L’Almanach international

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1969, Tchécoslovaquie, Tchéquie, Communisme, 16 janvier Bruno Teissier 1969, Tchécoslovaquie, Tchéquie, Communisme, 16 janvier Bruno Teissier

16 janvier : il y a 55 ans un étudiant tchèque s'immolait par le feu

Le 16 janvier 1969, Jan Palach, un étudiant en philosophie de 20 ans s’immolait par le feu, place Venceslas à Prague. 20 ans plus tard, jour pour jour, le 16 janvier 1989, une manifestation à sa mémoire était le premier déclic de la protestation contre le régime communiste.

 

Le 16 janvier 1969, Jan Palach, un étudiant en philosophie de 20 ans s’immolait par le feu, place Venceslas à Prague. Cet acte de désespoir, quelques mois après l’écrasement du printemps de Prague, n’a pas eu d’effet politique immédiat. Mais 20 ans plus tard, jour pour jour, le 16 janvier 1989, une manifestation à sa mémoire était le premier déclic de la protestation contre le régime communiste, lequel allait tomber quelques mois plus tard à la faveur de la révolution de Velours.

L’immolation de Mohammed Bouazizi, en Tunisie, en décembre 2010 avait entrainé une chute plus rapide de la dictature quelques semaines à peine. Bouazizi ne connaissait probablement pas Jan Palach, en revanche on sait que ce dernier avait eu vent du geste de Thich Quang Duc, un moine bouddhiste qui s’était suicidé par le feu à Saigon, en 1963.

Déjà, en septembre 1968, Ryszard Siwiec s’était immolé à Varsovie pour protester contre la participation des unités militaires polonaises à l’occupation de la Tchécoslovaquie. Même si Jan Palach est le seul de son groupe d’étudiants à être passé à l’acte, d’autres tchécoslovaques l’imiteront comme Jan Zajíc, lycéen de Moravie du Nord, et Evžen Plocek, dirigeant syndical de la région de Vysočina.

Un mémorial est dédié à Jan Palach sur la place Venceslas à Prague. C'est le lieu d'une commémoration chaque 16 janvier. Des rassemblements se déroulent un peu partout dans le pays, et en particulier sur le lieu hautement symbolique qu’est le parvis de la Faculté de philosophie de l’Université Charles à Prague, où Jan Palach était étudiant. Une cérémonie est aussi organisée à Vsetaty, sa ville natale.

La maison familiale de Jan Palach, située à Všetaty près de la ville de Mělník en Bohême centrale, a été transformée en musée et centre éducatif, ouvrant symboliquement ses portes le 21 août 2018, soit 50 ans après le début de l’occupation de la Tchécoslovaquie par les troupes du pacte de Varsovie.

Les autorités communistes avaient accepté qu’il soit inhumé au cimetière d’Olšany, dans le quartier de Vinohrady, à Prague. La tombe devient très vite un lieu de pèlerinage. Les gens y laissaient non seulement des bougies, mais aussi des messages ou des bouquets de fleurs… Les autorités ont fait cesser cela en exhumant le corps, en incinérant et en envoyant ses cendres pour les inhumer à Všetaty. Le 25 octobre 1990, soit près d’un an après la révolution de Velours, l’urne sera officiellement rapportée au cimetière d’Olšany, en présence de l’ancien dissident devenu président, Václav Havel.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 15 janvier 2024

 
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1918, Tchéquie, indépendance, Tchécoslovaquie, 28 octobre Bruno Teissier 1918, Tchéquie, indépendance, Tchécoslovaquie, 28 octobre Bruno Teissier

28 octobre : les Tchèques célèbrent leur indépendance

La République tchèque commémore la création de la Tchécoslovaquie, le 28 octobre 1918. Pour les Tchèques qui ont vécu quatre siècles sous la coupe de l’Autriche, c’est une date importante qui donne lieu à un jour férié, mais comme la Tchécoslovaquie n’existe plus, ils n’ont pas conservé cette date comme fête nationale.

 

La République tchèque commémore par un jour férié la création de la Tchécoslovaquie, le 28 octobre 1918, sur les décombres de l’Empire austro-hongrois dont la dissolution interviendra trois jours plus tard. La Bohême et la Moravie qui constituent (avec une petite portion de la Silésie), la Tchéquie actuelle, vivaient sous la coupe des Habsbourg depuis 1526. Antérieurement, le Royaume de Bohême avait eu un passé glorieux du XIIIe au XVe siècles. C’est dire l’importance de cette indépendance obtenue après quatre siècles vécus sous la tutelle de l’Autriche.

