17 avril : l’anniversaire du dieu Ram et la campagne électorale de Narendra Modi

 

Les hindous célèbrent Rama Navami (राम नवमी ), l’anniversaire  du dieu Ram, septième incarnation de Vishnou. Cette fête majeure de l’hindouisme est célébrée dans le monde entier par le biais de la diaspora indienne, de Londres aux Caraïbes, de l’Afrique du Sud à Singapour ou Fidji et bien sûr dans l’Inde tout entière. Mais s’il est un lieu où la fête doit être grandiose, c’est Ayodhya, la ville indienne où la légende a fait naître de Ram. Un gigantesque temple y a été construit ces dernières années, le Ram Janma Bhoomi, que Narendra Modi est venu inaugurer le 22 janvier dernier, même si les travaux sont encore loin d’être terminés. Ce 17 avril, soit le neuvième jour après la nouvelle lune d’avril, aurait été la date idéale pour une inauguration qui se voulait très médiatique. Mais, on est à quelques jours des élections législatives et la Commission électorale indienne aurait sans doute empêché la participation du Premier ministre à un tel événement. L’inauguration en janvier était plus prudente et tout aussi payante électoralement. Car c’est l’aboutissement d’un combat de plusieurs décennies de la part des extrémistes hindous que d’imposer leur religion au centre de l’identité indienne. C’est le combat de tous les jours de Narendra Modi. Pour construire le temple d’Ayodhya, sur l’emplacement désigné comme le lieu exact de la naissance de Ram, il a fallu détruire une vénérable mosquée datant du XVIIe. C’était en 1992, des fanatiques religieux avaient incité la foule à détruire pierre après pierre la Babri Masjid. À l’époque, les autorités indiennes avaient condamné mais rien n’avait été fait pour empêcher la destruction qui était considérée comme le point culminant du grand projet idéologique du BJP, parti politique lancé il y a trois décennies par le mouvement Ram Janmabhoomi de LK Advani. Cette politique est présentée comme la correction des torts historiques subis par les hindous « au cours de leurs mille ans d’esclavage ». Ainsi s’exprime la propagande du BJP, le parti de Narendra Modi que l’on donne gagnant aux prochaines élections. Narendra Modi n’a pas eu un mot pour les musulmans, dont la mosquée a été réduite à néant. En revanche, il a présenté le temple de Rama comme un symbole d’une Inde en plein essor, qui « brise les chaînes de la mentalité esclavagiste ». Les nationalistes hindous, au pouvoir, considèrent en effet que le pays a été victime de douze siècles d’esclavage sous les sultans et empereurs moghols (musulmans) puis sous les Britanniques.

La destruction de la mosquée d’Ayodhya fut à l’origine de l’une des vagues de violence religieuse les plus meurtrières de l’histoire indienne.  Cette situation n’est pas sans rappeler les tensions extrêmes qui règnent à Jérusalem, où une extrême droite nationaliste et religieuse est au pouvoir et où existent des foyers d’extrémistes rêvant de détruire la mosquée d’Al-Aksa pour y reconduire à la place un temple juif disparu depuis 2000 ans. À Ayodhya, les hindous en sont convaincus, la mosquée avait été construite à la place d’un temple dédié au dieu Rama.

L'histoire du dieu Rama est racontée dans le “Ramayana de Valmiki”, l'une des épopées les plus importantes de l'hindouisme, qui remonte au VIIIe ou VIIe siècle avant JC. Ayodhya était alors au sommet de sa prospérité sous le règne du roi Dashrath. La fête de Ram Navami, correspond au 9e et dernier jour de Chaitra Navratri, une période fête qui, cette année, a commencé le 9 avril. Pendant ces journées, beaucoup d'hindous font un régime végétarien strict puis un jeûne durant toute la journée du Ram Navami qui est un jour de prière. Un peu partout en Inde, on joue des adaptations théâtrales du Râmâyana appelées les Ram Lila.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 16 avril 2024

 
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