1er décembre : la Journée de la liberté et de la démocratie au Tchad, un pays qui ne pratique ni l’une ni l’autre

 

Cette date du 1er décembre commémore la chute du terrible dictateur tchadien Hissène Habré provoquée par un soulèvement populaire mené par Idriss Déby en novembre 1990. Le 1er décembre, Hissène Habré était renversé et s’exilait au Sénégal. Le 2 décembre, Idriss Déby prenait la tête du Tchad. Depuis 1991, la Journée de la Liberté et de la Démocratie célèbre, par un jour férié et chômé, ce changement politique. Mais avec le temps il est simplement devenu une journée de célébration du régime. Mais, en 32 ans d’existence, celui-ci a petit à petit évolué vers de plus en plus d’autoritarisme et de moins en moins de démocratie.

Après le renversement d’Hissène Habdé, la constitution a été modifiée, le Tchad a ratifié les conventions internationales relatives aux droits humains. La presse est devenue libre, la justice s’est mise à fonctionner… Mais tout cela n’a duré qu’une décennie… La situation a commencé à se dégrader à partir de 2000 avec le projet d’exploitation pétrolière confié aux américains Chevron et Texaco. Pour les hommes au pouvoir, les enjeux financiers sont devenus tellement importants que les manifestations populaires ont été de plus en plus violemment réprimées. Des groupes rebelles se sont formés et la guerre a débuté en 2006, soit trois après le début de la manne pétrolière. L’argent du pétrole n’a nullement amélioré le sort des Tchadiens, il a servi à faire la guerre. Le président Idriss Déby s’est accroché au pouvoir refusant tous dialogue, muselant l’opposition. Après six élections (alors que la constitution n’en autorisait que deux) et avec pour les dernières, des scores de type soviétique… il est finalement mort lors d’un accrochage militaire avec des rebelles armés, le 20 avril 2021.

Le régime désemparé a aussitôt désigné son fils, Mahamat Idriss Déby Itno, dit Kaka, comme président de la période de transition. Celle-ci devait durer deux ans, elle a été prolongée jusqu’en 2025. La manifestation du 20 octobre 2022 contre ce dénie démocratique a été réprimée avec une violence digne de celle qui régnait à l’époque d’Hissène Habré. Non seulement l’armée a tiré sur la foule et mais elle a investi les maisons pour en extirper les manifestants et les exécuter sur-le-champ, le bilan est de 100 à 300 morts.

C’est un régime de terreur qui célèbre ce 1er décembre 2023, la Journée de la liberté et de la démocratie par une cérémonie de prise d’armes à N’Djamena, place de la Nation, en présence du président général Déby. Comme le faisait son père, celui dépose une gerbe de fleurs aux monuments aux morts et assiste au traditionnel défilé militaire avec ses invités étrangers, notamment un représentant de la France qui dispose au Tchad une importante base militaire, la dernière qu’elle détient au Sahel. D’où un soutien de Paris au régime de N’Djamena en dépit de ses inquiétantes dérives.

La semaine dernière, en vue de la célébration du 1er décembre 2023, le pouvoir a amnistié "tous les civils et militaires" impliqués dans les "événements" du 20 octobre 2022, invoquant une "volonté de réconciliation nationale". L'opposition s'est insurgée contre une loi d'amnistie générale destinée à "soustraire à la justice les policiers et militaires auteurs d'un massacre". 

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 30 novembre 2023

 
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