Le 28 octobre est aujourd’hui célébré comme le Jour de la création de l’État tchécoslovaque indépendant (Den vzniku samostatného československého státu). Chaque 28 octobre, une importante cérémonie, avec défilé militaire, se déroule au Mémorial national de Vítkov, lieu d’un fait d’armes important du XVe siècle contre les armées catholiques. Après une minute de silence, une gerbe est déposée sur la tombe du soldat inconnu.

Le président et les principaux membres du gouvernement se rendent ensuite dans le parc du château de Lány, non loin de Prague, sur la tombe de Tomáš Masaryk pour un dépôt de fleurs. Tomáš Garrigue Masaryk a été le premier président de la Tchécoslovaquie, élu le 14 novembre 1918, réélu en 1920… Il a dirigé le pays jusqu'au 14 décembre 1935. Sa figure symbolise la Tchécoslovaquie indépendante de Vienne, de Berlin et de Moscou. À Brno, une cérémonie se déroule au pied de sa statue.

Une réception est donnée au château de Prague, résidence du président de la République, Les personnalités du pays sont invitées salle Vladislav à une cérémonie de remise de décorations (I'Ordre du Lion blanc, la plus haute décoration d'État , mais aussi de l'Ordre de Tomáš Garrigue Masaryk, la Médaille de l'héroïsme et la Médaille du mérite). Devant le château, place Hradcany, se déroule la cérémonie de prestation de serment des membres de l'armée de la République tchèque.

La Slovaquie qui n’a pas eu la même histoire, ne célèbre pas cet anniversaire. Elle a choisi, au contraire, pour fête nationale, l’anniversaire de la disparition de la Tchécoslovaquie, le 1er janvier 1993. Il existe néanmoins une discrète« journée du souvenir » célébrant chaque 30 octobre, l'anniversaire de l'adhésion officielle des Slovaques à la Tchécoslovaquie.

Le 28 octobre 1918, à Genève, une délégation du Comité national dirigée par Karel Kramář entamait des négociations avec le représentant de la résistance étrangère anti-autrichienne, Edvard Beneš, sur la création et la forme d'un État tchécoslovaque indépendant. Entre autres choses, ils sont parvenus à un accord selon lequel le nouvel État serait une république (une monarchie avait également été envisagée ), Masaryk deviendrait président et Kramář serait le premier ministre. La nouvelle de la reconnaissance par l'Autriche-Hongrie des conditions de paix s'est répandue. Les conditions comprenaient notamment la reconnaissance de l'autonomie des peuples d'Autriche-Hongrie, que le peuple a interprété comme une reconnaissance de l'indépendance. Cette nouvelle a donné lieu à des manifestations de joie spontanées au cours desquelles la population a détruit les symboles de l'Autriche-Hongrie. Le prêtre Isidor Zahradník s'est adressé à la foule sur la place Venceslas, près du monument à Saint-Venceslas et a proclamé un État tchécoslovaque indépendant. Dans la soirée du 28 octobre, le Comité national a promulgué des premières lois, celle prévoyant la création d'un État tchécoslovaque indépendant et la proclamation du Comité national du « Peuple tchécoslovaque ». Les deux documents ont été signés par Antonín Švehla, Alois Rašín, Jiří Stříbrný, Vavro Šrobár et František Soukup, des personnalités qui seront appelés plus tard « Les hommes du 28 octobre ». Le même jour, quatre représentants ont été ajoutés au Comité National ; mais les représentants des Allemands et des Hongrois n’ont pas été invités.

