23 mars : une date de paix ou de guerre en Afrique méridionale

 

Ce 23 mars 2024, un sommet extraordinaire de la SADC (Communauté de développement de l'Afrique Australe) est réuni à Lusaka, capitale de la Zambie, pour débattre de questions de sécurité dans l’Est de la République démocratique du Congo et à Cabo Delgado, au Mozambique. Kinshasa compte sur la force de la SADC en cours de déploiement dans l'est de la RDC pour l'aider à "récupérer les territoires" occupés par la rébellion du M23 (le Mouvement du 23 mars).

Cette date du 23 mars est brandie par un mouvement rebelle, majoritairement tutsi et soutenu par le Rwanda. Ce mouvement du 23 mars, également appelé M23, est un groupe créé à la suite de la guerre du Kivu. Il est composé d'ex-rebelles réintégrés dans l'armée congolaise à la suite d'un accord de paix signé le 23 mars 2009 avec Kinshasa. Mais, en 2012,  nombre de ses membres se sont mutinés, considérant que le gouvernement congolais n'avait pas respecté les modalités de l’accord de 2009. C’est ainsi qu’est né le M23. Dans l’est de la RDC, les combats ont repris de plus belle depuis 2021. Le M23 est accusé de nombreuses violences contre les populations civiles, par des ONG (Human Rights Watch), par la cour pénale internationale et par le gouvernement américain. C’est de cette situation d’urgence dont on débat aujourd’hui à Lusaka, hôte d’un sommet de la SADC.

Ce même jour, le 23 mars, a une autre signification en Afrique australe, depuis 2018. Cette année-là , on fêtait le 30e anniversaire de la bataille de Cuíto Cuanavale et le 23 mars a été décrété Jour de la Libération de l'Afrique Australe (Dia da Libertação da África Austral) en souvenir de la fin de cette bataille qui s’est déroulée du 15 novembre 1987 au 23 mars 1988 sur le territoire de l’Angola. Ce pays, en particulier, en a fait une célébration nationale qui a lieu chaque année, principalement à Cuíto Cuanavale et à Luanda. Pour le régime de Luanda, issu de ce conflit post-colonial, cultiver la gloire de cette victoire est un moyen de faire oublier l’absence totale d’alternance politique depuis un demi-siècle.

La bataille de Cuíto Cuanavale est décrite comme l’une des plus importantes et l’une des dernières de la guerre froide. Elle opposait l’armée du FPLA, un mouvement de libération angolais, au pouvoir à Luanda depuis l’indépendance du pays, à celle de l’UNITA, un autre mouvement rebelle dirigé par Jonas Savimbi, qui combattait pour le camp adverse, avec le soutien de l’Afrique du Sud (encore sous apartheid) et des États-Unis. Alors que les forces de Luanda bénéficiaient du soutien militaire de Cuba et de l’URSS selon la logique de la guerre froide.

Cette bataille qui gangrenait le sud du continent, s’est arrêtée un 23 mars, en 1988, et a débouché sur les Accords de New York, qui ont donné lieu à la mise en œuvre de la Résolution 435/78 du Conseil de sécurité de l'ONU, conduisant à un retrait des forces cubaines et sud-africaines, puis à l’indépendance de la Namibie deux ans plus tard (presque jour pour jour) et finalement en 1994, à la fin du régime de ségrégation raciale en vigueur en Afrique du Sud. C’est dire l’importance de cette date, même si cette victoire militaire est loin d’être le seul facteur des bouleversements géopolitiques vécus dans la région à la toute fin du XXe siècle.

La décision de faire du 23 mars un jour de commémoration a été approuvée à l'unanimité par 15 États membres de la SADC lors du 38e sommet ordinaire de cette organisation régionale qui s’est tenu en 2018 dans la capitale namibienne, Winddhoek. Sa célébration est variable selon les États. Seule l’Angola en a fait un jour férié et chômé, reporté à lundi puisque cette année, le 23 mars tombe un samedi.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 23 mars 2024

Le mémorial de la bataille de Cuíto Cuanavale

 
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