L’Almanach international

Parce que chaque jour est important quelque part dans le monde

1938, Jamaïque, fête du travail, 23 mai Bruno Teissier 1938, Jamaïque, fête du travail, 23 mai Bruno Teissier

23 mai : la fête des travailleurs en Jamaïque

La Jamaïque ne célèbre pas la fête des travailleurs le 1er mai comme dans la plupart des pays du monde mais le 23 mai en souvenir d’une rébellion ouvrière qui a éclaté le 23 mai 1938.

 

La Jamaïque ne célèbre pas la fête des travailleurs le 1er mai comme dans la plupart des pays du monde mais le 23 mai en souvenir d’une rébellion ouvrière qui a éclaté le 23 mai 1938.

En 1938, la Jamaïque était en proie à des troubles sociaux, les ouvriers étaient nettement sous-payés et plusieurs grèves ont éclaté à travers l'île, les travailleurs demandant tous la même chose, de meilleurs salaires. La plus remarquable de ces révoltes a été celle de l'usine de sucre de Frome qui qui a débuté le 23 mai 1938.

Une figure éminente a émergé des mouvements de 1938 : St. William Grant (St. pour "sergent"), un dirigeant syndical, nationaliste noir et garveyiste (influencé par Marcus Garvey). Grant s’est battu pour les droits des travailleurs et a même été arrêté en 1938 pour ses positions fermes, mais il mourra dans l’anonymat et la pauvreté. Son combat n’a cependant pas été oublié : le Victoria Park dans Parade au centre de Kingston a été renommé en mémoire de St.William Grant en 1977. En 1974, il a reçu l'Ordre de distinction à titre posthume. Son successeur à la tête du mouvement ouvrier, Alexander Bustamante, deviendra Premier ministre.

C'est à partir de ces mouvements ouvriers de 1938 que des syndicats ont été formés pour défendre la cause des travailleurs jamaïcains. La décision de faire du 23 mai la fête du travail date de 1961, quand un projet de loi au Parlement a aboli le Commonwealth Day (Empire Day jusqu’en 1958), un jour férié qui marquait l'anniversaire de la reine Victoria d'Angleterre, le monarque à qui on attribuait l'abolition de l'esclavage, son anniversaire était un jour férié fixé au 24 mai. Il fut décidé d’en faire la Fête du travail. Mais, sur proposition de Norman Manley, chef du gouvernement de l’époque, cette Fête du travail, (Labor Day), a été fixé au 23 mai, le jour anniversaire de l’apparition, en 1938, d’un mouvement ouvrier en Jamaïque.

Il y a une dimension supplémentaire à cette célébration : quand Hugh Shearer est devenu Premier ministre, en 1967, il a institué ce jour-là, une réception de la fête du Travail à Jamaica House (le siège du gouvernement). C'est une tradition qui perdure encore aujourd'hui. Hugh Shearer avait commencé sa carrière politique en tant que syndicaliste. Il avait participé avec Alexander Bustamante et d’autres dirigeants syndicaux à des négociations avec les employeurs dans certains conflits de travail les plus importants. En 1953, il a été nommé superviseur insulaire de l'Union. En 1977, il est devenu président du syndicat industriel et, dans les années qui ont suivi, fait de ce syndicat le plus grand des Caraïbes anglophones.

De 1961 à 1971, la fête a été très formelle et consensuelle. Elle prendra par la suite une dimension beaucoup plus combative et moins unitaire, un vrai jour de lutte des travailleurs pour leurs droits. Mais, elle est aussi l’occasion de travaux communautaires d’intérêt général.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 

Norman Manley, l’initiateur de la date du 23 mai

Lire la suite