Dès 1919, le 28 octobre a été célébré comme la fête nationale du nouvel État. À l’époque de l’occupation nazie, la fête nationale a été abolie, mais la journée a été celle de grandes manifestations de résistance, vivement réprimées par les Allemands. Le 28 octobre 1939, deux personnes ont été tuées et quinze blessées lors de la manifestation. Parmi les morts se trouvait l'étudiant en médecine Jan Opletal , dont les funérailles, tenues le 15 novembre, devinrent un prétexte pour de nouvelles protestations contre l'occupation, auxquelles les Allemands répondirent le 17 novembre 1939 en fermant les universités tchèques . Après la Seconde Guerre mondiale, la fête nationale a été célébrée jusqu'en 1951, date à laquelle son nom a été changé par les autorités communistes en Journée de la nationalisation du patrimoine. À nouveau en 1988 et 1989, le 28 octobre a été l’occasion de grandes manifestations contre la dictature. La fête nationale a été rétablie en 1990 et a été célébrée jusqu’en 1992.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 

Prague, le 28 octobre 1918

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17 novembre : les combats des étudiants de Prague et d'Athènes face aux dictatures

Les étudiants ont toujours payé un lourd tribut face aux dictatures nazies, communistes, colonels grecs… C’est la Journée internationale des étudiants. Elle fait référence à une manifestation antinazie réprimée dans le sang mais aussi à la “révolution de velours” à Prague et la répression de la dictature des colonels en Grèce contre les étudiants. À chaque fois, la date mémorielle est le 17 novembre.

 

Les étudiants ont toujours payé un lourd tribut face aux dictatures. Le 17 novembre 1939, les nazis ferment les universités de Prague et arrêtent 2000 étudiants. Deux jours plus tôt, les obsèques de Jan Opletal, étudiant en médecine mortellement blessée par la police, s’étaient transformées en manifestation contre l’occupation du pays par Hitler. Les leaders étudiants sont aussitôt exécutés, 1200 autres seront déportés. Suite à cet événement, sera lancée à Londres, dès 1941, une Journée internationale des étudiants. Celle-ci est toujours commémorée aujourd’hui, chaque 17 novembre, 83 ans après.

En 1989, il y a 33 ans, jour pour jour, donc encore un 17 novembre, et toujours à Prague, c’est un défilé d’étudiants à travers la ville qui est brutalement réprimé par la police. On compte 24 blessés graves. Le bruit ayant couru qu’un étudiant avait été tué, la population tout entière s’est soudain sentie concernée. Le 25 novembre, 700 000 personnes seront dans la rue (enclenchant la Révolution de velours). Le 29, ce sera la fin de la Tchécoslovaquie communiste. Le 17-Novembre est célébrée aujourd’hui comme le Jour de la lutte pour la liberté et la démocratie, fériée en Tchéquie (Den boje za svobodu a demokracii) et en Slovaquie (Deň boja za slobodu a demokraciu).

À nouveau un 17 novembre, mais cette fois à Athènes, on est en 1973, en pleine dictature. Les étudiants grecs en révolte depuis plusieurs mois contre le régime des colonels, avaient fini par se barricader dans l’École polytechnique d’Athènes pour échapper aux brimades de la police. Le 17 novembre, ce sont les chars qui ont l’assaut de l’école. Cela s’est soldé par des dizaines de morts, des milliers d’arrestations. La population a afflué aux abords de l’école… Cette fuite en avant du régime a abouti quelque mois plus tard à sa chute. Depuis le retour à la démocratie, en 1974, les écoliers grecs n’ont pas classe ce jour-là, en souvenir des victimes de la dictature. Depuis ce jour la police n’avait plus accès au périmètre de l’université, ce droit d’asile universitaire a existé jusqu’à sa suppression en 2019 par l’actuel gouvernement Mitsotakis.

Chaque 17-Novembre (17 Νοεμβρίου) est célébré officiellement à partir de 1982, quand la gauche est au pouvoir. La journée est aussi marquée à Athènes par des manifestations étudiantes plus ou moins violentes. Les discours de Kyriakos Mitsotakis, l’actuel premier ministre (droite), sur le retour à l’ordre n’a pas manqué, en effet, d’attiser régulièrement les tensions.

Il est vrai qu’en 2019, des hommes ont été arrêtés à Athènes, on les soupçonnait d’avoir préparé des attentats contre des ambassades. On se souvient qu’il a quelques décennies, un groupe terroriste marxiste grec, aujourd’hui disparu, se faisait appeler… « 17 novembre ». C’est ce groupe armé qui a assassiné, il y a 32 ans, Pavlos Bakoyiannis, le père du maire d’Athènes et donc, l’oncle du premier ministre grec, Kyriakos Mitsotakis. On peut comprendre qu’ils soient tous les deux aussi déterminés à mater l’esprit contestataire du quartier étudiant de la capitale grecque, repaire de l’ancien groupe armé.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde, 16 novembre 2022

 
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1942, Tchéquie, Tchécoslovaquie, 18 juin, attentat Bruno Teissier 1942, Tchéquie, Tchécoslovaquie, 18 juin, attentat Bruno Teissier

18 juin : la Tchéquie célèbre un attentat

Commémoration de l’attentat réussi contre Reinhard Heydrich, gouverneur de Bohême-Moravie, adjoints SS favori de Hitler et l’un des cerveaux de l’Holocauste, le 18 juin 1942.

