18 janvier : il y a 70 ans la Tunisie se soulevait contre l’occupation française

 

Aujourd’hui, théoriquement, c’est la Fête de la Révolution ( عيد الثورة ) en Tunisie, elle commémore le début du soulèvement contre l’administration coloniale française, le 18 janvier 1952. Bien que ce fût un jour férié pendant trente ans (de 1957 à 1987), la date du 18 janvier est peu connue des Tunisiens les plus jeunes car, depuis, elle a été occultée par d’autres révolutions. En 1988, le président Ben Ali l’a remplacé par sa propre révolution, celle du 7 novembre 1987 qui avait destitué le président Bourguiba, le père de l’indépendance. Puis, c’est la révolution du 14 janvier 2011 qui a renversé le dictateur Ben Ali et qui a été commémorée de 2012 à 2021. Mais, récemment, le président Kaïs Saïed a annoncé que la chute du dictateur serait désormais célébrée chaque 17 décembre, en hommage à l’élément déclencheur de la Révolution de Jasmin. Quant à la Révolution de 1952, il est toujours peu question d’en faire grand cas.…

Cela dit, la date du 18 janvier n’a jamais été totalement effacée du calendrier officiel des célébrations, même si ce n’est plus un jour férié et qu’elle est toujours célébrée dans une grande discrétion, voire indifférence. Mais cette année, c’est le 70e anniversaire de l’événement qui a conduit la Tunisie à l’indépendance. Le 18 janvier 1952, Habib Bourguiba était arrêté  ainsi que 20 de ses compagnons par les forces françaises. Bourguiba était le leader  du Néo-Destour (PND), le mouvement qui lutte pour l’indépendance du pays).  Aussitôt, le pays s’est embrasé et l’UGTT, dirigée par Farhat Hached, a décrété la grève générale. Des rassemblements populaires se sont produits dans plusieurs villes du pays. Une guérilla s'est même organisée dans les montagnes. La grève générale, déclenchée le 22 janvier, a tourné à l'affrontement avec l'armée française. Il y a eu des dizaines de morts et des milliers de personnes détenues dans les régions.

La France finit par reconnaître en 1954 l’autonomie interne de la Tunisie. Le 20 mars 1956,  Pierre Mendès-France signera les accords d’indépendance totale, mettant fin à 75 ans d’occupation française de la Tunisie.

La date du 18 janvier a aussi une dimension politique dans la Tunisie actuelle. En 2018, la présidente du Parti destourien libre (héritier du PND), Abir Moussi qui faisait allusion à ces événements historiques en déclarant dans un meeting populaire organisé le 14 janvier dernier que son parti « ne reconnaissait qu’une seule révolution, celle du 18 janvier 1952 ». À la veille de cette commémoration du 18 janvier 2022, la présidente du Parti destourien libre (PDL), Abir Moussi, menace de poursuivre en justice la Télévision nationale si elle ne diffuse pas, ce 18 janvier, un documentaire sur les événements du 18 janvier 1952. Soulignant que l’État est tenu de préserver la mémoire nationale. La commémoration de 2022 s’avère être un élément du combat politique contre la dérive autoritaire du président Kais Saied.

Si les autorités algériennes cultivent à l’excès la mémoire de la lutte pour l’indépendance, le pouvoir tunisien semble au contraire, particulièrement oublieux.

Mise à jour janvier 2023 : le 14 janvier 2023, plus de 10 000 manifestants ont défilé à Tunis, avenue Bourguiba, à l’appel des différents partis d’opposition. Ils sont vent debout contre le régime autoritaire que Kaïs Saïed est en train de mettre en place depuis le coup d’État du 21 juillet 2021. Mais, ils protestent aussi contre les pénuries alimentaires qui ont obligé la Tunisie à faire appel à l’aide de la Libye.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 

Bourguiba pendant une manifestation en 1951

Précédent
Précédent

19 janvier : les Éthiopiens fêtent Timket dans un climat très tendu

Suivant
Suivant

15 janvier : le Belize fête le père de la nation