mémoire Hrant Dink 23,5” '. Le lieu tire son nom d’un article titré 23,5 Avril publié par Hrant Dink le 23 avril 1996 dans Agos. Le 23 Avril, est la veille du 24 (le fameux 24 avril 1915), jour de sinistre mémoire pour les Arméniens. Hrant Dink s’était marié un 23 avril et le couple avait conçu son premier enfant dans la nuit qui a suivi, d’où le 23,5.

Ailleurs dans le monde, notamment dans les villes où vivent des Arméniens, le combat de Hrant Dink pour la mémoire est toujours célébré chaque 19 janvier. Par exemple, ce dimanche à Bruxelles, après un requiem à la mémoire de Hrant Dink joué en l’Église arménienne, rendez-vous est donné à 13 heures devant le monument dédié au génocide des Arméniens, Square Henri Michaux, 1050 Ixelles. Ou encore à Londres, à 18 heures, St Yeghiche Armenian Church 13b Cranley Gardens, Kensington Londres SW7 3.

Le tireur, Ogun Samast, 17 ans au moment des faits, a avoué le meurtre et a été condamné à près de 23 ans de prison en 2011. Mais l'identité de ses commanditaires continue de faire l'objet de polémiques et spéculation. Le combat n’est pas terminé pour faire éclater la vérité sur les circonstances du meurtre. À l’occasion de ce 16e anniversaire, l'Association des journalistes de Turquie (TGC) a réagis en demandant une enquête. La proposition du HDP (part d’opposition) d'"enquêter sur le meurtre de Hrant Dink sous tous ses aspects" a été rejetée récemment par les votes des députés AKP et MHP (la coalition au pouvoir) à l'Assemblée générale de la Grande Assemblée nationale de Turquie.

Expliquant sa proposition, le député du HDP Diyarbakır, Garo Paylan, a déclaré :

(…) « Hrant Dink faisait la une des journaux sur le fait d'affronter le passé. Le 6 février 2004, le journal Agos a rapporté l'allégation selon laquelle Sabiha Gökçe [la fille adoptive de Mustafa Kemal Atatürk] était une orpheline arménienne. L'apocalypse a éclaté dans le pays concernant l'affirmation selon laquelle un orphelin était arménien. Cependant, dans le passé, une personne sur cinq était arménienne, et des centaines de milliers d'orphelins ont été laissés derrière pendant que le peuple arménien était expulsé de ces terres. Il a été affirmé que Sabiha Gökçen pourrait également être une orpheline arménienne. À ce moment-là, tout l'enfer s'est déchaîné. L'état-major général a publié une déclaration très dure et pris pour cible Hrant Dink. L'état-major a considéré l'affirmation selon laquelle Sabiha Gökçen était arménienne comme une menace majeure. Ce n'était pas suffisant, deux jours plus tard, Hrant Dink a été appelé au poste de gouverneur et a été menacé par deux responsables du MİT. Il a été dit : "Attention, marche sur tes pieds". Ce n'était pas assez, Ülkü Ocakları s'est réuni devant la présidence du district de MHP Şişli, Il s'est présenté devant le journal Agos avec un discours de haine. "Hrant Dink est notre cible", a déclaré le président provincial de l'Ülkü Ocakları devant le journal Agos. Ce n'était pas suffisant, la justice a pris des mesures. Le pouvoir judiciaire a intenté une action en justice contre Hrant Dink avec l'allégation d'insulte à la turcité, ce que Hrant Dink n'a jamais voulu ou ne pouvait pas dire dans un article. Hrant Dink a été condamné, bien que certaines personnes aient dit : « Une telle chose ne peut pas arriver ».

Selon eux, Hrant Dink était désormais un ennemi déclaré des Turcs et il visait. Certains acteurs appelés « Ergenekonists » ont ciblé Hrant Dink devant le journal Agos. La presse ciblait Hrant Dink dans le linge, le titre et les gros titres. Hrant Dink a écrit l'article "Mon humeur est un malaise de pigeon" une semaine avant son assassinat le 19 janvier 2007, en disant "Je suis maintenant sur la cible". Il a expliqué dans tous les détails pourquoi il était visé, mais l'AKP était au pouvoir à ce moment-là et n'a rien fait. Il n'a pas protégé Hrant Dink. Bien que toutes les agences de renseignement de l'État savaient que Hrant Dink serait assassiné, elles n'ont pas surveillé Hrant Dink, mais le gang qui est parti de Trabzon Pelitli et les a amenés au journal Agos.» (…) Garo Paylan (député turc d'origine arménienne)

Le site du Mémorial Hrant Dink et celui du journal Argos

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 
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