 

Soixante et dix-huit années se sont écoulées depuis la mort des sept parachutistes tchécoslovaques qui ont participé à l’attentat réussi contre Reinhard Heydrich, gouverneur de Bohême-Moravie, adjoints SS favori de Hitler et l’un des cerveaux de l’Holocauste.

Chaque jour, Heydrich fait le trajet, sans escorte, du château de Panenské Brezany jusqu’au siège de la Gestapo, dans le centre de Prague. L’attentat a lieu le 18 juin 1942 sur cette route, qui descend du nord de la capitale en serpentant, dans un virage en épingle, à l’angle de la rue de Holesovice, dans le quartier de Liben.

Une commémoration et une messe ont traditionnellement lieu, en présence du président de la République, sur  le lieu du drame, dans l’église orthodoxe Saint-Cyrille-et-Méthode, à Prague. Ce soir également, un concert sera donné sur le lieu de l’attentat contre Heydrich, en hommage aux auteurs de cet acte héroïque.

Recherchés pendant quinze jours par la Gestapo et finalement trahis par l’un des leurs, les sept hommes, cachés dans l’église, sont morts au terme d’un combat sanglant mené pendant six heures contre 700 soldats de la SS. Dans le pays, la vengeance des nazis fut cinglante. La loi martiale fut déclarée, deux villages qui avaient abrité les auteurs de l’attentat entièrement détruits et leurs habitants, exécutés, pour 5 000 d’entre. L’Église orthodoxe, qui avait soutenu les résistants, paya également un lourd tribut avec l’exécution du chapelain de l’église Saint-Cyrille-et-Méthode et celle de l’évêque Gorazd. 

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 
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1918, Slovaquie, 30 octobre, Tchécoslovaquie Bruno Teissier 1918, Slovaquie, 30 octobre, Tchécoslovaquie Bruno Teissier

30 octobre : l'anniversaire de la déclaration de la nation slovaque

Le 30 octobre (1918) est la date de la proclamation de la Déclaration dite de Martin. Dans ce document, les représentants du peuple slovaque, autoproclamés et qui étaient réunis dans la ville de Martin, ont entériné à leur tour la formation du nouvel État tchécoslovaque et ainsi marqué l’adhésion du peuple slovaque à celui-ci.

 

Longtemps le 28 octobre a été férié, en souvenir de la création de la Tchécoslovaquie en 1918. Il ne l’est plus depuis la partition du pays. Pour commémorer néanmoins l’officialisation d’une nation slovaque, en 1918, dans les décombres de l’empire Austro-hongrois, on ne pouvait pas reprendre la date du 28. Le choix s’est porté sur le 30 octobre, date de la proclamation de la Déclaration dite de Martin. Dans ce document, les représentants du peuple slovaque, autoproclamés et qui étaient réunis dans la ville de Martin, ont entériné à leur tour la formation du nouvel État tchécoslovaque et ainsi marqué l’adhésion du peuple slovaque à celui-ci.

Jusqu’en 1950, la petite localité se dénommait Turčiansky Svätý Martin. C’est déjà dans cette localité qu’un Mémorandum de la nation slovaque avait été rédigé en 1848 lors des semaines révolutionnaires qui ont cristallisé les nations. Dans le document signé le 30 octobre 1918, les représentants du peuple slovaque entérinaient la création de l’État tchécoslovaque, dans laquelle le général franco-slovaque Milan Rastislav Štefánik avait joué un rôle prépondérant.

En 2018, le 30 octobre a été déclaré férié. Néanmoins, le jour de la Déclaration de l’État slovaque (Výročie Deklarácie slovenského národa) ne sera plus les années suivantes, la Slovaquie étant déjà bien dotée en jours fériés — le record d’Europe —, mais cette date sera désormais marquée par des commémorations.

Un article de l'Almanach international des éditions BiblioMonde

 
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